Le président de la fédération a eu l'extrême amabilité et surtout, la magnanimité seigneuriale, de faire un voyage-éclair auprès de nos sélectionnés pour les galvaniser et leur rappeler les vertus du patriotisme. Pour sa part, le sélectionneur national continue de manifester un attachement sans faille à sa sélection et, même s'il nous quitte bientôt, il entretient toujours cette fibre dont on eût dit qu'elle en fait l'éternel sélectionneur national. Voilà comment les responsables du sport national souhaiteraient que nous nous exprimions. Des petits chefs-d'œuvre faisant dans la langue de bois, sur fond de fallacieuse ambivalence des mots, avec une bonne dose d'hypocrisie et un zeste d'allégeance en respect du culte de la personne. En cette ère de l'histoire du pays où la liberté d'expression fait des avancées notables, où l'on perce des tabous, où l'on dépersonnifie les institutions, deux parmi elles restent très personnifiées : la fédération et la sélection. Tout un service de presse (au sein de la fédération) pour prendre, le matin, la température du président fédéral, pour nous informer quant à la teneur de ses voyages, de ses entretiens... Mais, l'essentiel : ce qui se passe lors des réunions, les conflits d'intérêt, les coups-bas, les dissensions, les querelles et les enjeux, les communiqués ne fusent plus. En fait, tout procède, plutôt tout vient de cette « malformation congénitale », dans les facettes de la démocratie : le scrutin de liste. C'est le pire des scrutins. Le pire des choix. Une espèce de cheval de Troie : on n'en voit que la forme et on ne sait pas ce qu'il y a à l'intérieur. Mais la caution essentielle, la caution par excellence, dans ce genre de scrutin reste la personne (et non pas vraiment le profil) du chef de liste. C'est sur ce point précis que devrait se focaliser le débat. Mettre au point le profil idoine, c'est-à-dire, pour une fédération de football, un technicien ayant une envergure sociale, un vécu dans le domaine et qui soit loin des considérations politiciennes. Bien entendu, ça ne doit pas être un électron libre, non plus... Nous avions fondé beaucoup d'espoir sur l'équipe de M. Sioud et croyions pouvoir enfin nous réjouir de disposer d'une équipe de choc. Mais au fur et à mesure que s'égrenaient les échéances, que les conflits devenaient insolubles, que le championnat dérapait et que la violence dévorait nos gradins, nous en arrivâmes jusqu'à regretter l'équipe d'Ali Labiadh !!... Et nous eûmes même la nostalgie des années Ben Ammar. Maintenant, tous les Tunisiens veulent savoir où nous allons. Et c'est d'autant plus impérieux que l'arbre (Lemerre) ne va plus cacher la forêt. Car, pour garder (ne serait-ce que pour quelques heures encore), un homme qui déclare à la face du dépit national : « Et alors, et même si la Tunisie ne se qualifiait pas pour la CAN, ce ne serait pas la première fois et ce ne serait pas la fin du monde », eh bien, il faut avoir des choses à se reprocher. Ou, alors, des petits privilèges à sauvegarder. Or, que dit Cocteau : Quand il y a le feu dans la maison qu'est-ce que vous emporteriez (sauveriez), en premier ? Le feu, parbleu ! Désolé MM. les fédéraux : les petites piqûres de morphine, (comme la victoire sur les Seychelles), ne prennent plus. Et Cuelho devrait faire attention à ce qu'il fera et à qui l'entourera. Parce qu'il n'a pas droit à un parapluie. C'est fini.