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Pour de nouveaux modes de développement «territoire-destination»
Point de vue : Tourisme
Publié dans La Presse de Tunisie le 01 - 06 - 2011


Par Jean-Mehdi Chapoutot (ex-directeur ONTT)
La gestion des crises constitue un enjeu majeur pour le tourisme, car rien ne doit arriver à celui qui est en vacances. La Tunisie a connu de nombreuses crises d'origine exogène dont la gestion a consisté à déployer des dispositifs de prise en charge de l'urgence. Aujourd'hui, notre pays vit une crise endogène qui met à mal l'image d'un pays sûr et stable et met en lumière le résultat de terrains de crise qu'il nous faut aborder de façon réaliste et volontaire. La situation qui prévaut est, en effet, une opportunité pour repositionner la destination.
Aussi, est-il important que l'ensemble des acteurs du tourisme prenne conscience que la Tunisie a besoin d'un tourisme s'inscrivant dans une nouvelle dimension spatiale, d'un tourisme agent de désenclavement des territoires de l'intérieur. Et à ce stade du débat, le gouvernement et les politiques sont à même de mener cette réflexion sur une restructuration en profondeur du tourisme dans notre pays.
Avec plus de 7 millions d'arrivées touristiques aux frontières et plus de 38 millions de nuitées en 2009, la Tunisie est une destination incontournable en Méditerranée. Au cours de cette même année, le tourisme international a généré pour notre pays une recette de 3.390 millions de dinars et le taux de couverture du déficit de la balance commerciale est de plus de 50%. Il représente 6% du produit intérieur brut et procure du travail à plus de 10% de la population active.
Depuis les années 70, la politique publique de développement touristique a été menée à partir du concept de «zone touristique». Cette stratégie a permis la mise en place d'un produit balnéaire qui a fait la force du tourisme tunisien. Au fil des ans, ce produit a été enrichi par la réalisation de golfs, de centres de thalassothérapie et par la multiplication des animations nautiques. Mais ce développement, qui a suivi un modèle de croissance forte reposant sur la valorisation du foncier par l'hôtellerie, a produit des stations et des équipements dont l'offre, banalisée et standardisée, ne répond plus aux attentes de la demande internationale.
Aussi, le tourisme tunisien subit-il une érosion certaine depuis une dizaine d'années et il reste beaucoup à faire pour améliorer notre positionnement face à une concurrence de plus en plus vive en modernisant le secteur du tourisme, mais surtout en faisant en sorte qu'il soit enfin reconnu pour ce qu'il devrait être, c'est-à-dire une activité économique florissante, facteur d'équilibre régional, de cohésion sociale et de développement durable.
Il est donc urgent de clarifier le rôle de l'Etat et sa relation avec un secteur privé «assisté» dont une partie des professionnels considère l'offre hôtelière comme une économie de rente et d'établir de nouveaux modes de développement du tourisme.
À cet effet, deux idées fortes doivent orienter cette nouvelle vision de l'activité touristique‑:
• Le patrimoine, dans son sens le plus large, doit être le moteur de développement en synergie avec l'ensemble des secteurs socioéconomiques;
• A l'unicité de la destination «Tunisie» doit se substituer une Tunisie plurielle avec des «territoires-destinations»
Il ne s'agit en aucun cas de déconcentration des activités touristiques, ni de leur management organisationnel, mais de remplacer le concept de «zone touristique» par des «territoires-destinations», permettant ainsi à des espaces légitimes d'acquérir un statut d'intégration des actions définies au sein des ministères concernés par le développement touristique, et ce, compte tenu de la transversalité qui est spécifique au tourisme. Cette stratégie passe par la différenciation, l'identification et la mise en place d'une dynamique de développement de ces «territoires-destinations».
Différenciation
Le tourisme est devenu un système de plus en plus complexe. Il requiert des méthodes de connaissance spécifiques et innovantes dans la mesure où le tourisme évolue et que le touriste est de moins en moins captif. Aussi, les grands pays touristiques s'appuient-ils sur des destinations plurielles. Un touriste asiatique, américain ou d'une autre nationalité ne va pas en France ou en Italie; il visite Paris, les châteaux de la Loire ou la côte d'Azur, la Toscane, Venise ou la Sicile. Il visite des lieux où le présent rappelle le passé et où le futur est déjà présent.
