Les pays membres de l'Accord de libre-échange d'Agadir (Maroc, Tunisie, Egypte, Jordanie) ont décidé d'agir ensemble pour faire face à la concurrence asiatique dans le domaine du textile/habillement. La promotion d'un partenariat dans ce secteur ne manque pas d'enjeux d'autant plus que les Chinois ont décidé, à travers des implantations autour du Bassin méditerranéen, de jouer la carte du circuit court, chasse gardée de pays textiliens sud-méditerranéens (Maroc et Tunisie).
Deux facteurs majeurs militent en faveur de ce partenariat : la contribution du secteur textile/habillement aux équilibres socioéconomiques dans chacun des quatre pays. Il est le premier employeur (près d'un million de salariés et 10 millions de personnes indirectes) et le premier exportateur. Près de 8,8 milliards d'euros d'exportations en 2006 (Egypte : 2,530 milliards d'euros, la Jordanie 860 millions d'euros, le Maroc 2,695 millions d'euros et la Tunisie 2,7millions d'euros).
L'autre facteur réside dans les opportunités de complémentarité qu'offre la zone de libre-échange d'Agadir. Chacun des pays membres de l'accord présente des atouts que les autres n'ont pas.
Ainsi, les atouts de l'Egypte portent sur des coûts de production fort concurrentiels et des zones industrielles qualifiées (QIZ) qui exportent à droit nul vers les Etats-Unis.
Pour sa part, la Jordanie dispose d'un accord préférentiel avec les Etats-Unis qui a permis l'installation des zones QIZ. En outre, elle est confortée par une qualité remarquable de ses produits, une qualification de la main-d'uvre ainsi qu'une position marketing forte sur le marché américain.
Le Maroc, quant à lui, jouit de la proximité avec l'Espagne et d'une grande réputation sur les marchés européens. Ajoutons à cela d'autres facteurs tels que la réactivité, la flexibilité, l'orientation vers le «fast fashion» et le circuit court, l'organisation professionnelle forte.
La Tunisie, enfin, tire son avantage du circuit court, de la flexibilité et d'une bonne réactivité. Elle a su, également, s'attirer un grand nombre d'entreprises étrangères, notamment européennes. Un autre atout est celui du système douanier très performant ainsi que le soutien indéfectible de l'Etat.
Sur la base de l'ensemble de ces facteurs et des conclusions d'une étude effectuée, à cette fin, par deux experts, J.F. Limantour et Tahar et Ben Amor, sur les opportunités de complémentarité et d'intégration ainsi que sur le cumul des règles d'origine, une stratégie en plusieurs points a été arrêtée.
L'expert Limantour estime que «cette stratégie est porteuse d'un projet de politique unanime destinée à contribuer au développement durable du secteur textile/habillement de la zone d'Agadir, à travers la mise en place d'une coopération fondée sur la fertilisation croisée des atouts compétitifs et des complémentarités des quatre pays».
Quant aux composantes de cette stratégie, il s'agit, en premier lieu, de renforcer le commerce intra-régional des intrants. Pour ce faire, les groupes de commerce international seront sollicités pour conquérir de nouvelles parts de marché en Europe, considérée comme un débouché essentiel des produits textiles de pays sud-méditerranéens. A cet effet, l'accent sera mis sur l'impératif d'assouplir des procédures douanières en vue de donner un coup de pouce aux échanges commerciaux.
Les pays concernés ont convenu de créer ce qu'ils appellent «une structure de gestion et de groupe de prospection communs». Objectif : cibler de nouveaux marchés. Il s'agit de viser entre autres des marchés comme les Etats-Unis où la Jordanie et l'Egypte sont déjà présentes.
Ils sont invités à mettre en place un réseau régional de recherche- développement sur la compétitivité des produits et de créer en commun un institut de formation du personnel.
La nouvelle stratégie prévoit, enfin, un accès préférentiel aux produits industriels de ces pays à compter du premier jour de son entrée en vigueur sur une période de dix ans.
Pour mémoire, en vertu de l'Accord d'Agadir, les pays membres signataires ont convenu de démanteler toutes les barrières non douanières, notamment celles ayant trait aux aspects financiers, administratifs et techniques imposés aux importations.
Par ailleurs, les entreprises des pays membres peuvent tirer profit des règles d'origine du protocole pan-euromed et du cumul euroméditerranéen.
A titre d'exemple, les fabricants tunisiens de vêtements peuvent acheter des tissus en Turquie, en Egypte ou en Jordanie et exporter des vêtements vers la communauté en bénéficiant de droits de douane préférentiels.
De plus, ces vêtements peuvent être réexportés de la communauté vers la Suisse ou tout autre pays membre de l'Association européenne de libre-échange (AELE), qui appliquera un régime tarifaire préférentiel. A.B.S.