Par Abdelhamid Gmati Le terrorisme qui se manifeste régulièrement préoccupe de plus en plus les Tunisiens. Certes, le chef du gouvernement provisoire, Ali Laârayedh, affirme dans une interview accordée, dimanche, à une agence de presse étrangère que «la Tunisie a triomphé du terrorisme». Son ministre de l'Intérieur (c'est-à-dire lui-même par personne interposée), lui, met en garde contre d'autres attaques et assassinats dans les jours à venir dans plusieurs régions du pays. De fait, en fin de semaine, quatre postes de police ont été attaqués dans la Médina et aux alentours de la capitale. Nos soldats, eux, continuent à se battre au Chaâmbi depuis quelques mois déjà. Ansar Echaria menace de s'en prendre aux forces de l'ordre. La Lnpr appelle à fusiller les responsables des syndicats de la police. L'Ugtt appelle les Tunisiens à s'unir pour faire face au terrorisme. Bref, le terrorisme est bien présent et le chef du gouvernement le reconnaît lui-même lorsqu'il promet, dans la même interview, de continuer la lutte contre le terrorisme. L'an dernier, alors qu'il était ministre de l'Intérieur, il prétendait que les groupes qui s'entraînaient au Chaâmbi n'étaient que des sportifs. Cette réalité établie, il y a lieu de s'interroger sur les racines de ce mal qui nous était étranger. Le mufti de la République, Hamda Saïd, croit pouvoir nous révéler les causes des récents événements dramatiques. Pour lui, le terrorisme a commencé lorsque le président Bourguiba a retiré aux femmes leurs voiles. Mais il a omis de nous donner la liste des actes terroristes commis. Il faudra attendre le milieu des années 80 pour noter des attaques au vitriol et à la lame de rasoir contre des personnes innocentes comme l'imam du Kram ou contre des jeunes filles à la plage. Ces attaques avaient été commises par des islamistes. Au début des années 90, des bombes ont été utilisées dans des hôtels et dans un local d'un parti, faisant plusieurs victimes innocentes. Ce qui avait valu à leurs auteurs, des islamistes, des condamnations, parfois lourdes, à des peines de prison. Et puis les événements de Soliman en 2008. Les actes terroristes étaient rares et émanaient tous de la mouvance islamiste. Le président de l'Association Dar Al Hadith, l'imam Ferid Béji, a dénoncé les propos du mufti, estimant par contre que « la propagation du terrorisme en Tunisie trouve son origine dans la nonchalance du gouvernement face au terrorisme, les prêches des prédicateurs wahhabites et les mosquées accaparées par les salafistes jihadistes ». De fait, le terrorisme est intimement lié à ce qu'on appelle l'islam politique. Le terrorisme qui se manifeste dans plusieurs endroits dans le monde est un terrorisme islamiste. Et il est présent là où est présente une entité politique islamiste. Au Pakistan, en Afghanistan, au Soudan, en Libye, au Mali, en Egypte, en Somalie, en Tunisie, le terrorisme est présent et encouragé. C'est un mode de gouvernement destiné à terroriser les populations pour mieux consolider leur pouvoir. En Tunisie, on sait tous la protection dont jouissent les salafistes et les milices comme les LPR qui ont semé et pratiqué la violence impunément. On en est encore à identifier les auteurs des assassinats de nos hommes politiques, de nos soldats, de nos policiers et gardes nationaux. Walid Zarrouk, secrétaire général du Syndicat des prisons, a révélé, il y a deux jours sur une chaîne de télé, une déclaration de l'ancien ministre de la Justice et membre d'Ennahdha, Noureddine Bhiri : «Si vous, vous avez 50.000 policiers, nous, nous avons 100.000 kamikazes». Le terrorisme, idéologiquement lié aux islamistes, s'est nourri d'une conjoncture internationale et nationale qui lui a fourni les moyens militaires, financiers et humains et s'est étendu grâce à un pouvoir politique islamiste qui l'a couvert et lui a permis de se structurer et de se renforcer. Le Ministre de l'Intérieur a pointé du doigt le mouvement Ansar Echaria comme responsable des événements de Goubellat. On nous sort d'ailleurs diverses appellations à ces groupes terroristes. Ne nous y trompons pas : Ansar Echaria, salafistes, jihadistes, Qaïda, AQMI, c'est «El Haj Moussa, Moussa El Haj» (Blanc Bonnet, Bonnet Blanc), la même nébuleuse terroriste liée à l'islam politique. Là se trouvent les racines du mal.