Le touriste, en effet, est un consommateur d'espace et de temps, ce qui n'est pas le cas en Tunisie. Le «continuum espace-temps du touriste» est donc à explorer, en se rapprochant beaucoup plus du vécu du touriste et de l'offre touristique sur laquelle il interagit.
C'est pourquoi les potentialités patrimoniales doivent guider l'action publique dans la différenciation des «territoires-destinations» et leur délimitation. Ainsi, il serait possible de définir six «territoires-destinations», caractérisés à partir des atouts, des offres et des produits qu'ils auraient à proposer : le Nord-Ouest, Tunis et sa région, le littoral oriental, le Centre-Ouest, Jerba et le Sud.
Les «territoires-destinations» pourraient décliner leurs objectifs au regard de leurs spécificités. Il ne s'agit pas d'établir une simple compilation des atouts comme cela a déjà été réalisé, mais d'apporter un éclairage sur la manière dont les objectifs de développement peuvent être atteints. Leur compétitivité passerait par l'attractivité, le partenariat, le développement raisonné et la conservation des potentialités évolutives.
Identification
Afin de valoriser son potentiel touristique, le «territoire-destination» doit se doter d'une marque, d'un label territorial, «Chêne-Corail» pour le Nord-Ouest par exemple, et dont l'objectif est la reconnaissance du «territoire-destination» afin de donner un contenu sociétal, culturel et environnemental à l'offre patrimoniale. Pour les touristes, c'est une lisibilité qui est un gage de sécurité et de qualité. Pour les acteurs du secteur, c'est une démarche de partenariat qui leur permet de bénéficier des effets de synergie et des économies d'échelle.
Le label territorial appelle à la mise en place de bonnes pratiques qui correspondent à un «contrat de base». Elles visent à définir le minimum requis et attendu par les clients de cette offre pour qu'elle puisse être considérée éligible à être consommée et faisant partie du produit du «territoire-destination». Ce «contrat de base» sur les prestations fournies devrait donner des possibilités d'interactions et surtout permettre une transversalité des métiers avec un fonctionnement partenarial entre les différents fournisseurs et prestataires, d'où l'importance de l'instauration d'un guichet unique.
Ces options nécessitent le remplacement du commissariat régional au tourisme par une structure à même de définir une stratégie, mais également une progressivité et un pilotage assumés des projets touristiques.
En effet et compte tenu d'une «gouvernoralisation» très forte, limitant les collaborations inter-régionales, des logiques interdépartementales devraient être développées pour permettre une vision plus large et une meilleure organisation du développement touristique. C'est dans cet esprit qu'il serait nécessaire de mettre en place dans chaque «territoire-destination», une société d'économie mixte territoriale (SEMT), outil d'intervention d'intérêt général. Elle permettrait au secteur public d'aménager, d'équiper mais également d'aider à la création de sociétés privées. Ses fondamentaux seraient axés sur:
• La mise en valeur des atouts territoriaux;
• Le management territorial, à savoir les pratiques par lesquelles la SEMT essaierait d'accroître l'attractivité du «territoire-destination» dont elle a la charge par la mise en place d'incitations (fiscalité et aides) pour encourager l'initiative privée;
• Le diagnostic territorial qui permettrait de mettre en place les différents projets touristico-économiques.
Elle serait la parfaite synthèse entre les valeurs du service public (recherche de l'intérêt général, souci de la cohésion sociale, esprit de probité, vision à long terme)et les valeurs du marché et de l'entreprise (priorité au client, recherche de la meilleure performance, création de valeur pour les actionnaires).
Dynamique de développement
Le tourisme est un puissant agent de transformation de l'espace, c'est pourquoi l'aménagement dans le «territoire-destination» devrait tenir compte de la pluralité des acteurs, publics et privés, de la diversité des espaces, de la multiplicité des projets économiques et du développement durable. Le rôle de l'Etat serait alors régulateur dans les régions du littoral, en investissant dans la gestion du tourisme et développeur dans les régions de l'intérieur.
