That's the question qu'il serait peut être ironique et maladroit de poser en anglais pour évoquer l'utilité de la francophonie dans le monde. A l'issue de chaque sommet, la même question revient : ça sert à quoi ? Ce n'est pas un procès intenté à la francophonie, c'est une occasion pour que cette organisation, qui compte 128 millions de francophones réels, capables de parler couramment le français et 72 millions de partiels, s'affirme et s'impose. En tant que quoi ? En tant qu'organisation linguistique et culturelle ou en tant qu'organisation politique, ou les deux ? Des voix se sont élevées au 12ème Sommet de la francophonie à Québec en faveur d'un recentrage de l'organisation sur la défense de la langue de Molière, craignant une dérive vers une organisation politique réduite à une « ONU bis sans moyens » qui s'intéresse à tout mais qui ne réglerait rien et qui négligerait sa raison d'être. Dans ces deux fonctions, la francophonie est dépassée. Même le français est en perte de vitesse. Il est la 9ème langue parlée dans le monde derrière le chinois, l'anglais, l'indi, l'espagnol, le russe, l'arabe, le bengali et le portugais. Sur le plan politique, quelle est l'importance de cette organisation créée en 1968 sur l'échiquier mondial ? Il ne faut pas que le rôle de cette organisation qui regroupe 53 pays sur les 5 continents soit réduit à néant. Le monde francophone doit sortir de sa torpeur et de son immobilisme sur la scène mondiale. C'est à la France de montrer la voie pour que la voix de cette organisation soit entendue. Il faut faire en sorte que cette organisation devienne un partenaire écouté et respecté à l'instar de toutes les autres organisations internationales et régionales. Il ne s'agit pas de défendre mordicus la langue française qui est aussi la 3ème langue du web après l'anglais et l'allemand, il s'agit de donner à la francophonie son poids réel. Reste à savoir si la francophonie est une priorité ? Cet espace francophone doit-il être réduit à un rôle assez réducteur de défense uniquement de la langue de Molière ou doit-il imposer ses idées à un monde qui bouge ? La défense du français n'est pas du tout en contradiction avec des choix politiques forts visant à l'émergence d'un multilatéralisme plus équilibré, plus solidaire. En Tunisie, on croit fermement à tout ce qui peut contribuer à édifier un monde où prévalent stabilité, paix, tolérance, ouverture, dialogue et solidarité. Cet espace francophone peut et doit être le reflet de toutes ces valeurs nobles tout en préservant sa vocation d'être surtout un instrument efficace de fructueuse coopération entre ses membres. La francophonie doit épouser son temps et faire mieux entendre sa voix. Elle a les moyens et la volonté d'être partie prenante dans ce grand jeu où, crise financière mondiale oblige, de nouvelles règles sont en train d'être définies.