TUNIS, 25 mars 2011 (TAP) - L'instance nationale pour la réforme du secteur de l'information et de la communication, réunie, vendredi, à Tunis, s'est penchée sur l'examen du nouveau projet du code de la presse dont l'élaboration a été confiée à une sous-commission relevant de l'Instance supérieure pour la réalisation des objectifs de la révolution, la réforme politique et la transition démocratique. S'exprimant devant un parterre de journalistes et de juristes, M. Kamel Laabidi, président de cette instance, a indiqué que le nouveau projet du code de la presse a été élaboré sans consultation préalable des professionnels du secteur, ce qui explique son caractère répressif, faisant remarquer que les sanctions prévues par ce nouveau code excèdent, dans certaines dispositions, celles de l'actuel code de la presse. Il a, dans ce contexte, souligné l'impérieuse nécessité pour la famille médiatique d'élaborer et de présenter urgemment un projet de loi, avant que le gouvernement provisoire n'approuve le projet proposé par la sous-commission de l'Instance supérieure pour la réalisation des objectifs de la révolution qui, selon lui, "consacre la restriction des libertés", s'interrogeant, à ce propos, sur l'utilité de s'inspirer du modèle français dans ce domaine. Si les professionnels du secteur n'agissent pas avec le concours des composantes de la société civile et des défenseurs de la liberté d'expression pour élaborer un code de la presse moderne qui consacre le droit du journaliste à l'information et lui permet d'accéder, facilement, à la source d'information, a-t-il affirmé, la presse tunisienne sera vouée à la régression et les journalistes seront sanctionnés pour leurs écrits et leurs positions. Pour le président du Syndicat des journalistes tunisiens (SNJT), M. Néji Bghouri, le nouveau code de la presse doit apporter des garanties législatives et juridiques qui consacrent l'indépendance du journaliste et des médias. A la place du code de la presse, a-t-il indiqué, la profession journalistique a besoin d'un cahier des charges, d'un guide pour l'édition de journaux et la création de chaînes télévisées et de stations radiophoniques ou encore d'un pacte d'honneur interdisant tout dérapage. Au lieu d'accabler le nouveau code de la presse transposé à celui de la France, par des dispositions répressives, a-t-il estimé, il importe de protéger le journaliste et de préserver son droit d'accès à la source d'information. Quant à Mme Kalthoum Kannou, juge et membre de la commission chargée de l'élaboration du nouveau code de la presse, elle s'est déclarée étonnée que la moitié des articles de ce code comprend des sanctions, "une situation fort préoccupante face à la vision portée à la presse en Tunisie". Elle a, à cet égard, mis l'accent sur la nécessité d'énoncer la liberté d'expression dans le texte de la Constitution, s'interrogeant, à ce propos, sur l'intérêt d'introduire un chapitre pénalisant les écrits journalistiques, ainsi que sur les raisons de placer l'octroi d'une autorisation pour le lancement d'un média sous la tutelle du procureur de la République au lieu du ministère de l'Intérieur. Selon le Maître Mohamed Abbou, le nouveau projet du code de la presse ne répond pas aux aspirations des professionnels du métier en Tunisie, dans la mesure où il paraît accablé de dispositions répressives inutiles. Mme Habiba Ben Guiza qui a donné lecture à ce projet, a affirmé que ce code ne fait que renforcer l'autorité de l'Etat sur les médias, museler la liberté de presse et entraver l'accomplissement par les journalistes de leur travail. Les participants à ce débat ont formulé une série de propositions qui viennent réaffirmer la nécessité de lutter contre les intrus du secteur et d'élaborer une Loi qui protége le métier de journaliste et n'incrimine pas les pratiques journalistiques, estimant que le projet du code de la presse n'est pas en phase avec l'évolution que connaît, aujourd'hui, la Tunisie. Les participants ont mis l'accent sur la nécessité d'incorporer le volet de la formation et de la promotion professionnelle dans le nouveau code de la presse et d'accorder toute l'attention requise à l'information locale et régionale. Les intervenants ont, également, souligné que le projet est dépourvu de la culture démocratique véhiculée par la révolution du 14 janvier, indiquant que ce projet laisse croire que le journaliste ne fait pas partie intégrante des composantes de la société tunisienne.