Une exposition de Jellal Ben Abdallah est un événement marquant en ce sens que l'artiste, un des tout derniers d'une prestigieuse lignée encore en vie, se fait rare en espaçant ses rencontres picturales. Le voici donc de nouveau remis dans le circuit, dans une exposition intitulée «Femmes, je vous aime!». Elle est originale dans la mesure où elle nous met en présence d'un artiste doublé d'un esthète qu'on croyait connaître mais qui se révèle aujourd'hui différent de par cette nouvelle tendance ou ligne suivie. L'éternel féminin toujours d'actualité Dans les années soixante, le public des galeries tombait en pâmoison devant ces magnifiques scènes d'intérieur de Sidi Bou Saïd, glorifiant la beauté de la femme, chrysalide enfermée dans le cocon des traditions. Un style nouveau qui ouvrait la voie à toute une génération d'artistes qui a suivi, avec plus ou moins de succès, la trajectoire tracée par Jellal Ben Abdallah. On se souvient encore du grand Alexandre de Paris qui a été subjugué et fasciné par les coiffures et autres arrangements astucieux de cheveux arborés par les modèles peints et qui ont inspiré le célèbre figaro dans ses nouvelles créations. A l'époque, ça a fait du ramdam! Aujourd'hui, les belles sylphides, légères et aériennes, éthérées et impalpables, ont cédé la place à des femmes fantômes, sans visage, qui semblent traduire la persistance de la conscience de leur anonymat. La technique a également changé. L'artiste a confronté la sophistication et la complexité de cette discipline et de sa palette riche et variée à la rudesse et à l'absence de raffinement et de l'élégance du kraft. Ce papier d'emballage, fabriqué à partir de pâtes à papier traité au sulfate, acquiert ainsi sa grandeur et ses lettres de noblesse. Vingt-cinq œuvres seront exposées. Elles en disent long sur cet univers de scènes narratives, tirées du quotidien de ces belles figures féminines, uniquement préoccupées à perpétuer, à travers des gestes rituels, la régularité et l'uniformité d'un monde où la fonction de la vie semble suspendue. Une torpeur synonyme de constance et de déni du temps qui fuit. Oublier, c'est somme toute gommer, effacer la mémoire. «Femmes, je vous aime!» est une confession intime, un aveu d'amour arraché à un homme, un esthète qui voue un culte excessif et exclusif à la beauté formelle de la femme. C'est également un témoignage à vif des sentiments qui remuent la pensée d'un monument de la peinture qui n'a pas encore dit son dernier mot. Le vernissage de «Femmes, je vous aime!» aura lieu ce jeudi 14 octobre, à 18h00 à la galerie Atrium, à Carthage.