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Construire une union pour affronter les problèmes du pays
Entretien avec : Saïd Aïdi, membre du bureau exécutif d'Al Joumhouri
Publié dans La Presse de Tunisie le 02 - 02 - 2013

L'homme qui répond à nos questions a été aux responsabilités sous le second gouvernement de Mohamed Ghannouchi, ainsi que celui conduit par Béji Caïd Essebsi. Ce polytechnicien, jusqu'avant la révolution, a mené sa carrière dans le privé, à l'international. Aujourd'hui, rallié au parti Al Joumhouri — depuis sa création à partir de trois formations — l'ancien PDP, Afek Tounès et le Parti républicain — il a été mêlé de près aux efforts qui ont été couronnés mardi dernier par la création d'une nouvelle alliance regroupant Nida Tounès, Al Joumhouri et Al Massar... Quelle est son analyse du contexte actuel ? Il nous en parle !
La nouvelle alliance qui a été mise en place - l'Union pour la Tunisie - a une importance stratégique afin d'assurer les conditions normales de l'alternance. Il fallait rompre avec l'état de morcellement de l'opposition... Quelles ont été les difficultés qu'il a fallu surmonter ?
Comme vous le dites, cette alliance est pour nous stratégique. C'est un moyen, pas un but. La difficulté a été d'avoir la même compréhension du périmètre de cette alliance. C'est une alliance politique et électorale, et la plus grande difficulté, c'est que les fondateurs de cette alliance, à savoir Nida Tounès, Al Joumhouri et Al Massar sont eux-mêmes des partis en structuration. Il faut trouver le bon équilibre entre la construction des partis - qui gardent leur autonomie et qui ont leurs spécificités - et, d'autre part, un projet commun, une vision commune par rapport à la nécessité d'unir les forces progressistes et démocratiques. Ensuite, les difficultés, c'est comme dans toute alliance : arriver à gérer les éventuels différends. En tout cas, nous, au parti Al Joumhouri, sommes passés par un processus démocratique, avec une première phase où on a validé, au niveau de notre comité central, le principe de la constitution du front le plus large des forces centristes, puis, dans un second temps, on a validé, toujours au niveau du comité central, le principe de l'alliance...
C'est une démarche que vous préconisez pour le fonctionnement de cette nouvelle alliance ?
Non, chaque parti a ses spécificités. Encore une fois, dans des partis en construction... Certains voulaient une alliance politique, d'autres voulaient une alliance politique et électorale. Mais je pense que l'objectif était le même avec des terminologies qui n'étaient pas les mêmes. Quand on discutait sur le principe de travailler sur les programmes communs, sur les procédures d'investiture pour les futures campagnes, cela était admis par tout le monde. En revanche, au niveau de la terminologie, décider de la question de savoir si telle chose relève d'un accord politique ou d'un accord électoral, c'est là qu'il y avait quelques différences d'appréciation, d'interprétation... Mais ensuite, quand on regarde : c'est une réunion de deux heures, mardi matin, qui a permis de lever toutes les ambiguïtés et d'arriver à cet accord qui est à mon avis historique pour assurer les conditions de l'alternance dans l'avenir. Il n'y a donc pas eu tant de difficultés. C'est le temps politique qui demande cela. Quand on prend un trimestre pour concrétiser ce projet : un trimestre, dans le temps politique, c'est très court !
On parle d'alliance électorale et politique. Certains considèrent qu'il s'agit d'une entité «hétéroclite». D'autant qu'on évoque l'arrivée d'autres formations, qui ont également leurs références idéologiques. Est-ce que cette alliance tiendra au-delà des élections ? Est-ce qu'il n'y a pas sur le long terme, un risque d'enlisement dans des divergences de vue?
