Le public était au rendez-vous pour ce spectacle qui a marié les sons de nos montagnes et ceux des horizons lointains... C'était une soirée par comme les autres, dimanche dernier. La lune était de toute beauté. La voix puissante et timbrée de l'artiste tunisien Mounir Troudi montait au ciel, retentissante. Les sons des percussions et la sonorité feutrée de la trompette d'Erik Truffaz, «Picasso du jazz», résonnaient. Ceux de la gasba, et de la zokra aussi. Lumière tamisée. Ambiance intimiste. Le voyage musical mêlait les profondeurs du pays aux horizons les plus lointains. C'était la première de «Nagouz 2014». C'est en présence du ministre de la Culture, Mourad Sakli, et accompagné d'un orchestre d'une quarantaine de musiciens tunisiens et étrangers, sous la houlette de Sami Ben Said, que Mounir Troudi a présenté sa nouvelle création musicale, sur la scène du théâtre antique de Carthage. Un spectacle qui vient couronner un long parcours de recherche artistique et d'expérimentations musicales, mais également de collaboration avec l'un des plus grands jazzmen dans le monde, Erik Truffaz. Pieds nus, cet artiste atypique a chanté avec tout son corps, transportant le public d'un univers musical à un autre. Des univers mélodiques où se conjuguent aisément les influences bédouines (aroubi), soufies, jazz, reggae, blues, rock, et où le dialecte tunisien retrouve toute sa splendeur. Métissage et fusion des genres, richesse des arrangements et originalité des textes étaient à l'honneur dans ce spectacle. Des chansons traditionnelles comme «Magrouni», «Hdhili», «Wahch essra» et «Dalwehi», mais surtout des titres personnels, dont les textes sont signés Jelidi Laouini, Awled Oun, Foued Hamdi et d'autres poètes tunisiens. Les très connues «Weshi weshi», «Asses», «Hamma» ou encore «Yabous» et les moins connues, comme «Nagouz», «Ma bqat el gosra», «Guadech», «Chog el asa w tmarred», «Trop tard», «Ines», «Aqua dub» et «Salwa». L'écriture musicale est excellente et les arrangements portent l'empreinte du grand musicien Sami Ben Said. Dans «Nagouz», Mounir Troudi, avec sa voix jaillissant des hauteurs des montagnes tunisiennes, a plus que jamais assuré. Une performance de qualité ayant valu à l'artiste plusieurs standing-ovations de la part d'un public qui s'est déplacé en nombre respectable. Le seul hic dans le spectacle reste la participation d'un rappeur anglophone nommé Marouane, qui a «cassé» le rythme. Le mélange n'était pas des plus réussis. Mounir Troudi : soit on aime, soit on n'aime pas. Mais, dans tous les cas, il a le mérite de travailler sur le patrimoine tunisien, de l'exhumer, de le valoriser et de le présenter très souvent sur de prestigieuses scènes à l'échelle internationale, contrairement à d'autres artistes qui ont choisi le chemin de la musique orientale et commerciale. La voie de la facilité...