L'acquis indiscutable de la révolution est la liberté d'expression. Les citoyens expriment de plus en plus leur colère, leur rage, leur dégoût, face à la violence quotidienne, à l'agressivité ambiante, à l'intimidation, au terrorisme et aux assassinats politiques; par des marches et des manifestations pacifiques ou par l'Art et la culture d'une façon spontanée et dans des cadres associatifs. L'association "Femmes, montrez vos muscles!" présidée par Sadika KESKES et le mouvement "anouARTounès" créé en juin 2013 à la suite d'une canalisation d'énergie et de savoir faire de trois passionnés d'Art, Sadika KESKES, Faouzia SAHLI et Mahmoud CHALBI; se sont mobilisés et œuvrent entre autres pour la production et les échanges culturels interrégionaux. C'est ainsi que des artistes plasticiens, des musiciens, des journalistes, des photographes...se sont dirigés le 17 août 2013 vers Kasserine; accompagnés de la troupe "les troubadours" de Adnène HELALI qui clôturait le festival international de Celium. C'est une action culturelle de solidarité avec les familles des martyrs du gouvernorat de Kasserine et notamment les victimes des actes terroristes lâches et abjects de la montagne Chaambi. Ces artistes qui ont pleinement profité de la brise marine estivale à l'espace SADIKA, pendant le festival d'anouARTounès en Juin, sont déterminés à protéger l'arrière pays, contre toute mutilation ou paralysie d'une de ses régions et contre l'agonie de tout espoir. A travers les vitres du bus, les arbres de différents tons de vert défilent impassibles. Les terres agricoles ocres, travaillées par la musculature féminine, cherchent éternellement une issue salutaire de fertilité. Les forêts brûlées résistent avec des repousses. Les moutons (de Panurge) paissent tranquillement à l'ombre dans les champs d'oliviers clôturés par les figues de barbarie; au moment où les barbares et les terroristes sillonnent la montagne et pendant que le pouvoir slalome entre les dunes de la crise ! Bercée par la voix de Wadii ESSAFI et la chanson réellement de circonstance "Allallah t'oud" ; mes yeux se perdent dans les étendues d'oliveraies alternées de terrains déserts et jonchés hélas de déchets plastiques et métalliques. Un ciel gris cendre enveloppe le paysage à l'image de la grisaille politique qui a pollué les esprits, endeuillé le pays et les cœurs habituellement bleu azur en cette saison estivale. Les photographes présents comme Lilia BEN ZID et Mahmoud CHALBI ont trouvé leur bonheur, et surtout Lilia très enthousiaste, et toujours armée de son appareil qui s'est engagée à sillonner le pays du nord au sud pour démasquer, dévoiler, marquer et figer des moments insolites par des clichés subtils et en faire des phrases ou installation de libres et multiples lectures. Arrivés à destination, après un accueil bien chaleureux de la part de nos compatriotes de Kasserine, les panses bien remplies, nos artistes se mettent à l'oeuvre. A la place des martyrs, Sadika KESKES, acrobate du verre soufflé, construit son installation de cubes en verre, avec une dynamique et une synergie populaire spontanée. Les tombeaux en verre installés à la mémoire des martyrs, dégagent un effet magique, pur, avec une transparence qui laisse passer les lumières et les énergies positives des âmes paisibles. Une transparence revendiquée par tous et qui reste à l'antipode de l'opacité politique, médiatique, administrative, électorale et de gouvernance. Najet GHERISSI , artiste sculpteur, connue par ses œuvres gigantesques et spectaculaires, offre à la région un cheval métallique grandeur nature, symbole de force et d'énergie et prédateur de joie et de bien être par sa peinture florale. Comme le peuple monte sur ses grands chevaux, c'est le cheval de bataille pour un mouvement de masse chevaleresque ! Adnene HELALI , natif de la région, artiste multidisciplinaire des planches, rend hommage avec sa troupe "les troubadours" , aux martyrs du gouvernorat. Son spectacle des fables de la fontaine avec des enfants et des jeunes est bien rafraîchissant. C'est un voyage nostalgique des bancs de l école; avec des voix claires, justes et biens placées. La séduction de l'assistance continue avec une partie musicale de chants révolutionnaires palestiniens interprétés admirablement par la même troupe; et ce en collaboration avec l'association de fraternité égypto-tunisienne présidée par Ahmed SAMIR, lui même solidaire avec les familles des martyrs et compatissant avec leur cruelle douleur et leur souffrance lancinante, par l'art nourriture de l'âme et la culture nourriture de l'esprit ! Ali GHERIBI, artiste local, tague et calligraphie des slogans révolutionnaires sur les murs intérieurs clôturant le théâtre de plein air et y immortalise l'amour de la patrie, la fidélité et la citoyenneté, ainsi que la résistance porteuse de rêves et d'espoir. Cette résistance artistique, civique et pacifique est aussi portée par certains artistes plasticiens comme Hassen GUEMRI, Amor GHEDAMSI également journaliste, Taoufik BEHI sculpteur et plus connu internationalement comme chef décorateur de cinéma...Ils rassemblent leurs énergies, entrent en transe et en communion dans la réalisation d 'une fresque murale, malgré la grosse pluie de la tempête survenue ce soir là. L'île de Djerba n' a pas manqué et ce rendez vous , avec Mehrez BEN GHALI et ses mille et un mensonges. Performance linguistique en dialectal djerbien, amusante et enrichissante. Multiplier ce genre d'action sans censure, avec un plus de sécurité, de tolérance dans la liberté d'expression, permettra de soustraire l'analphabétisme culturel, l'obscurantisme et la misère intellectuelle en vue d'anéantir l'idée de diviser pour mieux régner ! C'est une vraie opération mathématique pour renforcer l'amour de la patrie !!!