La polémique suscitée par le dernier mouvement dans le corps des magistrats décidé par le ministre de la Justice, est loin de connaître son épilogue. Le ministre pour se justifier a publié un communiqué dans lequel, il réitère sa position selon laquelle les nominations faites sont légales. Il rappelle que selon l'article 7bis, du statut des magistrats, les nominations dans les hautes fonctions de la magistrature à savoir le premier président de la Cour de Cassation, le procureur général auprès de la même Cour, le procureur général directeur des services judiciaires, l'inspecteur général du ministère de la Justice, le premier président de la Cour d'Appel de Tunis et le procureur général auprès de la même Cour se font par décret sur la base d'une proposition du ministre de la Justice qui n'est pas obligé de consulter l'ancienne Instance Supérieure de la Magistrature ou l'actuelle instance provisoire. Concernant les deux membres de l'instance provisoire qui ont été mutés, le ministère rappelle qu'ils avaient été chargés de façon provisoire par ordonnance le 13 février 2012 et le 9 mars 2012. Par respect au parallélisme des formes, ils ont été démis de la même manière. Il rappelle que l'Instance provisoire de la magistrature ne les a pas confirmés dans leurs postes. Le ministère précise qu'il n'y avait aucune intention de mettre au pas l'Instance provisoire de la magistrature et déplore la réaction de l'instance. L'Observatoire Tunisien de l'Indépendance de la Magistrature (OTIM), dirigé par Ahmed Rahmouni, s'étonne de la manière avec laquelle le ministre continue à snober l'instance provisoire de la magistrature. Il l'avait taxée, le 19 septembre dernier, de « corps étranger à la magistrature ». Pour avoir refusé et dénoncé les dernières nominations, l'Instance a été considérée d'avoir gravement dévié. Le ministère a passé sous silence les reproches faits concernant l'absence de moyens consécutive à l'absence de volonté politique. L'OTIM constate que le ministère tient à conserver les anciens avantages issus et hérités de l'ancien régime et à se conforter dans l'interventionnisme. Les nominations faites sur la base de propositions du ministre de la Justice portent atteinte aux garanties nécessaires à l'indépendance de la justice. Ahmed Rahmouni, déplore que le ministre ne veuille pas se départir des pratiques léguées par l'époque dictatoriale. Par ailleurs, l'OTIM craint que le ministre soit enclin à continuer sur la même voie en optant pour d'autres nominations faites de façon individuelle et abusive. De toute façon l'Instance provisoire de la magistrature a déclaré le 17 octobre courant qu'elle est déterminée à exercer ses totales prérogatives, concernant les nominations dans les hautes fonctions de la magistrature. Elle a annoncé le 22 octobre l'ouverture des candidatures pour le poste de procureur général auprès de la Cour d'Appel de Tunis. Ce poste fait partie des hautes fonctions spécifiées dans l'article 7 bis des statuts des magistrats. La nomination dans ces postes se fait par décret signé par le chef du Gouvernement sur décision de candidature faite par l'Instance conformément à l'article 14 de la loi du 2 mai 2013, créant l'instance et les dispositions de l'article 17 de la loi fondamentale de l'organisation provisoire des pouvoirs. D'ailleurs l'Instance considère implicitement que le pouvoir exécutif a outrepassé ses prérogatives en nommant le Directeur général de l'Institut Supérieur de la Magistrature, le 1er octobre courant. Elle a annoncé l'ouverture des candidatures pour ce poste. Elle répare ainsi l'oubli enregistré lors du dernier mouvement des magistrats. Concernant les deux membres de l'Instance provisoire de la magistrature démis par le ministre, l'OTIM propose que l'Instance envoie une note au chef du Gouvernement lui demandant de les nommer. Ainsi leur nomination cessera d'être provisoire. Le ministre finira-t-il pas éviter la rupture avec les magistrats et ses différents représentants qui ont tous rejeté ses dernières décisions ?