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Chez Total Tunisie, on ne viole plus les lois par hasard !
Publié dans Business News le 13 - 11 - 2018

En dépit de son appartenance à l'un des plus grands groupes internationaux, Total Tunisie brille par une interprétation bien particulière des lois tunisiennes. Son actuelle direction fait ce qu'elle veut, quitte à mettre en danger la sécurité de ses clients et à violer sciemment plusieurs de nos lois.

La branche tunisienne de la firme française Total organise en cette période un grand événement pour le développement de Start-ups tunisiennes. Une compétition entrepreneuriale à l'ère du temps organisée ces temps-ci par un bon nombre de banques et d'opérateurs téléphoniques tunisiens. L'initiative est louable puisqu'elle participe à la création de valeur et la découverte de véritables talents parmi la jeunesse tunisienne. Sauf lorsqu'elle sert de paravent pour cacher d'éventuelles violations graves de la loi, ce qui semble être le cas de Total Tunisie.
Les faits d'après une enquête réalisée par Business News : la station-service située sur la Route nationale 9 (Station du Lac 2, RN 9 Tunis-La Marsa) dont les citernes de stockage de carburant ont une capacité supérieure à celle autorisée et qui vend, en toute illégalité, des bonbonnes de gaz.
Le risque ? Un accident, voire un attentat, qui pourrait toucher la station-service et ses clients, mais surtout son voisinage direct. Un voisinage où l'on trouve (pêle-mêle) l'ambassade américaine à Tunis, l'école américaine, les trois aéroports (civil, militaire et présidentiel), des casernes (militaire et garde nationale) et un bon nombre d'administrations et de commerces.

Concrètement, la station-service exploiterait 120.000 litres de carburants de divers types dans ladite station, contre 90.000 autorisés. Nos investigations ont fait ressortir que la station en question est classée en catégorie 3 d'après l'arrêté d'établissement classé (AEC), alors que l'exploitation de quatre réservoirs de 30.000 litres en fait un établissement de catégorie 2, ce qui rend la classification erronée et la situation de la station-service illégale. En réalité, le réservoir supplémentaire de 30.000 litres est un réservoir de secours qui ne devait pas être en exploitation, sauf que la direction de Total Tunisie a quand même choisi de l'exploiter commercialement. Le changement de catégorie est légalement possible après autorisation du gouverneur de Tunis, mais celle-ci n'a jamais été octroyée. Les chances de voir un établissement de catégorie 2 en zone urbaine sont quasi nulles, nous dit un haut cadre chez un pétrolier concurrent, d'autant plus qu'il s'agit d'une zone sensible.
En vertu de l'arrêté du ministre de l'Industrie et de la Technologie du 23 février 2010, fixant la nomenclature des établissements dangereux, insalubres ou incommodes, la classification est claire.
Si l'on applique les règles de calcul pour déterminer la catégorie de la station-service en question, nous obtenons la note de calcul ci-joint. En conséquent, la station-service Total de la RN 9 est concrètement en 2ème catégorie, alors que son AEC mentionne qu'il s'agit d'un établissement de 3ème catégorie.


Quant aux bonbonnes de gaz, il faut également une autorisation spéciale quand il s'agit d'un endroit sensible, ce qui est le cas de cette station. En fait, la station-service ne peut pas avoir cette autorisation à cause, justement, de son voisinage sensible et de dispositifs spécifiques de sécurité liés à son emplacement géographique particulier, d'après notre pétrolier. Il suffit d'imaginer l'attaque de l'ambassade US en septembre 2012, mais avec des bonbonnes de gaz en plus ! Comme Business News a eu à le constater, les bonbonnes sont à l'air libre à la disposition de tout client et de tout extrémiste !


