Les agressions contre les journalistes sont devenues monnaie courante. Chiffres à l'appui. Plus de 50 atteintes ont été observées par le Centre de Tunis pour la Liberté de la Presse dernièrement. En fait, nombreux sont les professionnels de médias qui ne cessent de subir différentes formes d'atteintes de la part des agents de police, des sympathisants des partis politiques et même des citoyens. Il s'agit d'ailleurs des principaux agresseurs contre les professionnels, c'est ce qui a été relevé dans le rapport annuel du Syndicat National des Journalistes Tunisiens (SNJT) publié à l'occasion de la Journée Mondiale de la Liberté de la Presse. Pour mieux protéger les journalistes contre toutes les formes d'agressions, l'Article 19 a organisé hier un atelier de réflexion avec quelques professionnels afin d'évaluer leurs besoins et pouvoir faire face à ce problème. La rencontre a été aussi une occasion pour parler de l'impunité dont jouissent des responsables d'attaques contre les journalistes et les initiatives à prendre pour dissuader ceux qui s'acharnent contre les professionnels de médias. Si quelques journalistes sont conscients des dangers auxquels ils font face et les menaces qui guettent le secteur, d'autres non. Cela est dû entre autres à la banalisation de la violence qui ne cesse d'être pratiquée par différentes parties et qui se répercute négativement sur le métier. Le secteur fait, d'ailleurs, l'objet de campagne de dénigrement où on qualifie la profession d'être celle de la « Honte ». Ces pratiques ne sont plus malheureusement isolées. Il s'agit en effet, de toute une culture qui prend place dans notre société, où salafistes, acteurs politiques, et citoyens s'acharnent contre les journalistes. « Avant, on savait qui étaient nos ennemis. Ce sont la police et le pouvoir », rappelle Néji Boughouri syndicaliste. Alors que ce n'est plus le cas aujourd'hui. Les femmes et les hommes de médias sont ciblés par plusieurs personnes et « subissent différentes formes d'agression : morale, verbale, physique… », précise Mondher Cherni, avocat et défenseur des droits de l'Homme qui attire l'attention sur l'impunité offerte aux agresseurs des journalistes. Ces derniers ne sont pas jugés. Ils échappent à la punition d'une manière ou d'une autre. En contrepartie, « on constate une rapidité au niveau du traitement des plaintes déposées contre les journalistes », signale l'avocat. Exemples S'agit-il là de la politique des deux poids deux mesures ? A priori c'est le cas. Et nombreux sont les exemples. La comparution de Zied El Hani le 3 mai 2013 devant le juge d'instruction n'est pas un cas isolé. D'autres collègues ont dû se trouver dans la même situation suite à la publication d'articles et d'informations qui ne plaisaient pas aux autorités au pouvoir. Pour mieux tracer le sort des plaintes déposées par les journalistes contre leurs agresseurs, l'Observatoire de Lutte Contre les Agressions à l'égard des Journalistes au sein du Centre de Tunis pour la Liberté de la Presse compte publier un rapport à la fin du mois en cours, et ce « pour donner une meilleure idée sur la question », précise Me Charni chargé de cette mission. Mais l'impunité est-elle un problème spécifique aux journalistes, ou s'agit-il d'une caractéristique générale du système judiciaire ? L'impunité est-elle un problème auquel s'attaque l'Etat, est-elle une préoccupation de la société civile et des médias ? Ces questions ont été posées lors de la rencontre avec les journalistes. Elles feront l'objet de travail de l'Article 19 prochainement pour mieux assister les professionnels à se protéger et protéger par conséquent la liberté de la presse et d'expression. Tout un plan d'action diversifié sera mené en partenariat avec les différents intervenants pour prémunir les professionnels contre les agressions. Rien que pour protéger le secteur qui doit savoir faire face à toutes les tentatives de manipulation.