La révolution tunisienne suscite encore et toujours l'intérêt des écrivains du fait que c'est un événement unique, un tournant décisif qui a transformé l'histoire de la Tunisie demeurée inchangée depuis plus d'un demi-siècle. Etant un événement sensationnel, la révolution a fait coulé beaucoup d'encre chez les écrivains, les chercheurs et les historiens qui ont tous voulu apporter leurs témoignages sur ce qu'ils ont vécu. C'est dans ce cadre que la Maison d'édition Sahar publie en 2012 le roman en langue française intitulé : “Le vent se lève en janvier" signé Ali Toumi Abassi, enseignant de français à son actif plusieurs romans : “Tirza, Tunis", Cérès et Paris Gallimard, 1996, “Stendhal hybride", l'Harmattan,2OO2, “Littératures tunisiennes", l'Harmattan, 2OO6 et “Erratiques", Tunis, Sahar, 2OO6. Dans la préface, l'auteur précise que le mois de janvier est dans l'histoire de la Tunisie contemporaine le mois des révoltes populaires et des révolutions. il évoque entre autres la révolte du pain de janvier 1984, la révolte du bassin minier de Gafsa en 2008 qui justifie pleinement que le mois de janvier est celui de la colère pour les Tunisiens. Le premier chapitre du roman placé sous le titre “La colère de janvier" fait le récit de la révolution depuis le fameux dernier discours “Je vous ai compris" du président déchu en passant par les différents épisodes de la révolution et ce sous forme de chronique des jours de ces événements qui représentent pour certains un soulèvement populaire tandis que pour d'autres, il s'agit d'une révolution. Dans une langue française agréable à lire, le romancier décrit les moments forts et les premiers émois après tant d'années de répressions et de censure. L'avenue Bourguiba qui représentait l'ordre et la discipline est devenue après le 14 janvier le théâtre de la liberté et du refus de l'obscurantisme et de la dictature. Elle s'est transformée en espace de débats et de partage de différents avis. Le déclenchement de la révolution à Sidi Bouzid avec le suicide par le feu de Mohamed Bouazizi relayé par le réseau social Facebook et particulièrement par les jeunes qui ont programmé les manifestations de l'artère principale de la capitale brandissant le désormais célèbre slogan “Dégage" ont participé à déboulonner le régime dictatorial bien installé sur son piédestal. L'auteur dénonce l'élite intellectuelle, les médias et certaines personnalités qui se sont caractérisées par leur mutisme. Le sit-in devant le siège du gouvernement à la Kasbah, la passation du pouvoir de Mohamed Ghanouchi et Foued Mbazaâ, le retour au bercail de Rached Ghanouchi, les grèves qui ses sont répandues un peu partout dans le pays, c'est tout ce bouillonnement politique et social que retrace Ali Toumi Abassi avec son regard de fin observateur des événements ayant succédé la révolution dont les slogans principaux sont la justice sociale et la dignité pour tous les citoyens tunisiens aspirant à une vie meilleure. Ali Toumi Abassi a réussi à marquer sa présence dans la révolution à travers cette chronique chargée d'émotions et d'analyse politique. “Le vent se lève en janvier" mérite l'attention des lecteurs d'autant qu'il se situe entre le récit et la chronique. Un roman-documentaire sur l'histoire de la révolution tunisienne au cours de ses premiers mois.