L'espace d'exposition Aire Libre d'El Teatro abrite, depuis le 8 et jusqu'au 21 mars, l'exposition photos de l'artiste résidente à Tunis, Manuela Mafioli. C'est donc sous l'œil d'une Italienne que les images d'une Tunisie révoltée ont été inscrites dans le temps et dans l'espace. Le temps est celui d'une Tunisie «dé Benalisée» (dépénalisée), plus exactement 5 jours après la fuite du dictateur jusqu'au 27 janvier 2011. L'espace c'est la place de La Kasbah et ses environs à Tunis, quartier général des contestataires et nouvelle scène des sit-in. «Comment prendre des photos d'une révolution? C'est la question qui m'habitait ainsi que tous les autres photographes en ces jours chargés d'émotions de toutes sortes», explique l'artiste. Justement, comment rendre compte de cette révolution, sous quel angle, sous quelle forme? Est-ce par souci d'archivage ou par souci d'esthétique? Et voilà que les images ou plutôt les figures se sont offertes à elles, brutes, crispées, mélancoliques, révoltées, amères, cyniques, obstinées, expressives à souhait mais surtout vraies et authentiques, miroirs et réceptacles d'une cause commune et honorable: la liberté «Tout en étant partie prenante, un jour, à La Kasbah, dans cette multitude d'images, c'était comme si un canal cosmique s'est ouvert et les photos étaient là», note la photographe dans son texte de présentation. S'armant de son appareil, Mafioli est allée voir du côté d'une tranche d'un peuple qui gronde et qui refuse les demi-mesures. De 7 à 77 ans, tous y étaient, s'offrant à cœur ouvert à l'objectif de l'artiste. Les couleurs ont été effacées (hormis deux clichés en couleur) en profit des valeurs : le noir, le blanc et la liberté. «Je remercie toutes les personnes d'avoir regardé, d'une manière tout à fait spontanée, dans ma caméra, particulièrement les gens de “la caravane de la liberté” battus et chassés. Sans leur résistance, la révolution n'aurait pas pris sa bonne marche !», note, enfin,la photographe.