«Lo'Jo arrive couvert de voyages, en route pour tous les chemins, les interstices, dans le parfum des capitales, dans le son de la pluie sous le chapiteau d'un vieux cirque tchèque ou bien derrière un feu de la pleine lune». Et leurs bagages ils les ont posés, cette fois, à Tunis, invités dans le cadre des Journées musicales de Carthage, qui prennent fin ce soir. Venus de très loin, les membre de ce groupe français, ont répondu présent à l'appel . Ce ne fut pas le cas, malheureusement, du public tunisien qui a opté, cette fois, pour la sédentarité. Peur de l'inconnu ? Manque de promotion (peu probable) ? Ou peut-être le mauvais choix de l'espace et de l'heure de la représentation? Qui sait ? Le fait est qu'ils étaient là mercredi dernier au centre culturel d'El Menzah 6 et qu'ils nous ont régalés avec autant de talent que de recherche musicale. Lo'Jo est un groupe de musique originaire d'Angers. Fondé en 1982 par Denis Péan et Richard Bourreau. Sa musique est caractérisée par un mélange de styles musicaux très variés. Cette diversité, qui caractérise ce groupe, lui vient de son nomadisme et s'est composée au fur et à mesure de ses voyages de par le monde. Avant l'entrée du groupe sur scène, on pouvait deviner (pour ceux qui ne le connaissent pas) cette richesse et cette diversité de la musique, car ici et là sur les planches, étaient posés violon, harmonium, kora, batterie, sampler... Une fois sur scène, ses membres Denis Péan (voix, piano, sampler, harmonium), Richard Bourreau (violon, kora, imzad), les deux sœurs Nadia (voix, percussions) et Yamina (voix, saxophone, percussions), Nid El Mourid, Kham Meslien (basse et contrebasse) et Franck Vaillant (batterie) entament un voyage de poésie et de rythmes. Aphorismes aux tonalités orientales et aux vibrations balkaniques, histoires de ports contées dans des grooves africains et poèmes sur l'origine du monde… D'une chanson à l'autre, Lo'Jo nous a saisis par l'acuité du mot et du son. Pour le morceau La chanson de la marine (l'album Cosmophone), Denis Péan a rejoint son harmonium, nous parlant de ces lieux de voyages et de rencontres, carrefours des destins… Les voix balkaniques des deux sœurs El Mourid, bercées par le son lyrique du violon ou de l'imzad de Richard Bourreau et fouettées par la batterie de Franck Vaillant, nous ont transportés dans les souvenirs de voyages de cette tribu angevine. A mesure que l'on changeait de morceau, on changeait d'instrument et de contrée et l'on ne s'est pas, une seule fois, ennuyé dans ce spectacle forain où la basse se mêlait au n'goni et les percussions au sampler. Après une heure de délectation détonante, Denis Péan nous a livré un poème sur l'origine du monde : «Un début fait d'esquisses de jardins zen…de pistils sans sacre ni printemps, un début avec, pas encore, du dernier verre au café du jour…», nous dit- il. La musique reprend avec trois morceaux à travers ces mélodies métissées, transcendant toutes les frontières et toutes les langues. Une musique humaine et généreuse qui, «pour un instant, pour un instant seulement», nous a menés vers un ailleurs, et on aurait aimé que ça dure ! Agréable découverte. Bravo Lo'Jo!