Le dégel ? A priori, c'en a tout l'air. La rencontre entre Me Abdelwaheb El Béhi - chargé d'une médiation auprès des composantes de la Ligue Tunisienne des Droits de l'Homme - M. Mokhtar Trifi, président de la Ligue et Me Chedly Ben Younès, président de la section de Montfleury, marque un pas sur la voie du dialogue rompu depuis septembre 2005, c'est-à-dire, depuis l'annulation du congrès. La plus ancienne Ligue d'Afrique et du Monde arabe, avait, à sa naissance, cristallisé les espoirs. Elle avait tous les moyens de mener un combat d'avant-garde pour le raffermissement des droits de l'Homme en Tunisie. Mais avec les dérèglements d'ordre structurel, l'exacerbation des conflits de personnes et des conflits d'intérêts, prenant prétexte dans l'inextricable toile des sections rivales, voilà que cette Ligue se retrouve empêtrée dans un soupçon de combat d'arrière-garde. Le statisme institutionnel, l'endoctrinement, les feux croisés d'idéologies qui ont fait leur temps, en auront fait une structure composite politicienne servant, entre autres, de prétexte aux tribuns des droits de l'hommisme et aux idéologues récupérateurs à l'étranger. Cette Ligue est tunisienne. Ses soucis, ses préoccupations, sa charte fondatrice restent originellement tunisiens quoique drapés de l'universalité des valeurs des droits de l'Homme. Et ses problèmes sont typiquement tunisiens, avec ce scénario toujours reconduit : la structure est, d'une façon ou d'une autre instrumentalisée, juste ce qu'il faut pour la mise en place de garde-fous de la part du Pouvoir. Sans doute, le Pouvoir, justement, est-il tenu à une obligation de neutralité d'autant plus distante vis-à-vis des mouvances de la Ligue, que quelques composantes de celles-ci ont cru bon d'en appeler aux interventions étrangères, en dépit de la sacralité de la souveraineté. Et c'est dans cet esprit que la médiation dont a été chargé Me Abdelwaheb El Béhi a des chances d'aboutir. Ce n'est toujours que notre cuisine intérieure.