Aménagement et développement durable
Le développement durable est l'expression d'une préoccupation générale à l'égard du présent, et du futur, pour préserver l'environnement, le cadre de vie et les ressources naturelles. Aussi, l'aménagement du «territoire-destination» devrait-il allier les actions de protection à des actions d'équipement, des actions curatives et des actions d'incitation. La prise en considération de toutes ces composantes permettrait de remettre le «territoire-destination» dans l'actualité parce qu'il est porteur de sens, d'histoire, de particularités et d'humanité. Au-delà des potentialités régionales, ce sont les dispositifs touristiques (diversification des modes d'hébergement, multiplication des animations, nouvelles figures professionnelles susceptibles de créer de nouvelles compétences professionnelles dans le domaine du tourisme, etc.) qui permettront de produire des lieux reconnus comme «territoire-destination»
Marketing territorial
Le système intégré de marketing territorial s'attache à la promotion d'un territoire durable et de qualité, en le protégeant et en valorisant son identité culturelle. Il s'agit donc de campagnes promotionnelles centrées sur la mise en valeur des spécificités territoriales et de leurs atouts distinctifs. La valorisation du «territoire-destination» passerait ainsi par la création de nouvelles perceptions des offres touristiques. Elle sera fonction de nouvelles tendances d'évolution de la demande comme la recherche éclectique, en attente de toujours plus d'interactions avec l'offre touristique, et ce, jusqu'à la possibilité de construire un véritable produit «sur mesure» tel que le «territoire-destination» serait à même de le proposer.
C'est pourquoi il s'agira non plus de vendre des lits, mais l'ensemble des composantes du «territoire-destination» qui devraient donc être dynamiques, modelées et présentées comme autant de produits pour autant de clientèles d'où l'intérêt du développement d'un tourisme de niche. C'est pourquoi le message devrait être destiné aux différentes clientèles : clientèle européenne, clientèle maghrébine et clientèle nationale pour qui, il y aurait lieu de mettre en place des «chèques vacances» qui, dans certains «territoires-destinations», le Nord-Ouest ou le Sud-Est par exemple, pourraient être bonifiés.
Financement
Dans une démarche d'intérêt général, le capital de la Société d'économie mixte territoriale devrait être majoritairement public, tout en associant des partenaires économiques et financiers. Le rôle de l'Etat devrait rester prépondérant, mais varié en fonction des besoins. Ainsi, dans les «territoires-destinations» littoraux, l'aide de l'Etat devrait être limitée aux seuls aspects immatériels, en particulier dans le cadre du financement du programme de mise à niveau des hôtels.
Le financement des «SEMT» pourrait être garanti par :
• Un fonds d'investissement du «territoire-destination» (FITD) qui remplacerait le fonds de protection des zones touristiques. L'objectif du FITD serait de financer les infrastructures touristiques; d'apporter un surcroît de financement pour des projets touristiques (restauration, etc.) sous forme de fonds propres, susceptibles eux-mêmes de favoriser la levée de crédits bancaires; d'envisager le développement de microcrédits personnels garantis au bénéfice de la population qui n'a pas droit aux circuits traditionnels de financement pour défaut de garanties. Ce serait donc une inclusion financière pour de petits projets induits par et pour le tourisme (loueurs de VTT, etc.) et qui ne dépasseraient pas les 5.000 dinars. Le particulier, qui en bénéficierait, serait accompagné par la SEMT dans sa démarche d'exploitation.
Un fonds de compétitivité des «territoires-destinations» (DCTD) qui remplacerait le fonds de développement de la compétitivité, ce qui paraît aujourd'hui une nécessité impérieuse pour dépoussiérer les dossiers relatifs à la promotion régionale.
Tous les intervenants, bénéficiant du label territorial et ceux concernés par l'activité touristique, devraient participer à l'alimentation de ces fonds.
• Une contractualisation des opérateurs du tourisme (hôteliers, agences de voyage) avec les SEMT, et ce, dans le cadre des excursions. Il s'agirait d'un dispositif contractuel pour le développement des régions intérieures en complémentarité avec celles du littoral. Ce partenariat, formalisé par la signature d'un contrat, présente de nombreux avantages dont l'identification de priorités d'interventions entre les différents acteurs du privé et du public. Cette contractualisation devrait être un outil au service de la compétitivité des régions touristiques qui favoriserait l'essor des territoires.
Ces propositions, qui devraient faire l'objet de débats, ont pour objectifs de concentrer les moyens d'intervention publique, d'accompagner les projets de développement dans une logique de marchés et/ou dans une logique à vocation sociale, de constituer des territoires de développement touristique nouveaux, en complémentarité avec ceux du littoral et, enfin, de renforcer l'attractivité des espaces définis comme «territoire-destination». Outre une offre de loisirs plus riche et plus dense, elles permettraient un rééquilibrage territorial de l'offre.


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