Avec l'approche de la date des élections, les astuces et stratagèmes ont commencé à prendre une forme flagrante et grossière faisant fi des lois régissant les règles de cette compétition démocratique qui va déterminer l'avenir du pays et de tout un pays. Ces dépassements et cette nonchalance trahissent la morale de leurs auteurs, le degré de leur respect de ce mécanisme électoral et de la démocratie elle-même. Retenir la leçon du passé Comme le sait tout un chacun, l'opération électorale est complexe et très délicate, reposant, essentiellement, sur des structures organisationnelles qui la gèrent dans toutes ses phases, depuis l'inscription jusqu'au vote proprement dit. Ce qui nous importe le plus ici c'est les instances régionales et les bureaux de vote, étant donné que leur composition conditionnera l'ensemble de l'opération électorale, ce qui doit nous amener à bien nous renseigner sur l'identité politique des candidats auprès de ces instances afin que les prochaines élections ne soient pas une copie conforme des précédentes où les partisans du mouvement Ennahdha se sont emparés de la plupart des bureaux de vote en l'absence des partis progressistes et démocratiques. Donc, il n'est plus permis à ceux-ci de négliger, encore une fois, une question d'une extrême importance et de permettre, à nouveau, à ce parti et consorts de s'approprier ces instances et de maîtriser l'opération électorale pour éviter de reproduire le 23 octobre et le système stérile auquel il a donné lieu, qui a étouffé le pays pendant plus de trois ans et qui a entravé le processus révolutionnaire. Et il n'était possible de s'en débarrasser qu'après avoir payé un lourd tribut de sang où le Front populaire, qui a perdu quatre de ses militants, l'armée et les forces de l'ordre ont payé le prix le plus cher et consenti les plus grands sacrifices. Toutes les forces progressistes et démocratiques sont appelées à accorder à la question logistique toute l'importance qu'elle mérite en constituant, s'il le faut, des coordinations entre elles, comme l'ont souligné certains chefs de partis dont, notamment, Samir Taieb qui a exprimé le souhait d'installer une coordination de terrain entre les différentes composantes de ces forces, c'est-à-dire de l'étendre au-delà du cadre de l'UPT (voir notre article du 29 juin 2014). L'étranger, l'antichambre La composition des instances régionales des élections était entourée de grandes suspicions qui ont été exprimées par plusieurs associations de la société civile et partis politiques parmi lesquels le FP qui s'est opposé à celle de Kairouan pour des raisons se rapportant aux compétences et à l'impartialité. Mais malheureusement, bon nombre de ces oppositions n'a pas jouit de l'attention nécessaire de la part de l'ISIE, ce qui a poussé l'Observatoire tunisien pour l'indépendance de la justice à publier un communiqué dans lequel il affirmait qu'il a pris la décision d'intenter sept procès contre cette dernière, l'accusant d'avoir commis des infractions au niveau de la composition des instances régionales des élections, soulignant en même temps, que la publication des listes définitives de ces instances, que ce soit en Tunisie ou à l'étranger, le 16 juin 2014, n'a pas amené, même après l'étude des oppositions, à l'atténuation de la virulence des critiques adressées à l'endroit de certaines de ces instances aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur. Cependant, si celles se trouvant en Tunisie jouissent d'un suivi presque quotidien et rapproché en raison de l'existence des mécanismes permettant la supervision sur le terrain, il en est tout autrement pour celles qui sont installées à l'Etranger où ces mécanismes sont presque inexistants. Cette situation constitue une aubaine pour ceux qui usent des astuces malhonnêtes pour s'emparer des voix, mais heureusement qu'il existe des yeux vigilants qui supervisent leurs agissements et qui les suivent de très près pour mettre à nu et déjouer leurs stratagèmes sournois et ce, en dépit des difficultés de déplacement et de communication. D'ailleurs, l'ISIE aurait misé sur ces écueils et sur l'éloignement qui est une sorte d'isolement pour faire passer des noms douteux dans les listes, croyant que de telles manœuvres passeraient inaperçues, selon les affirmations de certains observateurs. Ces accusations seraient fondées eu égard au fait que plusieurs parties civiles et politiques, comme nous l'avons rapporté plus haut, soulèvent les mêmes griefs, particulièrement le porte-parole du Front populaire, Hamma Hammami, qui a, expressément et ouvertement, reproché à Chafik Sarsar, lors d'une conférence de presse, de servir l'agenda d'Ennahdha (voir notre article du 19 mars 2014). Dans ce cadre et grâce à nos sources, nous avons pu détecter de graves dépassements dans la composition de l'instance régionale d'Italie dont la présidente est la sœur d'une députée d'Ennahdha à l'ANC, et dont deux de ses trois membres appartiennent à ce même parti politique. Le premier était son représentant, lors des élections précédentes dans la