LE BARDO, 2 juin 2010 (TAP) - "La propriété foncière en Tunisie" est le thème de la 29e journée d'étude organisée, mercredi matin, par la Chambre des députés, en présence d'un grand nombre de députés, de conseillers, d'universitaires et d'avocats spécialistes en droit foncier. Quatre communications ont été données au cours de cette manifestation qui a comporté deux séances de travail. la première sur "l'évolution de la politique foncière en Tunisie" et la deuxième sur "le système de la propriété foncière". M. Sahbi Karoui, premier vice-président de la Chambre des députés, a souligné, dans l'allocution d'ouverture qu'il a prononcée au nom de M. Foued Mebazaa, président de la Chambre, que la Constitution Tunisienne garantit le droit de la propriété privée, eu égard à sa contribution à la dynamique de développement dans le pays, à travers l'impulsion de l'investissement et la garantie des transactions financières. Il a rappelé l'initiative de l'Etat tunisien, au lendemain de l'indépendance, d'introduire les propriétés immobilières dans le circuit économique, en annulant le système des habous publics en mai 1956 et des habous privés en juillet 1957, et en nationalisant, en 1964, les terres agricoles. Il a mis en exergue la politique judicieuse adoptée par le Président Zine El Abidine Ben Ali dans le domaine foncier, politique fondée sur une approche progressive et graduelle dans le traitement des différents dossiers. Il a , dans ce cadre, rappelé que le Président Ben Ali a décidé une série de réformes profondes en faveur du secteur, portant essentiellement sur la réforme législative du registre foncier, l'actualisation des titres fonciers gelés et une meilleure gestion des terres domaniales agricoles. Ces réformes ont, également, permis de réviser la législation relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique, ce qui a eu des retombées positives sur le développement des activités du registre foncier concernant l'immatriculation foncière et l'actualisation des titres. Deux communications ont été présentées au cours de la première séance scientifique. La première, présentée par M. Kamel Charfeddine, professeur à la faculté de droit et des sciences politiques de Tunis, a porté sur "le droit de propriété dans la législation tunisienne". Le conférencier a mis en relief le souci du législateur tunisien, au lendemain de l'indépendance, de mettre en place un nouveau système de propriété foncière. Ce système a permis de traiter les situations foncières complexes héritées de la colonisation, d'inscrire le droit de la propriété privée dans le texte de la Constitution, de fixer les procédures de l'immatriculation foncière, en plus de la nationalisation des terres agricoles, l'annulation des habous et la transformation des terres des "arouchs" (terres tribales) en terres collectives. Il a, en outre, souligné que le système de propriété foncière est entré dans une nouvelle phase depuis l'avènement du Changement, à la faveur de l'institution d'une législation qui a permis notamment d'actualiser les titres fonciers, d'offrir de nouvelles garanties aux propriétaires de biens immobiliers et d'amender la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique (2003). Le nouveau système foncier, qui comporte également de nombreuses mesures destinées à protéger les terres agricoles, a institué le principe de non cession des terres domaniales à vocation agricole, organisé le régime de la communauté des biens entre conjoints et introduit des dispositions particulières pour le logement des enfants sous tutelle. M. Charfeddine a, également, souligné que la création d'un Conseil Constitutionnel, après 1987, est venue apporter une garantie supplémentaire au respect du droit de propriété foncière. Dans une communication sur «l'actualisation des titres fonciers», M. Mohamed Moncef Ezzine, président du tribunal immobilier, a souligné que le législateur tunisien s'est attaché à actualiser les titres fonciers gelés, à travers la promulgation de loi n°39 de l'année 1992 en vertu de laquelle l'actualisation des titres fonciers a été confiée en premier lieu à des commissions régionales et en second lieu au tribunal immobilier. Il a mis l'accent, à cet égard, sur l'importance de la loi n°34 de l'année 2001 en termes de révision et de modernisation de la politique d'actualisation des titres, passant en revue les procédures y afférentes. La deuxième séance a été marquée par deux communications. La première, présentée par M. Habib Chatti, avocat près la cour de cassation, est intitulée «la propriété des terres agricoles ». Le conférencier a rappelé que ces terres appartenaient, avant le protectorat, aux habitants, à l'Etat et à certains étrangers en vertu du pacte fondamental, ou étaient soumises aux régime des habous des Arouch (Terres tribales). Le régime du protectorat, a-t-il ajouté, a encouragé les français à s'installer en Tunisie et à acquérir des terres en vertu de la loi du 1er juillet 1885. Après l'Indépendance, a-t-il poursuivi, la Tunisie a choisi d'organiser la propriété des terres agricoles selon trois régimes juridiques différents. La deuxième conférence, donnée par M. Hatem Rouatbi, professeur à l'Université de Droit et des sciences économiques et politiques de Sousse, a porté sur «la propriété des terres non agricoles». Les terres non agricoles, a précisé le conférencier, relèvent du domaine urbain et appartiennent aux particuliers ou au domaine de l'Etat. Elles jouent un rôle important dans le domaine du développement. L'importance de ce rôle, a-t-il expliqué, se reflète à travers les législations les régissant dont notamment le code des droits réels, le code des obligations et des contrats, le code de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme et le code des incitations à l'investissement, outre les autres législations relatives à l'organisation des agences foncières et à l'expropriation pour cause d'utilité publique. La propriété des terres non agricoles a indiqué le conférencier, revêt une dimension individuelle qui garantit le droit à la propriété et une dimension sociale qui garantit l'exercice de ce droit conformément à la loi et aux textes juridiques se rapportant à l'intérêt général et aux intérêts privés. Ces terres, a-t-il précisé, ne constituent pas, en effet, uniquement une source de profit pour leurs propriétaires. Elles sont aussi au service de la collectivité nationale, à travers l'institution d'un droit de l'Etat à contrôler la propriété privée et à organiser ses modes d'exploitation.