A Mareth, un nourrisson a été tué et jeté dans la rue ! Le rapport mensuel de l'Observatoire Social Tunisien ( OST ), relevant du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux ( Ftdes), pour le mois de mai, a mis l'accent sur un phénomène social récalcitrant, qui ne cesse de prendre de l'ampleur surtout dans un contexte socio-économique placé sous le signe de la crise. La violence ne se limite plus à des cas isolés. Elle prend plusieurs formes et manifestations qui reflètent la tension, l'incohésion et la psychose sociales. Le présent rapport s'attarde sur les cas enregistrés tout au long du mois de mai. Les gouvernorats de Kébili et de Gafsa sont en tête de liste en termes de violences, suivis de Tunis, Sidi Bouzid, Kasserine et Kairouan. Viennent en troisième position les gouvernorats de Médenine, Sfax, Sousse et Ben Arous. Les formes de violences enregistrées relèvent de trois axes majeurs : la violence politique et institutionnelle, la violence sociale élargie et la violence familiale. La torture perdure... Pour ce qui est de la violence politique et institutionnelle, la Sécurité nationale est pointée du doigt en tant que responsable de moult actions de violence à l'égard des citoyens, notamment dans les régions de Jendouba, Sidi Bouzid, Mahdia, Kébili et autres régions. Il s'agit essentiellement de condamner les actions de violence et de torture infligées aux personnes en état d'arrestation. Le cas d'un suspect arrêté à Sidi Bouzid et décédé quelques heures après son arrestation suite à la torture en est le grand exemple. Les parties officielles ont, certes, annoncé le suicide de la victime, une version qui n'a convaincu ni les proches du défunt ni la Ligue tunisienne des droits de l'Homme. La violence politique et institutionnelle apparaît, en outre, sous forme de jugements hostiles et d'accusations révélés par les internautes et partagés sur les réseaux sociaux contre les politiciens et les membres du gouvernement. Nombreux sont les Tunisiens qui considèrent que le gouvernement est incapable d'assumer ses responsabilités et de résoudre les problèmes; un avis qui devient le motif d'une violence morale et verbale hors pair. D'un autre côté, les cas d'intoxications enregistrés dans certains établissements scolaires, la mise en vente de produits alimentaires périmés et la détérioration des prestations sanitaires, aussi bien dans le secteur public que celui privé, constituent des manifestations de violence institutionnelle. Le présent rapport souligne l'ampleur de la précarité, de la marginalisation et du chômage ; des problèmes qui traduisent à la fois la violence économique dans une société en mal d'équité et de justice sociale. Pis encore, l'OST n'écarte pas la probabilité de voir ces problèmes s'aggraver au fur et à mesure que les indices de développement économique chutent. Violer l'innocence Pour ce qui est de la violence sociale élargie, elle dévoile nettement la fragilité et l'incohésion sociale dont souffre la société tunisienne. Le vol, le pillage et l'abus perpétrés sur les biens publics et ceux d'autrui gagnent en organisation et en tactique. Ils s'avèrent être plus des crimes organisés par des groupes que des actes individuels. La violence sexuelle constitue une autre forme de criminalité qui connaît une évolution alarmante. La dernière semaine du mois de mai a été marquée par des viols et des abus sur enfants. En effet, trois fillettes âgées de 4 à 8 ans ont été victimes de viols et d'abus sexuels à Regab, dans la région de Sidi Bouzid. Ce qui en dit long sur la crise des valeurs, la déficience en matière d'éducation sexuelle et sur la gravité des troubles comportementaux et psychologiques dont souffrent les abuseurs. Dans le Sud tunisien, la violence entre les grandes familles tribales «arouchet» se déclenche suite à des problèmes futiles pour entraîner des dégâts souvent colossaux. S'agissant de la violence familiale, elle apparaît sous plusieurs formes dont la plus flagrante, sans doute, est celle conjugale. Cette dernière se termine, dans bien des cas, par des crimes. C'est le cas d'une chanteuse populaire tuée à coups de couteau par son mari dans la zone de La Cagna à Tunis, et le massacre d'une autre épouse à La Manouba. A Mareth, un nourrisson a été tué et jeté dans la rue. La violence familiale se traduit, en outre, par des agressions souvent fatales qui en disent long sur la crise relationnelle entre les membres de la famille élargie et dont les causes reviennent souvent aux problèmes de d'héritage.