Derrière les barreaux. Depuis 77 jours. Et ses jours sont en danger. Il ne se plaint pas, il dénonce. Et a rédigé son testament. Il aurait dû être à Cannes, parmi le jury de la compétition officielle de cette 63ème édition. Mais voilà. Il est en prison. Dans son pays, l'Iran, avoir « l'outrecuidance » de filmer une manifestation d'opposants au régime d'Ahmadinejad, c'est sceller son propre sort, de plomb fondu. Même si on a été Ours d'or à Berlin, qu'on ait été récompensé à Cannes, et qu'on s'appelle Jafar Panahi. Il paraît que Juliette Binoche a pleuré quand elle a lu le message-testament du cinéaste, et que la « grande famille » du cinéma présente au festival, remue ciel et terre pour que le réalisateur du « Cercle », du « Sang et or » et du « Ballon blanc » soit relâché. Avant qu'il ne soit trop tard. Abbas Kiarostami dont Jafar Panahi avait été l'assistant avant qu'il ne passe à la réalisation, soutient de tout cœur son compatriote et ami. Mais si la mobilisation est quasi générale, les mots du cinéaste font peur, d'autant qu'il parle au nom de ces milliers d'anonymes, emprisonnés dans les conditions les plus sordides, comme lui, et dont la voix ne porte pas. Il parle aussi au nom de sa famille qui n'est pas en sécurité. Il a peur pour elle, et eux ont peur pour lui. Parce que son sort est incertain. Parce que demain il peut mourir. Ou alors, parce qu'il a entamé une grève de la faim, et qu'il a juré au nom du cinéma auquel il croit, qu'il ne l'interrompra pas, tant qu'il n'aura pas été entendu. Combien de temps pourra t-il encore supporter l'arbitraire, d'être gardé derrière les barreaux, sans même avoir été jugé ? Jugé pourquoi au fait ? Pour avoir pensé que le cinéma pouvait changer les choses, et pour avoir choisi d'être libre. Mais cela, même les murs les plus épais, même l'arrogance tortionnaire, ne pourront rien y changer.