Par Mahmoud HOSNI MANQUE de vision, de réalisme ? Tous les politiciens, tant ceux au pouvoir que ceux de l'opposition, n'ont pas vu la lame de fond qui a failli remettre en question l'édifice démocratique et les acquis de la révolution. Non seulement il y a eu une sorte d'amnésie chez les politiciens quant aux raisons qui ont déclenché cette révolution, mais ceux-ci se sont envolés dans la stratosphère des joutes oratoires, des débats byzantins, des circonvolutions et des querelles de pouvoir, comme à Nida Tounès, pour perdre de vue les revendications de la Tunisie profonde, celle qui réclame emploi et développement. Aujourd'hui que le calme est presque rétabli, que le pays fait le bilan des dégâts et des arrestations, l'on cherche quelque peu à atténuer le mal en accusant les loubards de quartier, les malfrats, les contrebandiers et même des partis politiques d'avoir embrasé les mouvements de protestations, jetant ainsi l'huile sur le feu et profitant de la confusion générale. Certes, les contestataires n'auraient d'autre objectif que de faire entendre leur voix, leurs cris de détresse, sans plus. Mais il y a eu les malintentionnés qui ont voulu noyer le pays dans un tsunami pour réaliser leurs noirs desseins. Mais cela ne veut pas dire pour autant que la fièvre de la contestation n'a pas de raisons profondes ni de motifs légitimes. En fait, depuis janvier 2011, on a l'impression que le pays avance à côté des objectifs et n'en a pas réalisé beaucoup. Loin s'en faut. Lorsque la corruption ronge le corps social, lorsque le népotisme et le clientélisme ont encore droit de cité, lorsque des projets sont bloqués, non pas faute de fonds, mais de bonne volonté, lorsque des lois importantes ne sont pas encore votées, l'on croirait qu'il y a anguille sous roche et que ceux qui ont été élus ou ont pris le pouvoir ne se préoccupent point du baromètre des attentes des Tunisiens et de leurs aspirations. Les tentatives de replâtrage, plutôt que des remèdes radicaux, ne semblent pas répondre aux attentes des Tunisiens. Ce n'est pas en autorisant les citoyens à accomplir un travail (construction, démarrage d'un projet ou autres) dans un délai d'un mois, s'il n'a pas reçu de réponse de l'administration concernée, que les choses vont mieux s'arranger et que la vie deviendra plus facile. C'est plutôt en édictant des circulaires aux diverses administrations concernées, leur enjoignant d'accorder une suite dans un délai ne dépassant pas un mois. Sinon on verrait de nombreuses infractions commises sous l'alibi: j'ai attendu un mois et je n'ai pas eu de réponse. Ce n'est pas à la va-vite que l'on va résoudre la montagne de problèmes auxquels est confronté le pays. Et les exemples sont, à ce titre, nombreux. Annoncer des mesures urgentes ne peut pas signifier précipitation.