Toute alliance comporte des risques. Maintenant, le projet n'est pas exclusivement électoral... n'est pas un projet «anti-» qui que ce soit : c'est un projet pour construire. Il regroupe des formations qui ont les mêmes valeurs, sur le plan aussi bien politique que socioéconomique, avec des nuances ou des sensibilités. Et c'est ce qui fait aussi la force de cette alliance : pouvoir sublimer, pouvoir combiner ces différences et gérer les éventuels désaccords qui pourraient survenir. Donc, le principe n'est pas un objectif exclusivement électoral, c'est plutôt de pouvoir construire une union des forces progressistes et démocrates, qui puisse demain résoudre les véritables problèmes de ce pays, les véritables problèmes qui ont mené à la révolution : réformer les institutions de l'Etat, établir un Etat de droit, s'appuyer sur la constitution telle qu'elle arrivera à structurer l'Etat et envisager les problèmes sociaux et économiques de ce pays — le chômage, l'équité sociale, le développement économique... Toutes les formations ont la même vision quant au rôle de l'Etat, par rapport à l'éducation, la santé... On assume et on affirme : on est un front politique qui, demain, présentera un programme qui reflètera nos convictions : on croit à l'Etat de droit, on croit à la justice, à la liberté, à l'équité sociale, à la liberté d'entreprendre. Ce n'est donc pas une composition hétéroclite, comme vous le dites. C'est une entité homogène, avec des sensibilités différentes.
Comment voyez-vous la période qui vient... Et que représente pour vous, et pour l'alliance qui vient d'être créée, l'éventualité d'une dislocation de la Troïka : une opportunité... ou un danger ?
Après quatorze mois aujourd'hui, force est de constater l'échec de la Troïka, que ce soit sur le plan social ou économique ou, même, sur le plan moral. C'était contenu dans la manière dont cette Troïka s'est composée. Vous parliez «d'hétéroclite» : c'est la Troïka qui est totalement hétéroclite! Elle repose davantage sur une logique de distribution de postes et de prise de pouvoir pour le pouvoir, que sur la volonté de porter un projet et de résoudre les problèmes des Tunisiennes et des Tunisiens. La période qui est devant nous comporte beaucoup de risques. L'échec de ce gouvernement et ce qu'on entend aujourd'hui au sujet du remaniement n'est pas du tout à la hauteur des enjeux et des difficultés que vivent les Tunisiens. Ce remaniement ressemble beaucoup plus à du rafistolage qu'à une véritable transformation. Au niveau du gouvernement, on a beaucoup plus besoin de changer d'esprit que changer autre chose. Et l'esprit du gouvernement n'est pas en train de changer. On observe une certaine forme de chantage entre les membres de la Troïka elle-même, voire entre des membres à l'intérieur même de l'un ou l'autre des partis composant la Troïka. Ce qui n'est pas à la hauteur des enjeux.
Pour la période qui vient, il faut qu'on arrive à assurer la transition démocratique dans notre pays jusqu'à ce qu'on arrive à des élections, et cela ne peut se faire que par le dialogue, quels que soient les partis. Nous, au parti Al Joumhouri, mais avec nos partenaires maintenant, appelons à ce dialogue national, à cette unité... Ce qui ne veut pas dire que nous sommes tous dans la même mouvance : c'est de défendre l'unité du peuple tunisien, qui a toujours été uni. Et le plus grand danger qui plane aujourd'hui sur la Tunisie, c'est ce clivage — ce refus de l'autre, ce refus du dialogue, cette violence politique qu'on a observée — et qui est le fait de la Troïka. D'ailleurs, à l'annonce de la Constitution, la première réaction a été très agressive de la part de certains membres de la Troïka.
Il y a des dangers par rapport à la transition démocratique, des dangers sécuritaires...
J'insite sur le point de l'éventualité d'une dislocation de la Troïka : qu'est-ce que cet événement précis impliquerait pour vous ?
La Troïka n'existe plus. Quand on regarde l'état dans lequel se trouvent deux des composantes de la Troïka et l'attitude critique qu'elles ont à son égard, pour moi cette entité n'existe plus depuis plusieurs mois aujourd'hui. On est maintenant dans une logique de fuite en avant... Quand on entend le discours de monsieur le président de la République, ou certains membres du parti Ettakatol, la Troïka ne tient plus qu'à une logique de pouvoir et de personnes, et non plus à une logique de projet politique ou de réussite de la transition démocratique. Donc, la dislocation de la Troïka, est aujourd'hui effective. Maintenant, est-ce qu'un des partis va sortir : peut-être... Cela amènerait de la clarification. Ce n'est pas un danger...
