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L'horloge de l'Histoire
Publié dans Le Temps le 29 - 05 - 2011

Ce n'est pas parce que le 24 juillet représente une date à hauts risques qu'il faut, justement, éviter de prendre des risques ! Au contraire, le report ne stabilisera pas le métabolisme consensuel de cette phase déterminante dans le processus démocratique ; il n'assurera pas cette logistique technique, le prétexte de la Haute Instance. Plutôt, il met en place un sournois processus « contre-révolutionnaire » dès lors qu'il en finira de dépiter les jeunes dont le désenchantement est on ne peut plus palpable.
Il était inévitable que les tribuns s'emparent de la Révolution intégralement faite par nos jeunes. Sauf que cette libération, cette purgation aristotélicienne des passions, aura vite fait de baliser le champ politique pour les seuls professionnels de la politique, il est vrai persécutés par l'ancien régime, mais qui sont aujourd'hui dans une logique de rupture. Et les jeunes s'en retrouvent, comme toujours, marginalisés sinon carrément exclus.
Maintenant qu'Ennahdha s'arrange pour devenir un syndrome – c'est son argument marketing – ou que les partis ayant ouvertement affronté Ben Ali et même Bourguiba, se proclament d'un rôle messianique, cela procède autant de la victimisation « persécutée » que d'une tendance à réécrire une espèce de métahistoire de la Révolution tunisienne.
Tous s'en arrogent la légitimité ; tous investissent la scène politique mais avec les mêmes schémas conducteurs : massification en aval, élitisme rigoureusement sélectionné en amont. Cela procède aussi d'une pathologie sociologiquement avérée : le complexe de Perrichon. La future bien-pensance politique, les partis libérés et affranchis par les jeunes, sont dérangés à la vue de leurs bienfaiteurs. La vue des jeunes, l'incapacité à les comprendre, à les écouter, le devoir de mémoire,… Tout cela les interpelle… et leur met, pour ainsi dire, le couteau sous la gorge.
Entre temps, il va falloir en découdre avec la Haute Instance qui, à l'évidence, se complaît, imperturbable, dans sa Tour d'Ivoire croyant pouvoir ralentir l'horloge de l'Histoire.


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