A défaut d'un compromis de dernière minute, une grève, décrétée par le syndicat de base, est prévue, aujourd'hui 8 Novembre 2013, au Ministère des Affaires Etrangères, ce qui constituera, le cas échéant, une première dans les annales de ce Département. Un département sinistré à plus d'un titre. Le recours des cadres et agents de ce ministère à l'arme extrême de la grève traduit le climat de tension et de ras-le-bol ainsi que le chaos professionnel et social ambiant, l'absence d'une logique de dialogue et le manque de répondant de la part de l'Administration qui ne cesse d'user de manœuvres dilatoires et de faux-fuyants, ce qui a pourri un peu plus la situation. L'accumulation des problèmes, des préjudices de carrière et des iniquités, sans qu'une réelle volonté de les résoudre ne soit affichée, ont abouti à cette situation de confrontation et de rupture. La grève n'est pas une fin en soi, derrière cette décision se faufilent des messages directs et significatifs notamment à l'adresse du nouveau gouvernement. Par ce geste chargé de symbole et de dépit, le personnel diplomatique et administratif du Ministère des Affaires Etrangères dit, haut et fort, est acculé à se prévaloir de ce droit pour faire valoir ses revendications. En premier lieu, l'impératif de reconsidérer les nominations aux postes diplomatiques et consulaires, effectuées sur une base politique et partisane, dans une logique de butin, et non selon les critères objectifs de compétence et de mérite. Plus que jamais, il est temps de couper avec la politisation de la diplomatie, d'articuler le système de désignation autour des valeurs de transparence et d'impartialité et consacrer définitivement le principe de la neutralité de l'administration. Faute d'assainir le climat professionnel et social, de régler une fois pour toute les contentieux (processus professionnels, sanctions abusives,....) et de dépolitiser complètement l'appareil diplomatique, la grogne risque de s'amplifier au sein du Ministère des Affaires Etrangères. La grève n'est qu'un moyen d'avertissement, d'autres mesures de contestation, encore plus féroces, restent envisageables. Tout le corps diplomatique est unanime que le ministre en exercice, Othman Jerandi, pourtant enfant de la boite et connaisseur averti de tous ses arcanes, a lamentablement failli dans sa tâche et échoué dans sa mission. Les grands espoirs que sa nomination a soulevés n'ont donné lieu qu'à un fouillis de désillusions et de frustrations. Il n'a pas su ou pu ou voulu s'imposer ni dans son département ni dans son gouvernement. Depuis son investiture, le Département a été sous haute tension, beaucoup plus qu'auparavant, compte tenu justement des attentes que son intronisation a suscitées. En un mot, attendu comme un messie, Othman Jerandi s'est révélé décevant. Il a beaucoup plus usé d'écrans de fumée que fait valoir des actions stratégiques. Sa force d'inertie n'a d'égal que son déficit de communication. La fuite en avant comme modèle de gouvernance et le silence comme posture de gestion. A sa venue, le Ministère des Affaires Etrangères était à la croisée des chemins, maintenant ce Département est carrément en voie de garage, dévoré tout cru par le pouvoir exécutif, la présidence notamment dont les vautours et les prédateurs n'en lâchent pas une miette. Les cadres et agents de ce ministère n'attendent plus rien, sauf qu'Othman Jerandi dégage le plancher et l'enceinte. Le paradoxe est saisissant.