Le président de la Ligue tunisienne pour la défense des Droits de l'Homme (LTDH), Bassem Trifi a indiqué que la Tunisie passait par une mauvaise période synonyme d'atteintes aux droits et aux libertés. Il a affirmé que la Tunisie fait face à une situation d'oppression et de dictature. Il a annoncé la création d'un front civile pour la défense des droits et des acquis de la Tunisie. S'exprimant le 18 mai 2024 durant une conférence tenue par la LTDH, Bassem Trifi a critiqué la révocation de magistrats sur ordre du président de la République, Kaïs Saïed et le refus de leur réinsertion après avoir obtenu gain de cause auprès du tribunal administratif. Il a considéré qu'il s'agissait d'une manœuvre visant à soumettre la justice. Le président de la LTDH a, aussi, affirmé qu'on exploitait la justice dans le but de réprimer les journalistes, les activistes et les politiciens. Bassem Trifi a considéré que le pouvoir en place tentait de restreindre les libertés et de soumettre les médias par le biais du décret 54 et dans le but de faire taire l'opposition et les avis qui lui sont contraires. Il a estimé que la révision du décret 88 portant sur les associations avait pour véritable objectif de les réprimer. Il a, également, évoqué la prise d'assaut des locaux de l'Ordre national des avocats de Tunisie (Onat), qualifiant la chose de dangereux précédent et de kidnapping de deux avocats. « L'Etat et ses appareils ont dépassé toutes les limites, car nous en sommes venus à la constatation d'un crime de torture à l'encontre de maître Mehdi Zagrouba… Ceci a été constaté par le président de la LTDH et par le président de l'Onat… On exploite la justice afin de porter atteinte aux rivaux politiques, les opposants et toutes les voix libres… Nous devons rester unis et solidaires et résister face à ces attaques dont nous sommes victimes et face à toutes les atteintes que nous subissons », a-t-il ajouté. Bassem Trifi a affirmé que la LTDH continuera à œuvrer, en coopération avec les forces vives de la société civile, pour la préservation des droits et des libertés et pour la mise en place d'un système démocratique respectant la constitution, les pouvoirs, l'être humain et la dignité humaine. « La LTDH défendra les acquis des Tunisiens et des militants et militantes ayant tant sacrifié… Nous devons nous unir…. Aujourd'hui, il s'agit d'une guerre de survie… J'ai présenté une proposition aux collègues des autres associations pour la création d'un front civile large pour défendre les droits et les acquis et face à ses dangereuses atteintes », a-t-il poursuivi.
Pour rappel, Mehdi Zagrouba a été interpellé à la suite d'une altercation avec des agents de sécurité au palais de justice au cours de la manifestation des avocats. Le ministère de l'Intérieur avait précisé dans un communiqué, que selon le ministère public, il s'agit d'outrage à un fonctionnaire public dans l'exercice de ses fonctions, et de violence physique et verbale contre les deux agents sécuritaires. Lors de son arrestation à la Maison de l'avocat, il a été violemment agressé. Les témoins de la scène avaient indiqué que les agents s'étaient jetés sur lui, puis l'avaient traîné par terre, le dénudant dans la foulée. Bassem Trifi, a indiqué à travers un statut publié, mercredi 15 mai 2024, que l'avocat Mehdi Zagrouba a été victime d'une agression et d'une torture brutale. « Le bâtonnier, des confrères et moi-même, avons constaté les traces évidentes de violence et de torture sur son corps. Le juge d'instruction et le parquet ont refusé de le soumettre à un examen médical. Le juge d'instruction a continué d'interroger Me Zagrouba jusqu'à ce qu'il vomisse et s'évanouisse. Malgré tout cela, le juge d'instruction a émis un mandat de dépôt à son encontre alors qu'il était inconscient et gisait par terre. Après les arrestations arbitraires, les procès malveillants, les agressions et les perquisitions, nous en sommes arrivés aujourd'hui à la torture. Jusqu'où ces injustices ? », lit-on dans le témoignage de Bassem Trifi. Pour ce qui est de Sonia Dahmani, les forces de l'ordre ont pris d'assaut, le 11 mai 2024, les locaux de la Maison de l'avocat de Tunis où s'était réfugiée celle-ci après avoir fait l'objet d'un mandat d'amener. Les policiers se sont introduits une première fois à l'intérieur des locaux de l'Ordre des avocats afin d'embarquer Sonia Dahmani. Les policiers, en tenue civile, portaient des cagoules comme s'ils s'apprêtaient à arrêter un dangereux criminel. Un deuxième groupe est revenu par la suite au même endroit afin d'arracher aux journalistes leurs équipements. Lors de ce deuxième assaut, les policiers ont arraché le matériel de la chaîne France 24 et embarqué le caméraman Hamdi Tlili. Il a été relâché par la suite, mais son matériel a été totalement saccagé. Il est à noter que Sonia Dahmani est poursuivie dans trois affaires. La première est liée à ses récentes déclarations lors d'un passage médiatique sur la chaîne télévisée Carthage +. La deuxième affaire porte sur une autre déclaration plus ancienne. La troisième affaire a été initiée à la suite d'une plainte déposée par la ministre de la Justice, Leila Jaffel. A la même date, les deux animateurs radios Borhen Bssais et Mourad Zghidi ont été, également, arrêtés et conduits à la caserne d'El Gorjeni. D'après leurs avocats, ils ont été interrogés au sujet de déclarations et passages médiatiques. Ils ont été détenus jusqu'au 15 mai 2024, date à laquelle un mandat de dépôt a été émis contre eux. Les avocats ont considéré que le dossier de l'affaire ne comportait pas de preuve d'atteinte à autrui via des systèmes d'information.