circonscription de Bolzano, comme il est l'actuel coordinateur général du centre culturel islamique, qui sera construit sur un terrain acquis à 5 milliards de nos millimes, à Saronno, près de Milan. Quant au second, il est un ex boxeur converti en « nahdhaoui », jadis connu pour certains méfaits. Il vient, tout dernièrement, de retrouver le droit chemin et de rejoindre « le groupe de ceux qui craignent Dieu ». Alors, si trois des quatre membres de l'instance ont une appartenance partisane, peut-on s'attendre à ce que la composition des bureaux de vote soit faite sur des bases objectives et que les élections soient honnêtes, transparentes et libres ? Bien sûr que non ! C'est là où réside le vrai danger, étant donné que plus ces instances régionales sont partisanes, plus le risque de mettre la main sur ces bureaux de vote est grand. Les assurances avancées par l'ISIE ne nous rassurent pas du tout. La consultation de nos consulats dans le choix des membres des bureaux de vote, à l'instar de ce qui s'est passé en 2011, sera stérile, vu qu'en plus des imperfections touchant à la composition de certaines instances, nos représentations consulaires les plus importantes, au niveau du poids électoral des communautés tunisiennes, appartiennent à la défunte Troïka, et en particulier à Ennahdha, et ce en France, en Arabie Saoudite et en Libye. Cette situation exige plus que jamais de procéder, au plus vite, à la révision des nominations partisanes dans le secteur diplomatique, conformément à la feuille de route. Le bureaucratisme de l'ISIE Soucieux de baser notre travail d'investigation sur des considérations objectives, on a tenu à écouter toutes les parties intervenantes dans cette opération électorale. Conformément à cet esprit, nous nous sommes dirigés vers le siège de l'ISIE afin de lui donner l'opportunité de répondre à tous les griefs qui lui sont adressés et de nous donner les réponses qu'on cherchait pour qu'on puisse éclairer l'opinion publique nationale à propos de certaines questions. Conséquemment à ces exigences du métier, on s'est rendu au local central, mardi dernier avant 10h, en vue de rencontrer le président de l'instance, mais on nous a informés qu'il était sorti. On a, alors, demandé de nous entretenir avec soit le membre responsable de la communication, soit avec le porte-parole, mais là aussi, cela n'était pas possible, car ils étaient tous deux en réunion. C'est ce qu'on nous a appris. Nous y avons vu quelque chose de normal, vu l'approche de l'échéance électorale, de la pluralité de leurs activités et des tâches qui leur sont confiés, et nous avons quitté le siège pour y revenir vers 13h. Là, on a trouvé que M le président était de retour et on était satisfait, parce qu'on pensait qu'il allait satisfaire notre demande en nous procurant les informations requises, surtout lorsque le concierge nous a passé le téléphone pour en expliquer le sujet à sa secrétaire. Mais, à notre grande surprise et notre grande déception, on nous a fait savoir qu'on nous contacterait plus tard, ce qu'ils n'ont pas fait jusqu'à la date d'écriture de ces lignes. Nous nous sommes, tout de suite, rappelé la fameuse formule bureaucratique qu'on croyait être partie à jamais « revenez demain ». Désolé monsieur le président- et comme vous êtes nombreux et comme vos glissements et déviations de parcours sont fréquents- on ne demande ni cadeau, ni privilège, mais juste un droit. Le travail journalistique est une tâche quotidienne qui demande la rapidité dans l'information surtout en ce qui concerne les élections, pendant ces jours cruciaux, où chaque heure, voire chaque minute aura son impact sur la suite du processus électoral. Comment le président de la haute instance et ses membres peuvent-ils se comporter de la sorte, alors que la conjoncture ne permet pas l'ajournement et impose une certaine célérité dans l'exécution des tâches afin que les délais prévus par la constitution soient respectés comme ils ne cessent de le rappeler et de le répéter matin et soir ? N'ont-ils pas affirmé que la réussite des élections nécessite la conjugaison de tous les efforts et l'instauration d'une coordination surtout avec les médias pour qu'ils puissent remplir leur devoir en éclairant les citoyens sur tout ce qui se passe autour de cette opération électorale ? D'aucuns diraient qu'on aurait dû prendre un rendez-vous à l'avance, on leur répond qu'on l'a fait lorsqu'il était question d'une interview dans le cadre de notre rubrique « L'invité du dimanche » (voir notre article du 22 mars 2014) où nous avons pris contact avec M le président de l'ISIE quelques jours auparavant pour fixer le jour de l'entretien. Mais la question sur laquelle on voudrait se renseigner, cette fois-ci, est extrêmement importante, vu qu'elle menace de falsifier et de ruiner les élections, ce qui exigeait des réponses rapides, transparentes et sincères. Ce comportement du président de l'ISIE et de ses membres dénote deux choses, soit une nonchalance, soit une absence de réponse convaincante, et dans les deux cas, c'est grave.