L'argent est le maître-mot de l'actualité préélectorale en Tunisie. L'autre jour, après avoir présenté sa candidature à la présidentielle, Mohamed Moncef Marzouki a émis la crainte de voir « l'argent sale » gâcher le processus électoral ! Le lendemain, Adnène Moncer, le meneur de sa campagne, a parlé de l'autofinancement de cette campagne grâce à la vente symbolique du dernier livre de l'actuel président provisoire. Il s'agira en fait de participation substantielle qui excède de loin le prix du livre en librairie. La contribution des acheteurs se fera, paraît-il, par chèques et l'on imagine alors les sommes qu'on peut coucher là-dessus ! C'est du propre, dirait-on ! Reste à savoir qui seront les « clients » potentiels et s'ils paieront le vendeur avec de l'argent gagné proprement ! Il y a lieu par ailleurs de se poser quelques petites questions sur les droits de l'éditeur dans cette opération commerciale inédite et peut-être illicite ! Car à moins d'être stipulée dans un contrat en bonne et due forme, l'affaire ne pourrait pas se conclure au profit du seul auteur. En tout cas, l'opération n'est pas aussi nette qu'on veut le faire entendre dans l'entourage « présidentiel ». Quelques taches résistent encore au premier « lavage », il faudrait peut-être les repasser à la machine ou tout simplement les relaver à la main ! Dans le « coup » ? Cette même semaine, nous avons été très déçus par la participation d'une respectable journaliste à une émission télévisée dont l'invité était un sérieux concurrent dans la course à Carthage. Le candidat en a bien profité pour commencer avant les délais officiels sa campagne électorale. Nous ne pensons pas à ce sujet que la chaîne qui l'accueillait soit neutre dans cette invitation ; mais là c'est l'affaire de la HAICA qui manifestement laisse faire ou tout simplement dort tout son soûl ! Ce qui nous a froissés plus que cela, c'est que la journaliste citée plus haut semblait être « dans le coup » puisqu'elle posait à l'invité des questions ciblées qui allait dans le sens de sa campagne électorale ! Intelligente comme nous l'imaginons, elle ne pouvait pas être la dinde de la farce ! Nous savons aussi que c'est une dame intransigeante lorsqu'il s'agit de pratiques louches dans quelque domaine que ce soit ! Etrange « collaboration », bizarre « collusion » ! Y aurait-il de l'argent là-dessous ? Nul ne peut le confirmer ou l'infirmer ; il faudrait une brigade financière entière, elle-même intègre et incorruptible, pour vérifier les mouvements de ces derniers temps dans les comptes de certains hommes et femmes de la presse écrite, électronique ou audiovisuelle ! Pari risqué Nous croyons savoir, d'un autre côté, que l'un des candidats à la Présidence – un universitaire, nous dit-on- est actuellement en prison pour avoir agressé un fonctionnaire de la justice qui lui aurait refusé son dossier de candidature. D'après notre source, d'habitude fiable, cet enseignant du Supérieur aurait déclaré que la garantie financière à fournir pour se présenter aux élections présidentielles est de nature à opérer une discrimination de classe entre les Tunisiens. Que n'écrit-il pas un livre lui aussi pour le vendre à 400 ou 500 dinars l'exemplaire ! Ou alors qu'il mette en vente sa propre thèse de doctorat et ses autres publications académiques ! Non, les livres des universitaires ne se vendent pas, ils ne sortent que très rarement des bibliothèques des facultés ; il faut être ministre ou président pour que ça se vende mieux ! Ce monsieur comme quelques autres candidats à la présidence sont les « parents pauvres » du scrutin auquel il ne manque que des concurrents parmi les nombreux mendiants de nos villes ! Un proverbe de chez nous, grossier certes, dit qu'il ne faut pas aller à la foire des péteurs sans avoir de bon cul ; en effet, l'actuelle joute électorale engage des fonds d'autant plus considérables que bon nombre de candidats sont de riches hommes d'affaires ou sont soutenus par des Crésus locaux ! Cela s'appelle « avoir du culot » que de fourrer le nez dans cette corporation de nababs alors qu'on est sans-le-sou ! Du culot contre de l'argent ! Sur lequel des deux faut-il parier ? Au plus offrant L'argent coule à flots en ce moment et tout le monde parle d'achats et de ventes politiques ! Pourtant, on nous dit que les caisses du pays sont presque vides ; qu'il faut imposer une taxe de 30 dinars à nos visiteurs étrangers ; qu'il faut aussi retrancher une part des salaires des fonctionnaires pour venir en aide à la Trésorerie générale. Dominique Strauss-Kahn est venu nous donner des conseils pour redresser notre économie entre autres grâce à l'intégration du marché informel dans les circuits du commerce légal. Il nous recommande aussi de trouver de bons alliés financiers, parmi les pays du Maghreb par exemple, et qu'il ne faut pas trop compter sur le FMI. Rached Ghannouchi est rentré de Chine où, déclare-t-il, il est allé chercher des investisseurs capables de résorber partiellement nos problèmes de chômage et de croissance économique ! Pendant ce temps, Ali Lâarayedh, l'ex-chef du gouvernement affirme que la Tunisie peut atteindre un taux de croissance avoisinant les 7 % ! Avec quoi, avec quels moyens et quel argent ? Il faut le lui demander ainsi qu'à tous ceux qui se disent capables, s'ils sont élus, de « sauver » la Tunisie de la banqueroute ! Dieu ! Comme notre pays est généreux en sauveurs qui ne sont prêts à faire profiter le pays de leurs pouvoirs miraculeux qu'à condition d'être élus ! Conditions pour conditions, on comprend alors pourquoi certains électeurs marchandent leurs voix ! Et c'est au plus offrant !