David Cameron, en butte à une crise qui pourrait se révéler déterminante pour lui, a déclaré jeudi que les émeutiers responsables des violences les plus graves depuis plusieurs en décennies en Grande-Bretagne seraient poursuivis et punis. “La riposte a bel et bien commencé”, a dit le Premier ministre aux Communes lors d'une séance extraordinaire du Parlement, tout en reconnaissant que les effectifs et les tactiques de la police avaient été insuffisants au début des troubles qui ont embrasé Londres avant de gagner d'autres grandes villes du pays. “A la minorité sans foi ni loi, aux criminels qui ont fait main basse sur tout ce qu'ils trouvaient, je dis ceci: nous vous traquerons, nous vous trouverons, nous vous inculperons et nous vous punirons. Vous paierez pour ce que vous avez fait.” La police du centre de Londres a déclaré jeudi avoir arrêté trois jeunes de 16, 17 et 26 ans qu'elle soupçonne d'être impliqués dans la mort de trois hommes mercredi à Birmingham. Ces derniers ont été fauchés par une voiture alors qu'ils tentaient de protéger un quartier de la ville. Des pressions s'exercent sur le dirigeant conservateur pour qu'il assouplisse son programme d'austérité et durcisse l'action de la police mais prenne aussi des mesures en faveur des communautés défavorisées devant les problèmes sociaux, voire les tensions raciales, qui ont explosé en quatre nuits de chaos, de destructions et de pillages. David Cameron a fait savoir qu'il maintiendrait durant le week-end à Londres l'effectif de 16.000 policiers qui vient d'être augmenté et qu'il envisagerait de faire appel à l'armée à l'avenir pour seconder la police et lui donner une plus grande marge de manoeuvre face aux fauteurs de troubles. “Culture de violence” Il compte aussi donner mandat à la police pour exiger des personnes masquées soupçonnées de délits ou de crimes qu'elles dévoilent leur visage, et il s'est engagé à réprimer les “gangs de rue” pour remédier aux maux d'une “société brisée”. “Le Gouvernement a pour responsabilité de veiller à ce que l'on pare à toute éventualité future, et notamment à ce que l'on étudie les tâches que l'armée pourrait assumer afin d'affecter plus de policiers à la première ligne”, a ajouté le Premier ministre à la Chambre des communes. David Cameron, qui a déjà autorisé la police à faire usage de balles en plastique et de canons à eau en cas de besoin, a exprimé l'intention d'étudier des moyens de réduire l'utilisation des réseaux sociaux sur internet lorsqu'ils sont mis au service de “la violence, du désordre et de la criminalité”. “Il ne s'agit pas de pauvreté, c'est une question de culture. Une culture qui glorifie la violence, manque de respect aux autorités et dit tout ce qu'on peut dire des droits mais rien des responsabilités”, a-t-il dit. Le Premier ministre a promis des indemnités aux habitants dont les foyers ou les boutiques ont été endommagés ou détruits au cours des émeutes qui ont débuté samedi dans le nord de Londres après la mort d'un Afro-Antillais, Mark Duggan, abattu lors d'une opération de police aux circonstances mal élucidées. L'Association des assureurs britanniques a estimé les dégâts commis à plus de 200 millions de livres. Le ministre des Finances, George Osbone, doit aussi s'adresser au Parlement afin de rétablir la confiance dans l'économie du pays et la ville de Londres, l'une des capitales financières du monde qui doit accueillir les Jeux olympiques 2012. Plus de 1 200 arrestations A l'heure où l'opinion britannique rumine sa fureur après des pillages dont l'ampleur en laisse beaucoup incrédules, David Cameron a qualifié les émeutiers de criminels opportunistes et a nié tout lien entre leurs actes et ses mesures d'austérité. “Tout le pays a été choqué par les scènes de pillage, de violence, de vandalisme et de vol les plus écoeurantes qui soient. ll s'agit de criminalité pure et simple, et il n'y a pas la moindre excuse pour cela”, a-t-il déclaré aux députés. “Nous ne nous en accommoderons pas dans notre pays. Nous ne laisserons pas s'installer dans nos rues une culture de la peur. Et nous ferons tout ce qu'il faudra pour rétablir l'ordre et reconstruire nos communautés”, a poursuivi David Cameron. Il a promis que les autorités traqueraient sans faiblesse les pilleurs et les semeurs de troubles. Plus de 1 200 arrestations ont eu lieu en Angleterre et les tribunaux travaillent sans relâche pour juger des personnes interpellées pendant les émeutes. David Cameron a dit que des gangs de rue étaient au coeur des violences. “Territoriaux, hiérarchisés et incroyablement violents, ils sont le plus souvent composés de jeunes garçons venant pour la plupart de foyers dysfonctionnels”, a-t-il dit. La lutte coordonnée de la police, des responsables municipaux et des volontaires locaux contre ces gangs doit être “une priorité nationale”, a-t-il ajouté. Bien que le Premier ministre ait rejeté les liens entre sa politique économique et les derniers événements, des dirigeants communautaires estiment, comme l'opposition travailliste, que les inégalités, la réduction des services publics et le chômage des jeunes ont alimenté les violences à Londres, Birmingham, Manchester et ailleurs. Alors qu'est en cours le nettoyage des quartiers affectés, le gouvernement de coalition conservateur-libéral démocrate doit trouver des remèdes rapides pour prévenir de nouveaux incidents tout en recherchant des solutions à long terme. Le déploiement de renforts de police, et souvent une forte pluie, on contribué à apaiser l'atmosphère mercredi soir, mais les incidents souvent incontrôlés des nuits précédentes ont mis les autorités dans l'embarras et épuisé les services de secours. Habitants et commerçants ont entrepris de s'unir pour protéger leurs quartiers et, dans certaines zones, la police se plaint de ce que des milices improvisées compliquent sa tâche.