Pas une opportunité non plus ?
On ne le voit pas comme cela ! On ne bâtit pas un projet politique contre qui que ce soit. On a des adversaires, bien entendu, au moment d'une campagne électorale. Mais aujourd'hui, notre souci est de se rapprocher des citoyens, d'être critiques quand il faut être critique à l'égard du pouvoir en place, de construire un projet au sein du front qui a été constitué avec Nida Tounès et Al Massar... On ne bâtira pas un projet viable sur l'échec des autres. On veut représenter l'alternative positive, l'alternative de l'espoir. Bien entendu, nos bras restent ouverts aux personnes qui partagent nos valeurs : valeurs de justice, de démocratie, d'équité sociale, de modernité... Mais souhaiter l'échec de l'autre, ce serait vraiment une faute.
Al Joumhouri hérite en grande partie de l'héritage de l'ancien PDP. Donc d'un passé militant et de lutte. Que vous inspire ce passé et quelles sont les raisons de votre choix de le rejoindre ?
Le PDP, c'est une fierté au sein d'Al Joumhouri, comme les autres composantes sont aussi la fierté d'Al Joumhouri... Le passé militant du PDP est une force et une fierté pour tous les militants, au sein d'Al Joumhouri. Ce qui est extraordinaire, c'est que, aujourd'hui, il n'y a plus les «ex» de ceci ou de cela : c'est un ensemble homogène, organisé en sensibilités qui sont réellement transverses... Les personnes sont portées par des valeurs et des projets, et non par des appartenances ou des accointances à des personnes. La mayonnaise a pris, comme on dit. Il faut qu'on se déploie sur le terrain : on en a conscience. On n'a que neuf mois d'existence aujourd'hui. Je suis persuadé que ce parti représente un parti du présent et un parti de l'avenir, en s'appuyant sur les valeurs passées : le militantisme du PDP...
La révolution tunisienne a inauguré dans le monde arabe un modèle qui engage l'Islam sur la voie de l'expérience démocratique : ce qui est de nature à créer une rupture dans l'histoire du monde arabe... Comment voyez-vous cela ?
Le risque, en ce moment, est qu'une composante de la société essaie de s'accaparer des valeurs qui appartiennent à tout le monde. On est, pour notre immense majorité, musulmans. La Tunisie est de culture musulmane. Et on a vécu, pendant des décennies et des siècles, apaisés avec cela. Il est vrai que, dès que l'Islam est devenu un projet politique, il y a eu plus que des crispations : il y a des tensions et des exactions qui ne sont pas acceptables. La révolution n'a pas été menée par les islamistes : elle a été menée par des jeunes qui revendiquaient la dignité, le droit au travail et à l'inclusion sociale... Il ne faut pas que les islamistes s'accaparent cette révolution : ce serait une autre condition d'échec si on ne la plaçait que sous cet angle-là. Je pense qu'il faut avoir un apaisement des différentes composantes de la société tunisienne avec, effectivement, un Islam moderne, qui a toujours été de tolérance dans notre pays... Et ne pas utiliser la religion à des fins politiques et politiciennes : ce serait diviser le peuple tunisien. De quel droit ? Ils ne sont pas plus musulmans que vous et moi...
Maintenant l'exemple tunisien, c'est effectivement une chance historique de pouvoir démontrer au monde qu'Islam et modernité ne sont pas en contradiction, ni Islam et démocratie : que ce sont des valeurs dont on est fiers que chacun vit au sein d'une société apaisée et compatible avec un avenir radieux pour notre pays.
Ce dont je suis personnellement certain, c'est que si la Tunisie réussit sa transition démocratique, si elle réussit à avoir une société apaisée qui allie nos valeurs de tradition à celles de l'avenir, alors il y aura des chances de succès pour ce qu'on appelle le «Printemps arabe». Par contre, si la Tunisie échoue, j'ai la conviction que les autres pays échoueront également.


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