Les professionnels du secteur du bâtiment et des travaux publics sont actuellement interpellés à plus d'un titre à s'impliquer davantage dans la formation. Grands projets exigent, les entrepreneurs tunisiens sont appelés plus que jamais à actualiser leurs méthodes de travail et d'intégrer les nouveaux métiers dans le cursus de leur chantier. Ce qui n'est pas toujours facile, nous a affirmé M. Chokri Driss, président de la Fédération nationale des entrepreneurs en BTP, lors du séminaire organisé, le 12 décembre 2008, par l'UTICA et l'ambassade de France sur l'optimisation de la formation dans les métiers du bâtiment, des travaux publics et du second uvre. La formation «n'occupe pas forcément une place prioritaire dans leurs soucis quotidiens et dans leurs stratégies de développement (....) considérant, très souvent, que la formation est la vocation exclusive des institutions d'éducation», a-t-il indiqué. Notons que les entreprises opérant dans le secteur organisé sont au nombre de 2.000, alors que celles dans le secteur informel dépassent les 15.000. Le tissu industriel du secteur est essentiellement composé de PME familiales. Seules une cinquantaine d'entreprises ont une taille plus grande. A l'international, elles sont 20 entreprises à opérer en Libye, en Algérie et dans certains pays africains. Secteur encore traditionaliste Le secteur a connu quelques difficultés durant ces dernières années qui ont considérablement affaibli ses performances bien qu'il soit classé en 4ème place dans l'économie nationale, contribuant à hauteur de 7% au PIB. M. Driss nous cite des textes réglementaires contraignants pour l'exercice du métier, des textes régissant les marchés publics favorisant une concurrence très agressive entre des opérateurs n'ayant pas le même niveau de qualification mais aussi les retards de paiement des marchés publics et les retenues fiscales avec des crédits d'impôt. Pour sauver le secteur, une série de mesures a été promulguée en juillet 2008 pour pallier à ce que M. Driss a qualifié d'un cumul d'handicaps. Sur le plan technique, la dimension encore fortement traditionaliste du secteur de la construction et du bâtiment inquiète les professionnels. «La construction est encore dominée par la brique et l'enduit avec une forte proportion de main d'uvre, des matériaux de construction dominés par le carrelage en granito, des marbres et des revêtement muraux surtout en faïence ou grès, des façades en peinture ; et depuis quelques années des façades vitrées dans le grand Tunis et quelques grandes villes tunisiennes», a insisté M. Driss. La formation salvatrice Un état des lieux qui ne prépare nullement les entrepreneurs tunisiens à prendre part aux grands projets puisque ceux-ci exigent un nouveau savoir-faire et de nouveaux matériaux. Les professionnels misent sur la coopération avec les partenaires étrangers -actuellement la France et l'Italie- pour effectuer un saut technologique qui les préparera à répondre aux défis des grands projets. D'ailleurs, le président de la Fédération Nationale des Entrepreneurs en BTP nous l'a indiqué : «Lorsque nous avons rencontré les investisseurs émiratis, la première question qu'ils nous ont posée était sur le potentiel de nos ressources humaines». L'investissement dans la formation professionnelle serait-il donc le salut pour le secteur BTP ? Il est en tout cas l'une des solutions qu'il faudrait entreprendre. M. Driss prend garde : «Nous ne voudrons pas que les grands projets soient pris par les entreprises étrangères, et particulièrement asiatiques auxquelles nous ne pouvons pas faire face, une fois entrées sur le marché». En attendant, devrons-nous indiquer qu'une liste des nouveaux métiers est en train d'être finalisé par le ministère de l'Education et de la Formation en collaboration avec les professionnels du secteur. On mise également sur la formation par alternance qui engage les entrepreneurs dans la formation. Mais si les grands projets ont constitué une locomotive pour cette dynamique, M. Driss insiste sur le fait qu'il ne faut pas en faire le seul défi pour le secteur. «Nous ne devons pas toujours se concentrer sur les grands projets, la formation est un investissement durable dans les ressources humaines qu'il faut rentabiliser», a-t-il réitéré.