La nouvelle du jour, ce vendredi 14 juin, a été sans contestation aucune, la prise de position, courageuse, du président provisoire de la république Moncef Marzouki qui, après avoir reçu à Carthage des experts en droit constitutionnel, suivis d'une délégation de députés mécontents contre le projet de constitution élaboré par et pour Ennahdha, a déclaré qu'il allait s'abstenir de promulguer ledit texte dans sa copie actuelle. C'est qu'il a, de tout temps, été d'un courage exceptionnel, notre président, bien que provisoire ! Et son courage l'avait mené, comme il se plait à le répéter, dans les affres des geôles de Ben Ali, et dans la misère de l'exil en terre « hostile ». Et encore une fois, Moncef Marzouki, fait preuve d'un courage exemplaire en laissant de côté ses propres intérêts et ses convictions d'allié de choix d'ennahdha, pour oser se lever, lui faire face et lui dire tout haut : « Non ! Il n'est pas d'accord sur ce grotesque projet de constituante. Non, il n'est pas prêt à jouer la marionnette, car il y va de l'intérêt suprême du pays. Non, il ne signera pas ! Non, il ne signera pas. Non, il ne signera pas » ! Il a, apparemment, ainsi voulu passer, en cette période pré-électorale, un message clair aux potentiels électeurs, dans le sens qu'il combattra jusqu'au bout ce projet de constitution, et qu'il bataillera jusqu'au dernier effort pour l'intérêt de citoyen et de l'Etat civil démocratique. Sauf qu'avec ses ex-coéquipiers du CpR, on n'est jamais à l'abri d'une quelconque surprise et encore moins, d'un quelconque dérapage de communication. C'est qu'ils sont réglés et coordonnés comme des horloges suisses, les patrons du CpR ! Il a donc fallu que le secrétaire général du CpR, Imed Daïmi, trouve intelligent d'en rajouter, histoire de surfer lui aussi sur la vague levée par son ex-patron. Et en croyant bien faire, Imed Daïmi a tout balancé. Il a divulgué les véritables raisons du revirement dans la position de Marzouki, qui sont très loin d'être l'intérêt du pays ni celui du citoyen. Inconsciemment, Daïmi a révélé que Marzouki était ulcéré par le nouveau jeu d'alliances qui se profile pour la période qui suivra les prochaines élections. Il est ulcéré car il avait bien compris, qu'il n'avait plus sa place dans ce jeu d'alliance. Il est ulcéré par ces chefs de partis qui se précipitent pour plaire aux décideurs d'Ennahdha, histoire de lui chiper son fauteuil si chèrement acquis, au prix d'incalculables sacrifices, entamant sérieusement l'image qu'il s'était efforcé de se forger des décennies durant. Et ce jeu, Marzouki n'a pas attendu cette occasion pour l'annoncer, puisqu'il l'a déjà entamé depuis un certain temps, avec notamment, les prises de bec entre son fidèle Amor Chetoui et les élus d'Ennahdha, histoire d'annoncer qu'il était mécontent et qu'il allait tout chambarder, si on ne cherchait pas à le solliciter de nouveau. Imed Daïmi, a si bien crié que tous ceux qui étaient d'accord avec le projet de constitution, l'étaient uniquement pour rentrer dans le nouveau jeu d'alliance post électorale, qu'il a laissé comprendre qu'eux, au CpR, n'étaient pas d'accord justement parce qu'ils se sentaient éjectés de ce jeu. C'est qu'il n'a pas tout à fait tort, Imed Daïmi, en annonçant cela, car rien ne pourrait expliquer le revirement de certains chefs de partis avec leurs inattendues et subites louanges pour le projet de constitution, en dehors d'éventuels accords secrets pour une éventuelle nouvelle coalition. Mais ces chefs de partis semblent n'avoir rien retenu comme leçon, dans la mesure où Ennahdha excelle dans le jeu de retournement de veste et de reniement de ses accords, comme dans celui de jeter ses collaborateurs tels de vilains citrons après les avoir pressés à fond.