Les déclarations récentes de Farhat Rajhi, l'ex-ministre de l'Intérieur au sein du deuxième gouvernement provisoire ont mis le feu aux poudres. Des déclarations incendiaires qui ont enflammé l'opinion publique du Nord au Sud du pays. Entre pro-Rajhi et antagonistes, les réactions étaient pour le moins qu'on puisse dire violentes et irascibles. Et quels que soient les courants politiques ou autres qui se cachent derrière, ces actes sont inadmissibles dans une période de transition démocratique, de récession économique et de manque de visibilité. L'économie tunisienne est au bout du gouffre et par ricochet les fondamentaux sociaux sont aujourd'hui menacés. SIGMA Conseil, vient de publier un sondage d'opinion sur l'impact des récentes déclarations de Farhat Rajhi. Le sondage d'opinion a couvert un échantillon de 504 individus originaires de 24 gouvernorats du pays, âgés de 18 ans et plus et qui ont entendu parler des déclarations de mercredi dernier de l'ex ministre de l'Intérieur et ex-président du Haut Comité des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La méthode utilisée est la méthode des interviews téléphoniques assistées par ordinateurs (CATI) réalisées durant les journées du 6 et du 7 mai courant. Sept questions ont été posées aux interviewés. Les résultats du sondage ne tiennent qu'à leurs auteurs. Sur la crédibilité des déclarations de Farhat Rajhi qui ont mis enflammé le brasier, 33,9% des interviewés les considèrent crédibles, 33,1% les décrédibilisent contre 32,9% restant sans opinion. Même si les réponses sont plutôt hétérogènes, les déclarations de X ou de Y ne doivent pas contribuer à faire avorter la Révolution et surtout ne pas prendre ce genre de propos comme prétexte pour semer le trouble et propager les actes de vandalisme et de saccage dans les quartiers et les rues de la Capitale. D'ailleurs, 62,3% des personnes interrogées considèrent que les propos de Rajhi sont à l'encontre de l'intérêt du pays. La majorité des Tunisiens s'interrogent sur le timing mais aussi sur l'utilité et les visées de ces déclarations. Qu'il s'agisse de fausses ou de vraies allégations, la situation actuelle du pays ne supporte pas ce genre de Tsunami. Déjà la scène n'est pas très « clean » et les partis politiques se lancent dans une lutte confuse et malintentionnée. Pluralité veut-elle dire débâcle et voyoutie ? La démocratie est un processus et une initiation de longue haleine qui requièrent patience, sagacité mais surtout « des gens bien disposés ». La majorité des Tunisiens sont des profanes de la vie politique. Même la citoyenneté et le civisme ne signifient pas grand-chose pour un bon nombre de nos concitoyens. Sur la question de l'intervention de l'armée dans la vie politique, les réponses divergent. 17,5% des personnes interviewées sont tout pour et 31% sont plutôt enclines sur le principe. 29,2% des interrogés ne sont pas du tout d'accord sur l'intervention de l'armée dans la vie politique. Au total on peut dire que 48,5% sont globalement d'accord contre 51,5% qui ne sont pas d'accord sur la question. Donc les positions se rapprochent. Il y en a ceux qui sont pour une intervention de l'armée à l'image de l'Egypte. Il faut dire qu'hormis le conflit religieux entre Musulmans et Chrétiens, l'Administration égyptienne avance méthodiquement vers la transition démocratique. Par ailleurs et sur la question des préjugés régionalistes, 74% des Tunisiens pensent qu'il y a des gens qui œuvrent dans l'ombre pour mettre le pays sous leur contrôle. Ce genre d'opinion est frappant et montre bel et bien qu'il est indispensable d'œuvrer préalablement à un nettoyage ou un lavage d'esprit des Tunisiens avant même de les encadrer politiquement. S'agissant des personnes qui inspirent le plus confiance aux Tunisiens, la population interrogée a répondu comme suit : le Premier ministre Béji Caïd Essebsi semble être l'homme qui inspire le plus confiance aux Tunisiens avec 39,5% de votes, suivi par Rachid Ammar, Farhat Rajhi et Kamel Eltaïef. Indépendamment des réponses et des réactions des Tunisiens quant aux déclarations de Rajhi, la Tunisie se trouve aujourd'hui à ses enfants. Nous sommes tous responsables, médias, journalistes, partis politiques, société civile, agents de sécurité et citoyens. Les médias et les organes de presse ont le droit et l'obligation d'informer, d'analyser les faits et de révéler la vérité tout en respectant l'éthique de la profession. Les partis politiques doivent contribuer à la réussite de la transition démocratique en respectant la transparence et l'intégrité du jeu politique. Les membres du gouvernement sont dans l'obligation de mener le navire à bon port et lui éviter les écueils d'une tempête houleuse risquant de le faire chavirer et sombrer à tout jamais. De part leur attributions, les agents de sécurité sont obligés d'assurer la sécurité du pays et de collaborer avec toutes les parties concernées et surtout les citoyens pour un retour du calme, de la sérénité et surtout de la paix sociale et économique dans le pays. Il ne faut pas oublier que les agents de sécurité sont des êtres humains vulnérables et perfectibles, des Tunisiens qui ont le droit au respect. Et l'insécurité ne profite qu'à leurs précurseurs. Les citoyens doivent contribuer à apaiser les rancœurs et à circonscrire les flammes et rompre avec les pratiques de vandalisme, de détérioration des biens publics et privés. Yosr GUERFEL AKKARI