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Les huissiers-notaires «notifient» leur mécontentement Corps de métier - «Grille des honoraires jugée en deçà des attentes, rétrécissement de leur champ d'intervention, concurrence avec les avocats »
• «Un pas en avant, deux pas en arrière», disent-ils - La nouvelle grille des honoraires des huissiers-notaires alimente encore la controverse chez ces professionnels du monde judiciaire. Réunis, hier à Tunis, à l'occasion d'une Assemblée générale extraordinaire du Conseil de l'Ordre national des huissiers-notaires, ces auxiliaires de justice chargés de l'exécution des décisions des tribunaux en matière civile ont unanimement estimé que l'arrêté portant actualisation de leurs honoraires, promulgué le 7 octobre dernier par le ministère de la Justice et des Droits de l'Homme et le ministère des Finances, constitue «un pas en arrière» en ces temps où le nombre de nouveaux entrants dans la profession ne cesse d'augmenter. «L'arrêté, dont la promulgation était attendue depuis plus de huit ans, est décevant à plus d'un titre», a affirmé M. Habib Dridi, président du Conseil de l'Ordre national des huissiers-notaires, dans son allocution d'ouverture des travaux de l'assemblée générale. Et d'ajouter : «D'une part, l'arrêté relatif à nos honoraires a carrément supprimé ou gelé les émoluments relatifs à certains actes qui constituent l'essentiel de nos activités comme la signification et la rédaction des copies des procès verbaux. D'autre part, il a obligé les huissiers-notaires à se charger de certaines nouvelles tâches pour lesquelles ils ne sont pas payés à l'instar du dépôt des rémunérations des agents de la force publique à la Trésorière générale. Bref, l'arrêté constitue, à leurs yeux, un pas en avant et deux pas en arrière». «Porte-ouverte aux dérapages» M. Dridi a également noté que la nouvelle grille des honoraires ouvre grandement la porte aux dérapages. D'autant plus qu'un huissier-notaire mal rémunéré peut recourir à des pratiques immorales telles l'escroquerie de ses clients pour éviter des fins de mois difficiles. Même son de cloche chez la plupart des intervenants lors du débat général. «Nous ne cherchons aucunement à devenir riches, mais nous restons attachés à une grille des honoraires de nature à préserver la dignité de l'huissier-notaire et à protéger la corporation contre toutes sortes de dérapages immoraux», a indiqué M. Mustapaha Hemila, tout en proposant la constitution par les instances ordinales de comités chargées d'élaborer un projet de réforme globale de la profession. De nombreux autres intervenants ont, par ailleurs, soulevé la détérioration de la situation matérielle des huissiers-notaires, dont certains «n'arrivent plus à payer leurs loyers ou à engager des clercs», et appelé à lancer un mot d'ordre de grève d'ici fin décembre prochain. Cet appel au lancement d'un préavis de débrayage n'a pas, toutefois, recueilli l'assentiment de la plupart des quelque 400 huissiers-notaires présents dans la salle. «Nous devons privilégier le dialogue et nous éloigner de la logique de la confrontation avec les autorités de tutelle pour redorer le blason de la profession. Le Conseil de l'Ordre n'est pas un syndicat. Celui qui cherche à faire du syndicalisme pur et dur n'a qu'à adhérer à l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT)», a notamment déclaré M. Khaled Khelifi. Rude concurrence avec les avocats Les intervenants n'ont pas manqué, par ailleurs, de contester le rétrécissement de leur champ d'intervention. «La liste des actes nécessitant le recours exclusif aux services d'un huissier-notaire ne cesse de rétrécir telle une peau de chagrin sous l'effet de la promulgation de plusieurs textes de loi et arrêtés règlementaires qui autorisent les avocats à rédiger les contrats ou permettent aux sociétés de recouvrement des créances de remplacer l'huissier-notaire dans ce domaine», a déploré M. Dridi. Estimant que l'évolution du champ de compétence de ses confrères n'est pas allée de pair avec l'augmentation du nombre de nouveaux entrants dans la profession, le président du Conseil de l'Ordre national des huissiers-notaires a aussi longuement dénoncé l'introduction du principe du règlement amiable en matière de dédommagement des accidents de la route dans le Code des assurances, qui a privé, selon lui, l'huissier-notaire d'une source importante de revenus. M. Dridi a notamment souhaité l'extension du champ de compétence des huissiers-notaires aux actes de procédure pénale, au recouvrement amiable des créances et à la vente des fonds de commerce. Dans une motion professionnelle adoptée à l'issue de l'assemblée générale, le Conseil de l'Ordre national des huissiers-notaires a appelé le ministère de la Justice et des droits de l'Homme à ouvrir le débat sur la révision de la nouvelle grille des honoraires des gens de la profession d'ici le 15 décembre , notant, toutefois, qu'il «se réserve le droit de programmer des actions revendicatives pour défendre l'intérêt des ses adhérents». Du côté du ministère de la Justice et des Droits de l'Homme, on estime, en revanche, que la nouvelle grille des honoraires «vient consolider les acquis» des huissiers notaires qui constituent un rouage indispensable de l'appareil judicaire. Le ministère réitère aussi sa prédisposition à débattre de l'élargissement du domaine de compétence de la corporation.