Nombreux sont ceux qui parlent, aux lendemains des différents attentats terroristes survenus au cours de ces dernières années en Tunisie, de l'implication de la Troïka en général et d'Ennahdha en particulier, directement ou par laxisme, dans l'expansion du terrorisme dans le pays. Généralement, ces propos proviennent de la part des dirigeants du Front populaire qui ne ratent aucune occasion pour rappeler que les deux assassinats politiques survenus en Tunisie – celui de Chokri Belaïd et de Mohamed Brahmi – ont été perpétrés à l'époque où Ennahdha régnait. Suite à l'attaque avortée dans la ville de Ben Guerdane, les dirigeants de la gauche n'ont pas hésité à remettre leurs accusations sur le tapis. Mongi Rahoui, Ammar Amroussia ou encore Zied Lakhdar se sont dépêchés de saisir cette opportunité afin de réclamer la tenue d'un congrès national pour la lutte contre le terrorisme. La réponse n'a pas tardé à venir du côté du mouvement islamiste ; Mehrezia Laâbidi, députée d'Ennahdha à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP), a déclaré que son parti serait d'accord pour la tenue d'un tel congrès à condition que ses participants ne l'exploitent pas pour étaler des idées et des accusations toutes faites et sans aucun fondement. De son côté, Houcine Jaziri a expliqué, dans un long discours, que la priorité est à l'union nationale et non pas aux redditions de comptes. La réponse la plus agressive nous est parvenue de la part de Noureddine Bhiri, député et ancien ministre de la Justice, qui a affirmé que ceux qui portent des accusations contre Ennahdha visent, en réalité, l'union nationale et préparent, du coup, le terrain à l'entrée des terroristes de Daech au pays. Des déclarations surréalistes qui, signalons-le, ne comprennent aucun rejet des accusations en question ! Connu pour son côté diplomate, Samir Dilou a préféré enchaîner dans une autre logique en rappelant que les premiers incidents relatifs à l'extrémisme se sont déroulés bien avant l'avènement d'Ennahdha au pouvoir. L'ancien ministre de la Justice transitionnelle a rappelé que les événements de l'Africa – quand des extrémistes se sont attaqués à une exposition artistique – sont survenus au cours de l'année 2011. Et d'ajouter que certains de ceux qui accusent le mouvement d'être impliqué dans le terrorisme sont malintentionnés et qu'ils instrumentalisent le terrorisme à des fins politiques. Au lendemain des élections de 2014, les dirigeants d'Ennahdha ont opté pour un nouveau discours loin de celui auquel ils nous ont habitués au cours des années 2012 et 2013 : avec l'éloignement de Sadok Chourou et d'Habib Ellouze, les Nahdhaouis ne sont plus dans l'hostilité face à leurs adversaires (comme ils l'ont été face à Nidaa Tounes avant qu'ils ne deviennent alliés). Mieux encore, Ennahdha, comme ne cesse de le démontrer, notamment, son chef Rached Ghannouchi, tente de muter vers un parti qui serait totalement civil et loin de toute idéologie. Plusieurs parties ont exprimé, toutefois, leur manque de confiance de voir une telle métamorphose se réaliser et, avec le retour du discours hostile lors de ces derniers jours, l'impression risque de ne pas changer.