Pour savoir comment Total Tunisie s'est retrouvée dans cette situation hasardeuse dans une station-service construite en 2014, nous avons adressé un courrier comprenant tous les griefs, en date du 10 octobre 2018, à Mansur Zhakupov, directeur général de Total Tunisie. Un courrier resté sans réponse, en dépit de la gravité (d'après nous) des faits relevés.
Faute de réponse, ou d'une quelconque réaction, nous avons adressé un mail à Total France le 22 octobre pour pousser la filiale tunisienne à réagir. Deux jours plus tard, Business News a reçu la visite d'une cadre de la société qui a balayé d'un trait les points relevés par notre enquête. Les réservoirs sont certes supérieurs à ceux autorisés, mais ceci est juste une anticipation de la croissance à venir et le contenu de ces réservoirs n'a jamais, dit-elle, dépassé les 90.000 litres autorisés (CQFD). Pourquoi alors ne pas avoir demandé une licence qui prend en considération la croissance ? « Ca coûte plus cher ! », répond la dame. Mais qu'est-ce qui coûte le plus cher, l'investissement en grosses citernes ou une simple licence pour l'exploitation de 120.000 litres ? « La pratique est courante chez tous les pétroliers », botte-t-elle en touche en nous invitant à élargir notre enquête sur tous les pétroliers et ne pas se suffire de Total.
Quant aux bonbonnes de gaz, la station n'aurait pas besoin d'autorisation pour en vendre dès lors que la quantité proposée est inférieure à 20 bonbonnes, explique-elle. Toutefois, elle élude un détail essentiel : Sa justification s'applique à toutes les stations service mais pas à certaines, dont celle de la RN9 qui est soumise à des dispositions spécifiques de sécurité. De plus, selon l'article 6 de l'arrêté du 14 octobre 2005, « les dépositaires des bouteilles de gaz de pétrole liquéfié destiné à l'usage domestique doivent obtenir l'autorisation d'ouverture et d'exploitation d'un établissement classé conformément à la législation et à la réglementation en vigueur ».
En dépit de cet échange de bon sens, et en dépit de la promesse reçue, Business News ne recevra jamais de réponse écrite de la part de Total. Comme si l'échange n'avait jamais eu lieu. Motif: la cadre dépêchée par Total n'est pas habilitée à parler aux médias et à leur donner des réponses officielles. On nous invite, via l'agence PR, à publier notre article et à recevoir ensuite un droit de réponse.

Vu ce qui précède, Total Tunisie semble donc procéder sciemment à ces violations de la loi, puisqu'elle a été avertie du danger et qu'elle a refusé de donner des réponses écrites à nos questions et qu'elle a louvoyé en fournissant des réponses verbales par le biais d'une personne qui n'est pas habilitée à le faire.
Mais ce ne serait pas la seule transgression. Nous avons poussé l'investigation plus loin pour découvrir des violations au code du travail dans certaines stations service. Pire, la violation du code du travail touche même le siège avec plusieurs histoires dont notamment le harcèlement ou le règlement d'une partie des salaires au noir, afin de ne pas payer les cotisations sociales de certains personnels (Les preuves en notre possession sont à la disposition de la CNSS concernant ce dernier point). D'autres dossiers, en violation de la réglementation douanière, sont devant la justice et/ou les brigades spécialisées. Ainsi les cas de présumées fraudes douanières, de constructions illégales sur des terrains de l'Etat dans la zone pétrolière de Radès (l'APAL a réussi à faire arrêter les travaux) ou encore du harcèlement de locataires-gérants de stations service. L'un d'eux a affirmé mardi 13 novembre 2018 à Business News que sa station a été injustement fermée pour être louée à quelqu'un d'autre, suite à de nouvelles exigences économiquement intenables. Nous ne manquerons pas de revenir là-dessus en temps et en heure, mais il est quand même étrange de constater que Total Tunisie se comporte comme une entreprise voyou.

