L'après-réveillon, qui a tôt débuté avec des arrestations et des saisies à Sidi Bouzid et à Kasserine, est venu prouver que les terroristes ne sont pas près de lâcher prise. La partie entre le chat et la souris promet d'être encore plus longue. Gare donc à la distraction ! «Ce n'est que partie remise», sous-titrions-nous sur ces mêmes colonnes, au lendemain du pourtant superbe «sans-faute» réussi par nos forces de sécurité intérieure et de l'armée lors du dernier réveillon. Et c'est vrai. D'autant plus vrai que, quelques heures seulement après l'avènement du Nouvel An, des arrestations de terroristes ont été, coup sur coup, opérées à Sidi Bouzid et à Kasserine et traduites par d'importantes saisies (armes, portables, produits alimentaires, tenues de combat, draps, argent, véhicules...). Il n'y a donc pas photo : les jihadistes ne sont pas près de lâcher prise ou de baisser pavillon, confirmant ainsi les affirmations sans cesse réitérées, depuis deux ans, par La Presse quant à leur capacité de résistance et de nuisance, en dépit des multiples revers qu'ils ne cessent d'essuyer. Sur de bonnes pistes C'est d'ailleurs en tenant compte de cette vérité qui échappe hélas à certains que l'armada mobilisée, depuis l'année dernière, par les ministères de l'Intérieur et de la Défense n'a pas baissé la garde. Aux dernières nouvelles, ça se confirme avec le maintien, à nos jours, de l'état d'alerte maximale dans ces deux départements stratégiques. Certes, l'omniprésence militaro-policière, exceptionnellement imposante à l'occasion de la parade du réveillon, a depuis quelque peu perdu de son ampleur, avec notamment une légère réduction du nombre de barrages policiers sur la voie publique. Mais, le plus important est que cette réduction a été compensée par l'intensification du travail d'investigation. Et cela, à la faveur de la banque de données alimentée, ces jours-ci, par les aveux des terroristes arrêtés récemment, d'une part, et par les informations précieuses distillées par les services de renseignements occidentaux et algériens, d'autre part. «Grâce à cette banque de données, nous sommes, lentement mais sûrement, sur de bonnes pistes», soutient un enquêteur au fait du dossier du terrorisme en Tunisie qui refuse, par contre, d'en dire plus, obligation de réserve et de confidentialité de l'enquête oblige. Cependant, on peut affirmer, sans aucun risque de se tromper, que ces bonnes pistes que notre interlocuteur tient à taire sont presque exclusivement concentrées dans les montagnes longeant nos frontières avec l'Algérie, ainsi que dans les régions sahariennes situées à la frontière tuniso-libyenne. Pour ce qui est des montagnes, nous avons constaté qu'elles continuent de subir des opérations de déminage et de bombardement, avec l'appui, tant aérien que terrestre de l'autre côté des frontières, des forces algériennes qui comptent aujourd'hui, dans cette zone de tous les dangers, pas moins de sept mille hommes. Or, le problème qui se pose encore pour la «coalition» tuniso-algérienne réside dans l'impossibilité de découvrir toutes les caches des terroristes embusqués au Jebel Chaâmbi et dans les autres monts séparant les deux frontières. C'est que, outre le nombre indéterminé de ces retraites, il n'est pas exclu que les fugitifs y aient creusé des tunnels leur permettant de survivre aux bombardements, de se ravitailler en armes et en denrées alimentaires et d'assurer leur fuite, à travers ces grottes, une fois l'étau devenu asphyxiant. «Le plus dur est là», reconnaît un agent de la Garde nationale qui estime que «cette énigme, par sa complexité, ne peut être jamais élucidée en quelques jours». Cela nous renvoit à la célèbre bataille de Tora Bora en Afghanistan, du nom de ce mont dans lequel s'étaient réfugiés, des mois durant, Ben Laden et ses hommes qui ont in extremis réussi, souvenons-en, à prendre au piège la pourtant redoutable armada militaire américaine qui n'a pu les neutraliser. La passoire libyenne En parallèle, nos forces de sécurité intérieure et de l'armée ont redoublé de vigilance à la frontière avec la Libye là où le plan «C» est toujours de rigueur après la parenthèse du réveillon. Il est vrai que cette frontière a conservé son degré de danger potentiel. D'abord en tant que point de transit privilégié. Ensuite, parce qu'elle constitue une véritable passoire, côté libyen où le gouvernement tarde encore à asseoir son autorité. Enfin, pace que cette frontière grouille toujours de jihadistes redoutablement armés et fermement déterminés à... créer des émirats islamiques en Afrique du Nord ! Tout cela pour dire que ceux qui ont jubilé à la suite de l'échec des menaces terroristes promises pour le réveillon devront réviser leur «liesse» à la baisse étant donné que la lutte pour le déracinement de l'hydre terroriste en Tunisie s'annonce autrement plus longue et harassante que jamais. Alors, gare à la distraction !