Toute l'histoire d'Umberto Eco « Le nom de la rose », magistralement portée à l'écran avec le même titre que le livre et superbement interprétée par Sean Connery, tourne autour du rire. Des moines franciscains sont trouvés morts : qui dans son lit, qui dans sa baignoire etc... Morts mystérieuses donc, et l'Eglise centrale dépêche, un moine Sean Connery pour y enquêter. C'était la pire époque de l'obscurantisme chrétien. Là où la chasse aux sorcières conduisait des innocentes sur les bûchers, pour les brûler vives. Pourquoi sont-ils morts ces moines ? Parce qu'ils ont réussi à accéder à la bibliothèque interdite et, particulièrement, à la traduction de l'ouvrage d'Ibnou Hazm « Taouk Al Hamama » là où l'on rit et que l'on fantasme sexuellement. C'est interdit de rire. Et alors, on a pris la précaution d'imbiber les feuilles du livre de cyanure. On tourne les pages en mouillant ses doigts de sa salive : Et c'est ainsi que les moines se faisaient empoisonner sans se rendre compte... Plus tard, les Almohades faisaient des massacres en Andalousie, brûlaient tous les ouvrages d'Averroes (Ibnou Rochd) et décapitaient les « rieurs » et les amuseurs. Dans nos sociétés arabo-musulmanes persiste encore une certaine suspicion contre le rire. Nous entendons dire, quelque part, dans des cercles austères que « le Festival du rire » serait malvenu, par les temps qui courent. Sauf que la manifestation a été placée sous le signe « Pour les enfants de Gaza ». Et de surcroît, on occulte la capacité du rire à faire sortir les nations de la sinistrose. Dommage que la télé ne se décide pas à repasser « Charlot ». C'est à travers « une vie de chien » que l'Humanité a pris acte de la condition humaine. C'est à travers le rire, en définitive.