Dans une ambiance très bon enfant et dans un cadre très accueillant, une séance de dédicace a eu lieu samedi dernier à l'Espace Sadika à Gammrth. C'est Mouniz, poétesse et nouvelliste tunisienne, qui présentait son nouveau recueil de poésie intitulé « Une sublime odeur de jasmin fumé », paru récemment aux Editions APOLLONIA. Mouniz est aussi l'auteure d'un autre recueil de poèmes « Poèmes à l'Ifriqyenne » et d'un recueil de nouvelles. Elle a reçu en 2006 le premier prix « Alain Decaux » de la francophonie. La couverture du livre ainsi que les nombreuses illustrations qu'il comporte sont l'œuvre du peintre tunisien Mohamed Chelbi. « Une sublime odeur de jasmin fumé », le titre choisi par Mouniz, renvoie sans aucun doute à la Révolution, quoique le mot « jasmin » ait suscité beaucoup de controverses chez bon nombre de Tunisiens qui refusent catégoriquement que ce vocable soit associé à leur révolution faite de feu et de sang ! Mais il paraît que l'auteure y tient absolument car, expliquait-elle, les fleurs ont toujours été choisies comme emblèmes à des systèmes politiques ou des mouvements révolutionnaires, comme la rose pour les gauchistes et le lys pour les rois. Seulement, l'auteure a ajouté un qualificatif « fumé », allusion faite à la fumée causée par les incendies, les bombes lacrymogènes, les coups de feu qui avaient accompagné la Révolution ! Pour ce qui est du contenu, ce recueil est composé de deux parties : la première comporte deux sous-parties, une consacrée aux poèmes secrets écrits dans la discrétion totale que l'auteure a gardés cachés ou souvent oubliés au fond des tiroirs durant les années de la dictature, une autre destinée aux poèmes de l'autocensure, ceux qui ont dû subir des transformations, moyennant des « subterfuges et des acrobaties littéraires » pour être publiés. La deuxième partie de ce recueil, intitulée « Ecrire sous libération ou les poèmes de la Révolution », cet événement historique qui a donné de l'inspiration à notre poétesse pour qu'elle donne libre cours aux sentiments qui avaient éclaté en effusions poétiques en toute liberté sans censure ni autocensure. Le recueil s'ouvre sur une dédicace : « Aux martyrs des révoltes, aux martyrs du feu, aux martyrs du web, aux martyrs de l'information…, » suivie d'une préface écrite par l'auteure, en guise d'une présentation sommaire de son ouvrage. Il y a en tout 42 poèmes qui dénoncent l'injustice, le despotisme, la barbarie de l'ancien régime et qui chantent la liberté, la dignité, la gloire, la démocratie à travers des textes immortalisant la Révolution. Plusieurs poèmes sont introduits par une citation ou une pensée d'éminents penseurs et écrivains choisie minutieusement par l'auteure conformément à l'esprit de chaque poème. Un bouquet de courts poèmes intitulé « Les cris rimés » est offert en fin du recueil aux héros de la Révolution. La séance de dédicace était, à vrai dire, très originale, dans la mesure où la poétesse ne s'est pas contentée de présenter son ouvrage aux assistants, comme il est de coutume lors des séances de dédicace. Mais, pour joindre l'utile à l'agréable, Mouniz s'est fait accompagner par le musicien luthiste, H. Laâribi, pour assurer en duo des scènes de slam basées sur la mise en musique de textes poétiques choisis dans le recueil : une sorte de théâtralisation associant la poésie à la musique qui a beaucoup attiré l'attention du public. Ce n'était pas un simple accompagnement musical, mais plutôt une création poético-musicale qui menait à une certaine symbiose entre les vers déclamés par la poétesse et les airs joués par le luthiste. Des scènes qui ne manquaient pas d'humour noir et d'amertume, mais aussi pleines de gaieté et de ferveur. Parmi les poèmes chantés, il y avait « La leçon du despote », « Le Diamant », « Ellil ya Leïla », « Femmes en révolution » et d'autres encore qui ont été très appréciés par les assistants. Hechmi KHALLADI ** « Une sublime odeur de jasmin fumé » de Mouniz, Editions Apollonia, 147 pages.