67 œuvres récentes du peintre Mohamed Chelbi sont exposées jusqu'au 15 janvier à la galerie Chérif Fine Art à Sidi Bou Said sous le thème « Puits et puis ». S'il a intitulé son exposition « Puits et puis », c'est que Mohamed Chelbi s'intéresse aux bas-fonds, à la déchéance humaine exprimée dans toute sa crudité et sa cruauté. Expressionniste, sa peinture ne décèle ni sensualité, ni érotisme. Les corps représentés sont délimités par des traits épais dont la tension efface toute sensation de plaisir. L'exposition est dominée par des thèmes sociaux et culturels mais aussi de manière suggestive, politiques. Elle s'inscrit dans l'actualité que vit la Tunisie depuis le 14 janvier. Les compositions sont travaillées en traits appuyés, sombres qui cernent les couleurs violentes et contrastées réalisées dans la matière. L'intérêt de ces œuvres réside notamment dans le choix du thème inattendu comme par exemple le portrait de Mona Lisa de Leonardo Da Vinci revu et corrigé par les soins de Chelbi. L'icône prend un aspect repoussant en raison des tons sombres et des traits défigurés du personnage de Mona Lisa à qui il donne le nom de Mona Didon communiquant à l'ensemble un caractère tragique. L'expressivité du traitement du personnage et les éléments qui l'entourent confèrent à l'œuvre ce caractère tragique. Au niveau des couleurs prédominent les teintes primaires et les complémentaires ce qui dote les tableaux d'une forte charge d'agressivité qui reflète l'anxiété éprouvée par l'artiste et qui se manifeste clairement dans « Man autoum » représentant une fenêtre entrouverte au fond du tableau et dans le reste de l'espace de la pièce une foule de rats. Un esprit révolutionnaire marque l'œuvre de Chelbi qui se justifie par la crise que traverse actuellement le pays. Il y a comme un esprit de rébellion qui se dégage de cette exposition. Le visiteur est appelé à puiser dans « le puits » de Chelbi, c'est le titre d'ailleurs d'un tableau de cette exposition dont il faudrait dévoiler les secrets. D'autre part, le peintre fait refléter son monde interne en opérant un certain nombre de déformation et dans l'idée de dépasser ses angoisses. « L'art est l'étincelle qui te lie à l'humain » souligne-t-il. La beauté se trouve ici dans la laideur et la souffrance d'un artiste qui sait faire l'écho de ce qui se passe dans sa société en le transcendant en œuvre d'art qu'on peut aimer ou détester. A vous de voir.