Au terme du second trimestre 2020, les indicateurs économiques devront enregistrer une chute libre et les équilibres macroéconomiques seront davantage brouillés, par une crise sanitaire hors norme. Tous les facteurs de la croissance : production, investissement, travail et consommation sont en panne sèche d'où le risque d'une récession jamais enregistré depuis l'indépendance. Avec une croissance négative de -4% et un taux de chômage qui montera crescendo, le pouvoir d'achat subira à son tour les effets croisés d'une conjoncture difficile. En dehors de la chute des prix de l'énergie et l'ajustement à la baisse des prix à la pompe, le déséquilibre entre l'offre et la demande du marché fera exploser les prix. Reste à savoir si la BCT maintiendra son objectif de maîtrise de l'inflation en poursuivant une politique monétaire restrictive et ce, aux dépens de la relance. Doit-elle se défaire de la contrainte monétariste ? Des mesures de soutien aux particuliers et notamment aux personnes les plus démunies ont été prises par le gouvernement mais aussi par la BCT, pour préserver le pouvoir d'achat du consommateur. Toutefois sont-elles suffisantes pour éviter le spectre d'une pauvreté extrême et d'une dissension sociale dévastatrice ? Le taux de pauvreté devrait selon les estimations des instances internationales dépasser les 3% en 2020 si l'on utilise le seuil de 3,2 dollars par jour en parité du pouvoir d'achat. Le taux d'inflation s'envole pour atteindre 6,3% à fin avril 2020 contre 5,8% en février 2020. Selon le bulletin de l'INS, cette progression est due essentiellement à l'accélération du rythme des hausses des prix de l'alimentation à 6,2% contre 5,1% en mars. La hausse des prix de l'alimentation est expliquée par l'augmentation des prix des fruits de 13,6%, des poissons de 11,1%, des légumes de 9,9% et des confitures, miel, chocolat et confiserie de 8,8%. Les prix de l'huile d'olive baissent quant à eux de 13,6% en glissement annuel. L'inflation sous-jacente (hors produits alimentaires et énergie) reste stable à 7,0% contre 6,9% en février et 6,8% en janvier 2020. Les prix des produits libres (non administrés) augmentent de 6,5% contre 5,5% pour les prix administrés. Les produits alimentaires libres ont connu une augmentation de 7,1% contre 1,8% pour les produits alimentaires administrés. Au terme du mois de mai, les prix des produits de consommation courante sont amenés à suivre une courbe ascendante surtout après le mois Saint et les préparatifs de l'Aïd même si en mode de confinement partiel. La maîtrise du niveau général des prix à la consommation familiale dépendra dans les mois qui viennent de la reprise des flux des échanges commerciaux avec l'extérieur, notamment avec l'UE, de la disponibilité de l'offre et de la stabilité de la demande sur le marché local sans omettre l'intervention de régulation de la BCT. L'institution d'émission affirme qu'elle veillera au grain et qu'elle déploiera tous les efforts pour assurer la maîtrise de l'inflation. D'où son adoption d'une politique monétaire toujours restrictive aux yeux des économistes et investisseurs. Avec un taux directeur de 6,75% et qui reste très élevé par rapport aux pays qui ont choisi la voix de l'assouplissement monétaire. La FED a décidé par exemple de maintenir les taux d'intérêts dans une fourchette de 0-0,25% aussi longtemps que durera la crise du Covid. Plusieurs économistes appellent aujourd'hui la BCT à changer de paradigme et à rabaisser davantage son taux d'intérêt directeur. L'objectif étant d'assurer la liquidité nécessaire pour une économie exsangue. Il y a un arbitrage à faire entre l'inflation et la relance, entre la politique budgétaire et celle budgétaire.