L'ONA leur tourne le dos. Faute de motivation et d'appui, ils menacent de fermer boutique La Chambre syndicale nationale des commerçants des produits de l'artisanat (Csncpa) a décidé de mettre un terme au mépris et à l'esprit d'exclusion signifiés par la direction générale de l'Office national de l'artisanat (ONA) à l'égard des commerçants de l'artisanat. Ce secteur qui trébuche, depuis plusieurs années, à cause de multiples obstacles d'ordre organisationnel, structurel et promotionnel, doit sa survie à la persévérance et à la résistance du couple artisan-commerçant. Défiant la crise, artisans et commerçants continuent avec les moyens du bord de développer le secteur. Aujourd'hui, et contre toute attente, la direction générale de l'ONA se désengage par rapport à la promotion et au soutien des commerçants des produits de l'artisanat. Pour l'Office, seul le ministère de tutelle doit assumer cette responsabilité ! Une attitude ressentie comme une sentence, couronnant une multitude de défaillances de la part de l'ONA et tant de déceptions. Mme Najet Labidi, présidente de la Chambre syndicale nationale des commerçants des produits de l'artisanat, exprime la consternation et l'indignation des commerçants : «Les commerçants des produits de l'artisanat constituent le maillon fort du secteur. Ce sont eux qui assurent la commercialisation et la visibilité de l'artisanat tunisien aussi bien sur le marché national qu'à l'étranger. Les livrer à leur propre sort et les priver de l'appui nécessaire à leur activité s'avère être une grave erreur », indique-t-elle à La Presse. La présidente de la Csncpa insiste sur l'impératif de motiver les commerçants à aller de l'avant, surtout qu'ils peinent pour préserver la pérennité du secteur. Il faut dire que les erreurs commises ces dernières années continuent jusqu'à nos jours à altérer le secteur de l'artisanat. Mme Labidi en cite la création des magasins recommandés par l'ONA qui — bien que l'initiative avait été prometteuse à ses débuts — a gangréné le commerce de l'artisanat. Ces magasins, dont le nombre est de 72, ont fini par accaparer l'activité commerciale des produits de l'artisanat, au détriment des autres. Se trouvant dans l'incapacité de résister au contexte de favoritisme, bon nombre de petits commerçants ont été contraints à mettre la clé sous le paillasson. De la promotion, dites-vous ? Mme Labidi reproche à l'ONA son laxisme quant à la promotion du secteur. Un laxisme qui se traduit par la non-actualisation des données publiées dans son site web, un site qui devrait être un outil de promotion aussi attractif qu'efficace pour la mise en valeur de l'artisanat tunisien, des artisans, des commerçants et de tous les maillons de la chaîne artisanale. Autre outil de promotion voire de consolidation des relations professionnelles entre les artisans et les commerçants voué à l'oubliette : le catalogue des artisans et des exposants du Salon de l'artisanat 2014. Ce dernier n'a toujours pas été distribué aux intervenants du secteur, , selon Mme Labidi, qui ne manque pas d'évoquer un autre facteur de discrimination. Il s'agit du remboursement par le Cepex des dépenses relatives à la participation à des événements internationaux sur l'artisanat. «Les artisans qui participent à des salons et à des foires internationaux bénéficient d'un remboursement de 80% des dépenses. Les commerçants, eux, qui proposent une panoplie de produits mettant en exergue les créations de plusieurs artisans n'ont droit qu'à 40% de remboursement, ce qui est illogique», ajoute-t-elle. La présidente de la Csncpa met le doigt sur la plaie en rappelant à l'ONA ses engagements oubliés. Si le secteur périclite c'est que la volonté de le sauver n'existe pas. Pourtant, des ébauches de solutions sont toutes prêtes depuis plus d'une décennie. M. Labidi rappelle la stratégie nationale sur le développement et la promotion de l'artisanat, une stratégie élaborée en 2002 et qui vise la promotion du secteur à l'horizon 2016. «En 2010, soit huit ans après son élaboration, il a été procédé à l'élaboration d'un Programme national du développement de l'artisanat (Pnda) dont les grands axes sont tirés de la stratégie indiquée. Et voilà deux projets qui restent bien gardés dans les tiroirs, car jusqu'à nos jours, rien n'a été fait », indique-t-elle. La Chambre syndicale nationale des commerçants des produits de l'artisanat rappelle que la promotion de la commercialisation fait partie intégrante de la promotion du secteur, et donc de la mission capitale de l'ONA. Elle condamne l'attitude de l'Office vis-à-vis des commerçants, recommande la réhabilitation de leur mérite et demande des éclaircissements sur ce mépris et cette intention d'exclusion. «Faute de quoi, nous annoncerons la grève et fermerons boutique», prévient Mme Labidi.