Des scénarios de périples de migrants, seuls ou en familles, poussés par la guerre ou par la famine et la sécheresse. Des histoires où le racisme est omniprésent... Après le thème des «Frontières», la fondation Rosa Luxembourg et le collectif de bande dessinée tunisienne Lab 619 se retrouvent autour d'une œuvre sur la «Migration». Une résidence artistique a en effet eu lieu du 30 octobre au 7 novembre 2016, avec des artistes tunisiens et arabes (Algérie, Maroc, Liban, Egypte, Jordanie, Libye, Syrie/Palestine), ce qui a donné naissance, une année plus tard, au 1er Hors-série thématique du collectif en collaboration avec Rosa Luxembourg. «Migration» a été présenté au public samedi dernier au local de la Fondation. 150 pages signées en textes et en images par les bédéistes projet, dont la coordinatrice, Abir Guesmi, nous explique l'approche : «Pendant la semaine de la résidence, le processus de création a été imprégné par des témoignages de migrants et des histoires personnelles», décrit-elle. Et d'ajouter : «Nous avons récolté ces témoignages à travers l'Association des étudiants et stagiaires africains en Tunisie (Aesat) et nous avons organisé, au début de la résidence, une table ronde en présence d'Avocats sans frontières et Médecins du monde». Une approche qui a permis au groupe d'avoir une vision globale du thème, déclinée selon la sensibilité de chacun. L'ombre du racisme est omniprésente Les scénarios exposent les périples de ceux qui immigrent, seuls ou en familles, poussés par la guerre comme en Syrie, ou par la famine et la sécheresse comme en Afrique subsaharienne. Des histoires où le racisme est omniprésent, comme dans le scénario «La couleur de la douleur» du Tunisien Othmane Selmi et «La vie en rose» de l'Algérien installé en Tunisie, Salim Zerrouk, qui a opté pour un ton décalé, avec ce scénario où flamants roses, pélicans et autres animaux jouent les rôles d'humains. «Je me suis inspiré des témoignages des migrants et d'écrits sur la Migration. C'est un sujet sensible et c'est parfois plus simple de passer par des animaux, comme dans Kalila wa Dimna», dit-il à propos de cette œuvre, l'une des trois qui portent son nom dans le Hors-série. D'autres encore ont opté pour des scénarios futuristes, comme Abir Guesmi dans «Le puits», dessiné par le Tunisien Moez Tabia. La plupart illustrent un réalisme percutant, où l'expérience personnelle n'est jamais loin. Toucher un nouveau public L'événement de présentation comportait également une exposition de dessins des artistes participants. Ceux parmi eux qui ont pu faire le déplacement ont contribué avec le public à une fresque murale sur la Migration, et ont discuté de ce projet qui les rassemble. «Aujourd'hui, on commence à parler de scène de BD arabe. Le festival d'Angoulême y consacre un spécial en 2018», affirme fièrement Abir Guesmi en présentant le Hors-Série. Ce dernier fait partie d'une trilogie thématique du Lab 619. Après «Frontières» et «Migrations», «Identités», crée en collaboration avec l'Institut Goethe et Dar Eyquem, sortira en décembre 2017 et les membres du collectif espèrent faire une tournée avec. «La BD est un art très progressiste», ajoute Khalil Teber, coordinateur de programmes à Rosa Luxembourg, qui a choisi de collaborer avec le collectif Lab 619 pour l'engagement social de leurs œuvres. Pour la suite, la Fondation sera également de la partie. «On continue l'aventure avec d'autres thématiques», déclare-t-il. Et de finir : «Nous œuvrons pour l'éducation à la politique et à la justice sociale et nous avons consacré de nombreuses publications à la Migration. A travers la BD, nous voulons toucher un nouveau public» !