Les agents du secteur de la Santé publique ont entamé, hier une grève de deux jours en signe de protestation contre la détérioration de leur situation matérielle et une politique de «démantèlement» du secteur public de la santé. L'ensemble des employés exerçant dans les établissements publics de santé à l'exception des médecins répondaient ainsi à un mot d'ordre de grève lancé par la fédération générale de la santé relevant de l'Union générale tunisienne de travail (UGTT). Selon des sources syndicales, ce débrayage a été bien suivi. «Durant la première journée, le taux de participation à la grève a atteint 82% à l'échelle nationale, bien qu'un service minimum ait été assuré en ce qui concerne les soins urgents dans toutes les régions du pays», souligne Othman Jallouli, secrétaire général de la fédération générale de la santé. «Malheureusement, nous n'avons pas pu éviter le recours à la grève vu que des réunions de conciliation tenues mardi et mercredi avec des représentants du ministère de tutelle n'ont pas abouti à un accord», a-t-il ajouté. Devant certains établissements de santé, dont l'hôpital Charles-Nicolle à Tunis, des altercations se sont produites hier entre des agents grévistes et des citoyens venus se faire soigner. Dans ce cadre, des patients affirment avoir été agressés à l'entrée de certains hôpitaux par des agents grévistes. Ces accusations ont été, cependant, rejetées par les syndicalistes. La fédération générale de la santé, qui avait déjà organisé des débrayages les 28 et 29 avril ainsi que du 20 au 22 mai, réclame notamment l'augmentation du budget du ministère de la Santé publique afin d'assurer le lancement du chantier de la mise à niveau du secteur à travers l'amélioration des équipements et des capacités financières des établissements, l'affectation de plus de médecins spécialistes dans hôpitaux, l'arrêt de la formation privée des professions paramédicales (les aides-soignants, les ambulanciers, les brancardiers...), laquelle «ne respecterait pas la loi et les critères de formation», et la reconnaissance de la pénibilité de la profession. Haro sur la privatisation du secteur de la santé La fédération revendique aussi la rémunération du travail pendant les dimanches et les fêtes religieuses ainsi que l'octroi d'une prime de transport au personnel soignant et l'ouverture de perspectives d'avancement professionnel aux diverses catégories d'employés. Elle dénonce, par ailleurs, la «privatisation à marche forcée» du secteur public. «Naguère fleuron du système de soins tunisien, l'hôpital public a perdu de plus en plus son rôle de référence en matière de formation et de soins vu que les gouvernements successifs semblent encourager le démantèlement méthodique du secteur de la santé public», affirme M. Jallouli, déplorant notamment un manque d'équipements et de médicaments et une pénurie de médecins spécialistes dans les régions intérieures du pays. Le responsable syndical a également expliqué que les grèves et autres mouvements de protestation qu'organise la fédération serviront en premier lieu les intérêts des populations, et plus particulièrement ceux des couches sociales démunies et des classes moyennes, puisqu'ils visent en premier lieu à sauver l'hôpital public. Du côté ministère de la Santé publique, déplore le recours à la grève malgré des «avancées» dans le dialogue avec la partie syndicale. «Une réunion tenue mardi 9 mai avec des représentants de la fédération générale de la santé s'est soldée par la satisfaction d'un certain nombre de revendications syndicales, en plus d'une proposition d'examiner d'autres revendications dans le cadre du nouveau round des négociations sociales au titre des années 2015-2016 », a précisé le ministère dans un communiqué. Et d'ajouter : «Le ministère a aussi informé les représentants de la partie syndicale qu'un projet de loi relatif à l'amendement de l'article 2 de la loi sur la fonction publique a été soumis aux commissions parlementaires ad hoc, mais la fédération générale de la santé s'est attachée à l'octroi aux agents de promotions exceptionnelles ayant des répercussions financières importantes». Tout en réaffirmant sa prédisposition au dialogue pour résoudre les questions en suspens, le ministère a appelé au respect de la liberté du travail dans les établissements publics de santé.