Le temps de faire un tour dans les quartiers résidentiels de Marrakech au Maroc, on se rend compte qu'on est encore loin de cette logique commerciale qui vise une clientèle étrangère de luxe. Le Maroc nous a devancés dans ce domaine... mais la Tunisie possède un potentiel, rassure-t-on du côté des spécialistes du secteur. Les mégaprojets en disent quelque chose, pourvue qu'ils se réalisent! Reste que le résidentiel touristique n'est pas encore bien développé, ce qui entrave l'installation d'une clientèle de luxe, dépensière. Le développement d'un marché de résidence à long terme exige également le développement d'une offre qui réponde aux attentes de cette clientèle bien distinguée. L'envie -voire la volonté- existe, mais en a-t-on les moyens? Autorisation ou non ? L'ouverture du marché immobilier à la clientèle étrangère constituait une problématique. Après l'indépendance, exactement en 1957, on exigeait l'autorisation des autorités pour l'acquisition des biens immobiliers pour les nationaux et les étrangers -souveraineté nationale oblige. 20 ans après, c'est-à-dire en 1977, les nationaux en furent dispensés. Il faudra attendre 2006, avec l'amendement de la loi du 11 mai 2005, pour que les étrangers qui acquièrent de biens immobiliers dans les zones industrielles et de terrains dans les zones touristiques, pour des projets à caractère économique, soient eux aussi dispensés. Mieux vaut tard que jamais. L'évolution des moeurs continue. Et, c'est ainsi que la Tunisie a signé des conventions avec des pays voisins pour rendre effective cette dispense. «Mais le principe de réciprocité prime dans ce cas-là, puisque parfois on supprime l'autorisation et parfois on l'exige», a affirmé Me Taoufik Chabchoub, lors de la table ronde organisée, mercredi 10 février 2010, par Invest Consulting sur les mutations et les perspectives du marché immobilier en Tunisie. «Les étrangers bénéficient d'un avantage fiscal (taux fixe) et non pas administratif», précise-t-il. D'un autre côté, on estime que l'achat de terrains de la part des étrangers est l'une de causes de la flambée des prix de l'immobilier en Tunisie. Ce qui implique des conséquences sur le plan social. «A peine 12 heures après l'annonce du prix au mètre carré à Tunis Sport City par le groupe Boukhatir, le propriétaire des terrains d'à côté a fait grimpé les prix d'une façon exponentielle», a témoigné M. Chokri Keskes, président de la Chambre syndicale des agents immobiliers. Le logement d'occasion, une alternative ? Ce qui donne une idée sur les raisons de la flambée des prix dans certains lieux... mais qui est loin d'être l'unique cause. M. Keskes précise aussi que la vente des terrains viabilisés est en cause. D'ailleurs, la demande sur l'immobilier deuxième main ou d'occasion ne cesse d'augmenter, soit +3% en 2009, accaparant une part de marché de 50% par rapport à l'immobilier neuf, selon M. Mustapha Madhoui, représentant de la Chambre syndicale des promoteurs. On estime que cet engouement est dû au coût des logements d'occasion, soit 10 à 15% de moins que le logement neuf, mais aussi au choix des lieux d'installation par les clients. Néanmoins, on relève plusieurs problématiques qui y sont liées, dont la plus importante est la non inscription dans le registre foncier, donc l'absence de titre foncier. Ce qui pose de réels problèmes d'acquisition, vu que les banques exigent des garanties solides de la part des acquéreurs. «On m'a même demandé une copie du titre foncier de la maison en mon nom alors que mon crédit n'a pas encore été débloqué», a indiqué un acquéreur. Du côté des agents immobiliers, on est encore dans le flou, vu le nombre d'intrus qui exercent le métier, donc le manque de confiance qui en découle. «Il faut bien choisir son agent immobilier qui doit être un homme du métier qualifié. Malheureusement, en tant que chambre syndicale, nous ne pouvons pas identifier les intrus dans ce secteur. Le client doit, donc, être bien conscient de l'importance de son choix», insiste M. Keskes. Côté formation, la première promotion d'agents immobiliers «académiques» verra le jour cette année, nous annonce-t-on. Car jusque-là, la loi stipule que l'agent immobilier doit avoir au moins un premier cycle de l'enseignement supérieur et une expérience de deux ans dans le domaine. Etant un accompagnateur, l'agent immobilier est en quelque sorte le conseiller de son client. Avec un marché qui s'élargit de plus en plus, une demande qui grimpe et une offre qui explose, il est certain que l'avenir du secteur dépend de la capacité de ses acteurs, promoteurs et agents immobiliers, à satisfaire le client.