L'Instance nationale de lutte contre la corruption (Inlucc), a indiqué, dans son journal hebdomadaire paru ce lundi 2 août 2021, que le dossier de l'Université française en Tunisie pour l'Afrique et la Méditerranée (UFTAM), a été déposé auprès du procureur de la République près du Tribunal de première instance de Tunis après que l'Instance a achevé son enquête concernant des suspicions de corruption administrative et financière au ministère de l'Enseignement supérieur. L'Inlucc rappelle que ses investigations ont démarré suite au dépôt d'une pétition déposée par un certain nombre d'universitaires pour suspicion de corruption à l'encontre de l'ancien ministre de l'Enseignement supérieur, en l'occurrence Slim Khalbous, accusé par les dénonciateurs de violation des procédures concernant la création d'une université étrangère en Tunisie, d'atteinte à l'éthique universitaire et d'avoir exploité son statut à des fins personnelles. « Devant le sérieux des accusations, l'Inlucc a procédé à une enquête et a pu obtenir des preuves sérieuses et concordantes qui indiquent que l'ancien ministre a usé de son statut pour accélérer la mise en place d'une université étrangère en Tunisie afin de servir ses intérêts et d'obtenir le poste de président d'une agence universitaire étrangère. L'ancien ministre a poursuivi ses fonctions au sein du ministère durant deux mois et demi alors qu'il était déjà élu à la tête de l'agence en question » a souligné l'Instance.
D'un autre côté, l'Inlucc a évoqué des suspicions de dépassements liés à l'accord conclu entre le ministère de l'Enseignement supérieur et la caisse des dépôts et consignations (CDC) pour le financement du projet de création d'une université étrangère en violation avec les textes de loi régissant l'enseignement supérieur privé en plus de l'exploitation sans contrepartie du bâtiment d'un établissement contrairement aux dispositions légales.
Annoncée dans un protocole d'accord signé le 14 février 2019 par l'ancien ministre Slim Khalbous et la ministre française de l'Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, l'UFTAM a commencé à accueillir ses premiers étudiants le 4 octobre 2019, délai qui a soulevé de nombreuses interrogations alimentées par la campagne électorale, alors menée par l'ancien ministre, pour le poste de recteur de l'AUF, fonction qu'il occupe depuis le 8 décembre dernier après son élection le 27 septembre 2019. Ce sont d'ailleurs les démarches entreprises par l'ancien ministre pour faire aboutir ce projet, que dénoncent depuis des mois de nombreux universitaires. Ils affirment, documents à l'appui, que l'université a démarré son activité sans avoir reçu l'agrément requis car elle ne rentre ni dans le cadre légal d'une université publique ni dans celui d'une université privée.
Le sujet a d'ailleurs été évoqué lors de la dernière visite du premier ministre français, Jean Castex, à Tunis. L'ambassadeur de France en Tunisie, André Parant a affirmé, dans une déclaration à Business News, que si l'UFTAM a été mise en place sur des bases «provisoires», les deux parties, tunisienne et française, sont en train « d'y remédier». « Une Société Anonyme est en cours de constitution, elle sera créée d'ici le mois de septembre. Un accord intergouvernemental est aussi en cours d'élaboration, il définira les engagements respectifs de l'ensemble des parties. Nous avons mis tout cela sur les rails, on y travaille et d'ici septembre l'UFTAM sera créée sur des bases stables et moins précaires. Cet accord dira ce que chacune des parties s'engage à faire pour la création du campus et permettra de repositionner le projet sur des bases solides et durables », nous avait-t-il confié.