«Un gardien de but est le joueur qui se déplace le moins sur le terrain mais il est primordial qu'il sache se déplacer». Connu pour son charisme sur le rectangle vert, son aura et ses qualités de meneur, Chokri El Ouaer représente l'archétype de ce qui se fait de mieux dans les cages. Son palmarès, ses consécrations, les gratifications élogieuses qu'on lui a décernées en disent long sur sa parfaite connaissance des rouages de ce poste. Hissé au panthéon des portiers de l'histoire de notre pays, El Ouaer pense que le non-export actuel de nos gardiens relève d'une approche historique: «Nous n'avons pas de traditions bien ancrées à ce sujet. Cependant, à force de travail à la base, nous pouvons espérer atteindre le but recherché. Il faut tout d'abord dissocier les différentes approches; qu'elles soient psychologique ou théorique, à savoir la formation à la base des gardiens puis les ficelles du métier. En clair: l'une doit être le complément de l'autre pour façonner à terme des caractères. Tout ne doit pas être mécanique, robotique. Dès son plus jeune âge, le gardien n'est pas un simple fournisseur de travail. Il doit prendre du plaisir avant tout. Le côté humain doit prévaloir en début de cycle». Faire naître des vocations Il ne faut pas être obnubilé par la fabrication de Attouga, Lev Yachine, Dino Zoff, etc. Mais accompagner une émergence pour faire naître des vocations. Un gardien complet dans sa formation est un projet de grand portier. Et s'il atteint le haut niveau, il sera repéré et peut être transféré au sein du ghotta. Pour ce faire, il n'y a pas que le volet physique qui prime chez un portier. L'intelligence dans le jeu l'emporte souvent sur la masse musculaire. D'où l'importance de la communication volet apprentissage. Les volets physiologiques, psychologiques et pédagogiques sont aussi importants. Un projet de gardien de type international doit respecter certaines valeurs et vertus. Concourir à la construction de l'estime de soi. Lui inculquer l'esprit de compétition afin que les gestes élémentaires du gardien soient intégrés et assimilés correctement. Il ne faut pas être pressé. L'âge de maturité d'un gardien intervient tard par rapport aux joueurs de champ. Brûler les étapes ne donne rien de bon. Ici, la responsabilité des entraîneurs-éducateurs est engagée. Avoir les qualifications nécessaires pour former, entraîner, et veiller en particulier à ce que les portiers comprennent les transformations biologiques et psychologiques qui accompagnent leur processus de maturation. Nous ne sommes pas dans le monde de l'industrie. Il ne s'agit pas seulement de produire un gardien dans l'arène, réglé jusqu'à la moindre courbure de l'auriculaire. Il faut être patient avec eux. Car pour les jeunes portiers, gagner en expérience est indissociable du fait d'améliorer sa propre technique en attendant de devenir un vieux briscard. C'est tout une culture et un état d'esprit. Certes, le don est important. C'est inné. Mais le complément de formation est essentiel pour réussir au plus haut niveau. Le mental est tout aussi important. Il faut avoir de l'assurance. Pour le reste, tout dépendra de la qualité des répétitions prodiguées. Pour corriger la trajectoire d'un keeper, l'entraîneur des gardiens doit opérer via une démarche méthodologique pointue. Il doit connaître son métier sur le bout des doigts. Il y va de l'évolution d'un poste sensible qui a une incidence directe sur l'équipe. En sélection, feu Francesco Scoglio disait qu'il fallait dissocier entre joueur de champ et joueur de football. C'est aussi valable pour le poste de gardien de but. Car le gardien de but est certes le joueur qui se déplace le moins sur le terrain mais il est primordial qu'il sache se déplacer.