Si la Tunisie a pu gérer d'une manière efficace le dossier complexe de l'emploi, placé dans la vision sage et clairvoyante du Chef de l'Etat au rang de priorité des priorités nationales, c'est dans une large mesure grâce aux mécanismes d'incitation et d'encouragement à l'emploi prévus par les pouvoirs publics et conçus pour répondre, en même temps, aux intérêts des employés et des employeurs. Les statistiques démontrent aujourd'hui l'importance du nombre des bénéficiaires des ces différents mécanismes, à tel point que l'on n'hésite pas à les qualifier de pilier de la politique d'emploi des jeunes diplômés dans notre pays.
Mais loin de toutes prétentions de perfectionnisme, l'expérience devrait être évaluée objectivement, tout en prenant en ligne de compte les points de vue et les attentes des bénéficiaires. En leur qualité d'employeurs, les entreprises tunisiennes devraient ainsi être écoutées et autorisées à avancer leurs suggestions.
En effet, dans une telle démarche, on doit, d'abord, dégager une satisfaction remarquable quant au fonctionnement de la formule « Stage d'insertion à la vie professionnelle » (S.I.V.P), équivalent, en quelque sorte, à un contrat de première embauche. En vertu de ce mécanisme, l'employeur verse à l'employé un salaire convenu entre eux, alors que l'Etat s'engage à effectuer un virement mensuel de 107 DT au profit des maîtrisards et de 160 DT pour les ingénieurs. L'employeur n'est pas tenu, dans ce cas, de payer aucune cotisation sociale et aucun impôt (retenu à la source, impôt sur les revenus).
Toutefois, la satisfaction est sensiblement moindre en ce qui concerne le contrat à durée déterminée conclu selon la formule dite « 50%-50% ». Conformément à ce mécanisme, l'employeur s'engage à payer la totalité du salaire de son employé et récupérer par la suite la moitié du montant payé, avec un plafond de 250 DT. C'est justement la récupération de cette contribution étatique qui pose, jusque là, le plus de problèmes. En pratique, celle-ci nécessite deux et même trois mois parfois, après le virement de la totalité des salaires aux employés par l'employeur, avec des procédures complexes en plus. Par voie de conséquence, le cumul des non payés ne peut qu'avoir un impact négatif sur la trésorerie des entreprises tunisiennes, pour la plupart des micro-entreprises et des PMEs.
D'autre part, et contrairement à la formule S.I.V.P, l'employeur se trouve assujetti à l'impôt et obligé de s'acquitter des cotisations sociales. Pour ce dernier volet précisément, l'obligation est doublée d'un régime spécial qui combine parfaitement lourdeur et complexité.
Face à une telle situation, l'on juge utile d'avancer cette suggestion : tant que le mécanisme S.I.V.P a donné satisfaction, pourquoi ne pas aligner le régime des CDD, formule « 50%-50% » sur celui du premier mécanisme ? Ainsi, il y aurait une exonération des charges sociales et fiscales au même titre. Dans ce cas, la contribution de l'Etat serait également versée d'une manière directe à l'employé bénéficiaire. Cela est à même de dissoudre les mécontentements actuels d'autant plus que le contrôle pourrait être effectué par des moyens divers. A titre d'exemple, l'employeur serait tenu de présenter, à chaque fin du mois, un état actualisé de l'ensemble des salaires accordés dans le cadre de ce mécanisme, accompagné d'une déclaration sur l'honneur quant à la véracité des données fournies. Doit-on aussi rappeler que les structures veillant sur l'emploi disposent, dans tous les cas, d'autres prérogatives et moyens de contrôle, notamment à travers l'inspection de travail. Le contrôle par le commissaire au compte constitue également une garantie de plus, en ce qui concerne les sociétés légalement tenues d'en nommer un.
A la lumière de ce qui précède, il semble que la prudence manifestée est, en quelque sorte, exagérée. Au contraire, la confiance mutuelle, entre toutes les parties impliquées dans les efforts d'emploi dans notre pays, est, elle-même, à notre avis, un facteur très favorable à la stimulation et à la création d'emploi.