Serait-ce une politique d'entreprise ? Interrogé par Business News, un haut cadre de Total certifie que non et que ces violations de la loi et ce comportement dédaigneux, à la limite néocolonial, sont l'œuvre de l'unique directeur Mansur Zhakupov. Nommé en juillet 2017, ce jeune francophone de 37 ans, originaire du Kazakhstan, est rassuré par la protection que lui offre son employeur, cette grande enseigne internationale qu'est Total. Il est assuré que la Tunisie ne peut rien lui faire, sans nuire aux relations tuniso-françaises. En clair, la Tunisie n'est qu'un pays du tiers-monde qui fera ce qu'on lui dira.


Ce comportement dédaigneux s'affirme également à l'égard de l'Etat tunisien.
Dans une interview accordée à Wassim Ben Larbi sur Express FM, le 24 octobre dernier, Mansur Zhakupov est à la fois menaçant et donneur de leçons : « Total est présent dans presque tous les pays africains, sauf le Bénin, où la contrebande d'essence a pris de l'ampleur et ça a gangrené l'appareil de l'Etat. Il n'était plus possible pour les acteurs internationaux d'y opérer. Il est important que l'Etat tunisien s'affirme dans ses frontières ». C'était à propos de la contrebande d'essence en Tunisie qui viendrait de l'Algérie et de la Libye et qui, selon lui, atteindrait 30% de la distribution globale. Le sous-entendu est clair : soit vous fermez les frontières devant la contrebande, soit on va partir ! Et ceci est dicté sur les ondes d'une radio. Juste après, il parle d'un appel d'offres public relatif aux énergies renouvelables que Total aimerait gagner, en rappelant tous les investissements multi-secteurs opérés par Total en Tunisie ! « Si on réussit à gagner certains projets dans le cadre du dernier appel d'offres, solaire ou éolien, la Tunisie fera partie d'un club hyper restreint ».
Une phrase qui ferait rebondir Chawki Tebib (président de l'Instance anti-corruption) et les autres participants à l'appel d'offres, puisque le directeur fait miroiter certains avantages si on lui attribue certains marchés.
Dans cette même interview, le directeur relève qu'il a fait face à trois ministres de tutelle en quinze mois. « Ce qu'on remarque, et c'est le seul problème (…) chaque fois qu'on prend un nouveau poste, il nous faut six mois pour rentrer dans le sujet (…) Avec un changement de ministres trop fréquent, on n'avance pas aussi vite que la République ». Et de conclure l'interview avec une anecdote où les sous-entendus les disputent à l'humour : « Je me souviens lors de mes études à Moscou, d'un Premier ministre russe qui a fait des erreurs macro-économiques qui ont coûté des milliards de dollars à la Russie et qui était très critiqué par tous les partis. Il y avait un grand débat au Parlement où l'on demandait son départ. Il était défendu par le président qui a dit une chose simple : son éducation nous a coûté des milliards de dollars, maintenant il faut qu'il travaille ! ». « C'est très symbolique comme message », conclut Wassim Ben Larbi à la fin de son interview.

L'absence de réponse aux questions envoyées par Business News, ses leçons à l'Etat tunisien et son mépris de la législation tunisienne disent long sur la mentalité du jeune directeur qui semble grisé par son poste et l'identité de son employeur.
Présent en Tunisie depuis 70 ans, Total a toujours fait partie du fleuron des IDE. Sa nationalité française la positionne à un degré privilégié au vu des relations historiques et immuables entre la Tunisie et la France. Sauf que ceci n'a pu être obtenu que par le respect mutuel et la conformité stricte à la loi tunisienne, que ce soit en matière industrielle, commerciale ou sociale. Il en est de même dans les rapports qu'ont ces IDE avec l'administration et la classe politique tunisienne. C'est toute une culture franco-tunisienne, ou tuniso-française, que le directeur semble méconnaitre.

Marouen Achouri

Crédit photos : Business News, Google Street (la station Total RN9, en arrière-plan l'ambassade US de Tunis)


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