Les crédits bancaires aux ménages ont toujours constitué une question épineuse, parfois taboue en Tunisie. Les avis divergent autour de cet élément : certains voient que le tunisien est très endetté et a atteint un seuil alarmant, d'autres voient que le taux d'endettement du tunisien est normal en comparaison avec des pays développés, et que les crédits aux ménages améliorent le niveau de vie et dynamise l'économie. Dans cette querelle et débat économique, le tunisien mène sa vie tranquillement, optant pour les différents types de crédits, tant que son revenu lui permet et même plus. Dans le cadre de la crise économique actuelle, plusieurs mesures ont été prises pour assurer la dynamisation de la demande intérieure et parmi eux la facilitation de l'accès aux crédits pour les particuliers. Quel est le niveau des crédits accordés aux particuliers jusqu'à 2008, et comment ils sont répartis ? Une répartition dominée par les crédits logements : Les crédits accordés aux particuliers sont un bon moyen d'encourager la demande intérieure du tunisien et augmenter sa consommation pour améliorer son niveau de vie et les ratios de son bien être. Il faut dire que le tunisien a toujours eu recours aux crédits et d'une manière acharnée, pour couvrir des besoins essentiels et parfois des besoins de luxe (voyage, une deuxième voiture, rénover les meubles de la maison,…). Depuis Décembre 2003, jusqu'à décembre 2008, l'encours des crédits accordés aux particuliers a augmenté de 137%, passant de 3073 millions de dinars à 7294.5 millions de dinars en 2008. La répartition des crédits aux ménages n'a pas changé depuis des années avec la prédominance des crédits logement. En effet, ces crédits ont représenté 46% de l'encours total des crédits atteignant 4995 millions de dinars. Ceci n'est pas étonnant, puisque les statistiques montrent que 80% des tunisiens ont leur propre logement, un indicateur qui dépasse de loin les principaux pays développés. Les mesures prises récemment par le président de la république pour stimuler les crédits logements vont avoir un effet positif à ce niveau. En effet, au cours du mois de février dernier, le président a ordonné la baisse d'un point du taux d'intérêt des crédits logement de la banque d'Habitat à partir du 1er Mars, pour les 5 types d'épargne logement, et les 3 catégories du FOPROLOS (1, 2, et 3). Vendredi dernier, et au cours d'une audience avec le gouverneur de la Banque Centrale, le Président a aussi ordonné la baisse de 1% du taux d'intérêt sur le nouveau crédit logement pour passer de 8 à 7%, et les crédits directs de 8.5% à 7.5%. La deuxième rubrique de dépense des crédits pour les tunisiens est les crédits à la consommation. Ils sont passés de 904 MD en 2003 à 2037 MD en 2008, soit une évolution de 125%. En 3ème position on retrouve les crédits pour les véhicules. Le taux de « voiturisation »pour les tunisiens a nettement augmenté ces dix dernières années, et le parc automobile est en train de s'agrandir d'une manière vertigineuse. L'encours des crédits véhicules est passé de 77 MD en 2003 à 261 MD en 2008 soit une évolution de 239%. Les prêts universitaires, qui représentent un outil important pour les étudiants pour leur assurer les bonnes conditions de scolarité, ont présenté en 2008, un encours de 897 MD. L'encours de ces types de crédits était de 174 MD en 2003.
Répartition des crédits non professionnels accordés aux particuliers par le secteur bancaire
En Million de dinars
Logement Véhicules Prêts universitaires Crédits à la consommation Total Décembre 2003 2090 77.3 174 904.8 3073 Décembre 2008 4994.8 261.2 897 2037.5 7294.5 Source : BCT
Les autres sources de crédits : Les chiffres présentés ci-dessous ne concernent que le secteur bancaire. Or il existe d'autres sources formelles pour les crédits aux ménages qui sont la CNSS et la CNRPS. Ces deux organismes ont accordé 120 millions de dinars en 2007, pour couvrir des crédits logements, véhicules, personnels, et universitaires. Malgré les difficultés pour obtenir des crédits auprès de ces deux institutions, et malgré les problèmes financiers qui sont en train de vivre ; ils continuent encore d'augmenter l'encours des crédits accordés aux adhérents. L'aspect social est toujours présent dans la politique de ces deux organismes. D'autres sources sont aussi à prendre en considération et dont les chiffres ne sont pas malheureusement publics, sont les vendeurs par facilité. En effet, plusieurs magasins et enseignes d'électroménager, d'outils informatiques, ou de mobilier accordent des facilités de crédits pour les consommateurs, sans retrouver leurs traces dans les statistiques. Malgré une obligation d'informer la centrale des risques de ces crédits accordés, certains passent outre pour différentes raisons (fiscales surtout).
Ordre de grandeurs : Plusieurs études et statistiques ont été publiées au cours des dernières années concernant le taux d'endettement des ménages tunisiens, mais d'aucune n'a réussi à établir avec exactitude la réalité des choses, et surtout devant un silence étrange des organes statistiques officiels. Certains ordres de grandeur peuvent être calculés sur la base des chiffres officiels disponibles : La part personnelle de l'encours des crédits accordés par le secteur bancaire est de 2364 dinars par personne active (nombre des personnes actives selon l'INS : 3.085.000). D'un autre côté l'encours de ces crédits bancaires accordés aux particuliers représente 15% du PIB national en 2008, ce qui n'est pas un taux important en comparaison avec des pays comme le Canada, la France ou les Etats-Unis. En comparaison avec les crédits accordés aux entreprises par le secteur bancaire, l'encours des crédits accordés aux particuliers représente 28.6%. Nous attendons toujours les résultats de l'étude ordonnée par le président de la république concernant l'état des lieux sur l'endettement des ménages, ainsi qu'un suivi continue de ce paramètre qui revêt un côté social et économique à la fois. Dans un environnement ou la recherche de l'équilibre est importante, les décideurs ont beaucoup plus besoin d'informations fiables et actualisées.