Par Ahmed NEMLAGHI - Peut-on dire du nouveau Premier ministre Béji Caïd Essebsi qu'il est l'homme qu'il faut à la place qu'il faut (the right man in the right place) ? Après avoir entendu son allocution du vendredi 4 mars dernier, on ne peut que répondre par l'affirmative. Sûr de lui, sans toutefois se montrer présomptueux, il fait une analyse objective de la situation sans manquer de louer l'action révolutionnaire du peuple dont notamment des jeunes avides de liberté et de démocratisation de l'Etat, afin d'en finir avec une dictature qui a étouffé le pays 23 ans durant. Il a d'ailleurs condamné l'attitude du président déchu qu'il qualifia de haute trahison, ce dictateur ayant pris la fuite, fuyant par là même ses responsabilités vis à vis du peuple et du pays. C'est que pour M. Béji Caïd Essebsi, ce politicien chevronné qui a commencé à prendre de multiples responsabilités au sein du gouvernement de Bourguiba, dès l'aube de l'indépendance, l'homme d'Etat a une obligation de résultat. C'est la raison pour laquelle, il a promis que le gouvernement provisoire sera résolu à mener avec ferveur et abnégation les affaires de l'Etat, jusqu'à la date prévue pour l'élection d'une assemblée constituante fixée au mois de juillet prochain. Le premier objectif à atteindre est de rompre totalement et définitivement avec l'ancien régime du président déchu. Certes cela demande beaucoup de travail et beaucoup de patiente, mais l'intention du premier ministre et de tous les membres du gouvernement va dans ce sens. En attendant il faut que tout le monde se mette au travail, afin de pourvoir aux besoins d'un nouvel Etat démocratique où il n'y aura plus de place aux malversations, à la corruption et aux exactions contre la liberté. Dans son allocution, M.Béji Caïd Essebsi a raconté une anecdote à propos de l'ancien président de la Russie(URSS à l'époque) qui est à méditer. Ce dernier ébloui par l'habillement chez les occidentaux a voulu faire faire un costume à l'européenne, après qu'on lui a offert un tissu anglais. Il a fait venir le meilleur tailleur de Russie pour cette tâche difficile. Et pour cause, ce dernier n'a pas réussi à le satisfaire, et fut d'ailleurs réprimandé à la manière russe…. Quelque temps plus tard, un tailleur totalement inconnu sur la place, lui a proposé de se charger de la tâche, et à la grande surprise générale, il la réussit à merveilles et le président n'en crut pas ses yeux, tellement il était satisfait. On demanda à ce tailleur ce qu'il a pu faire pour réussir, et il a tout simplement répondu : « Je lui ai pris ses justes mesures….. » Les justes mesures cela implique qu'on ne doit pas se hâter à faire des jugements, ou à prendre des décisions. Cela veut dire également évaluer les choses à leur juste valeur. C'est ce qu'on appelle faire la part des choses, c'est-à-dire faire preuve d'objectivité. C'est ce qui est demandé au responsable, dans une institution publique ou privée. Le chef d'Etat, le ministre, le juge, l'enseignant, le journaliste, le père de famille, doivent tous être objectifs et traiter n'importe quelle tâche avec désintérêt et sans préjugé aucun. Cette obligation de résultat , comme l'a si bien dit, le premier ministre, n'empêche pas qu'il y ait parfois des imperfections ou même des erreurs, l'être humain étant susceptible de se tromper. Là aussi il faut faire la part des choses afin de pouvoir distinguer, l'erreur de bonne foi, de la faute lourde,, et à mauvais escient. Celle-ci est impardonnable, pour le préjudice qu'elle est susceptible de causer aux victimes, c'est-à-dire le peuple. Le nouveau gouvernement est là pour mettre en place les rouages qu'il faut pour y remédier. Et c'est de bon augure.