Les médias (télévisions, radios et presse écrite) ont-ils assuré un traitement indépendant, impartial, responsable et équitable de l'événement électoral et de ses acteurs ? C'est à cette question que la coalition des ONG pour la transition démocratique a essayé de répondre. Pour ce faire, une équipe composée de 35 jeunes moniteurs observent depuis quatre mois 15 médias tunisiens à savoir : Achourouk, Assahafa, Assabah, Essarih, La Presse, Le Temps et Le Quotidien. Les chaînes télévisées sont également, passées au crible. Il s'agit d'Al Wataniya 1 et 2, de Nessma TV et d'Hannibal TV. Le monitoring a touché aussi 4 radios : la radio nationale, la radio jeunes, Mosaïque FM, et Shems FM. « De manière générale, le bilan -malgré certaines limites et quelques cas manifestes de dépassements, est plutôt encourageant », déclare Mme Sana Ben Achour coordinatrice générale de l'opération du monitoring des médias lors des journées de dialogue avec les journalistes tenues le 26 novembre. « Les médias, tous types confondus, ont tenté d'expérimenter la liberté et l'indépendance recouvrée. Toutefois en dépit du volontarisme, certains manquements ont été identifiés participant des vieux réflexes et de l'inexpérience », d'après les conclusions préliminaires du Monitoring des médias. Les signes d'amélioration En fait, la rencontre avec les représentants des médias était une occasion pour présenter les bons signes de l'amélioration du secteur. Mme Ben Achour parle d'un « vent de liberté » qui commence à souffler sur le secteur. Elle signale qu'une « distance a été prise par rapport à l'activité gouvernementale et qu'il y a un sens critique nouveau ». Le changement concerne aussi la couverture qui « tient compte du pluralisme nouveau », d'après la coordinatrice. Ce n'est pas tout. Les journalistes doivent se réjouir plus ou moins des résultats du monitoring lequel a démontré que « des débats politiques soutenus », ont été lancés en plus « d'une volonté d'apporter l'information politique », ajoute-t-elle. Les médias ont tenté lors des quatre derniers mois « d'ouvrir le champ à l'opinion », chose qui n'était pas pratiquée auparavant. Les moniteurs ont relevé aussi la neutralité des médias « sauf exception quand il s'agissait de faire des commentaires sur les élections. Points faibles Le bilan « positif » a été présenté en premier lieu pour ne pas heurter la sensibilité des journalistes. Peut-être. D'ailleurs, la coordinatrice s'est limitée lors de son exposé à des généralités sans entrer dans les détails. Toutefois, elle a relevé des points faibles. Les qualifiants de « limites et manquements ». En effet, les médias n'ont pas assuré « un traitement égal à tous les acteurs politiques comme il y a eu une sous médiatisation des femmes, actrices politiques ». Autres points négatifs soulevés par les moniteurs : « le manquement à l'interdiction de la publicité politique et le manquement à la journée du silence ». Mme Ben Achour a aussi évoqué « la confusion des rôles » tout en mettant en relief le manque de fiabilité des sources d'information qui ne sont pas affichées. Le monitoring a démontré que les médias se basent « souvent sur la rumeur » et qu'ils sont « au service de la promotion politique et de leurs dirigeants ». La liste des lacunes ne se limite pas à ce niveau. « Quelques discours diffamatoires » ont été diffusés ou reportés dans les médias tunisiens lors de ces derniers mois sans pour autant négliger « des erreurs professionnelles de type : données non maîtrisées, erreurs sur les personnes, les photos, les noms, les évènements », toujours d'après Mme Ben Achour qui a conclu par dire que les médias avaient « un style corrosif peu équitable ». Couverture A remarquer dans ce cadre que le monitoring s'est intéressé à la couverture de la phase électorale (campagne électorale, élections) ainsi que la formation et les travaux de la Haute Instance de Protection des Objectifs de la Révolution et de la Transition Démocratique ainsi que l'ISIE. Une attention particulière a été accordée aux femmes et aux actrices politiques. Par ailleurs, pour conclure son exposé et présenter des éléments de discussion, Mme Ben Achour a posé un ensemble de questions qui restent encore sans réponses exhaustives à cause de l'absence des journalistes et des représentants de la société civile lors de cette rencontre. Un autre rendez-vous est même prévu dans ce sens pour formuler les recommandations susceptibles d'aider les journalistes à bien effectuer leur travail lors des prochaines rendez-vous électorales. Un travail qui doit être basé sur la neutralité, le professionnalisme, l'indépendance et l'impartialité, se sont mis d'accord les participants. Le débat D'ailleurs, ces éléments restent indispensables pour garantir une couverture médiatique équitable lors de toutes les échéances électorales. « Il est vrai que le rôle du journaliste est important mais il est plus difficile en période de transition démocratique », ont soulevé les intervenants. Le journaliste doit faire preuve de professionnalisme sans tomber dans la subjectivité comme il doit respecter la déontologie du métier. Sana FARHAT
Questions posées lors du débat • Les médias étaient-ils bien informés du monitoring et de l'essentiel de sa méthodologie ? • Les médias ont-ils accepté le principe d'être soumis à une observation systématique ? • Les médias étaient-ils bien informés des normes régissant leur comportement en campagne électorale ? • Les médias ont-ils des remarques ou des critiques sur ces règles ? • Les médias ont-ils choisi, parfois, de limiter la couverture de la campagne électorale par peur de ne pas pouvoir respecter les règles ? • Quelles sont les contraintes majeures rencontrées par les médias dans la couverture de la campagne électorale ? • Quels ont été pour les médias les défis les plus passionnants de la campagne électorale ? • Que pensent-ils les médias de la publicité payante en campagne électorale ? Devrait-elle être interdite ou permise ? • Comment les médias ont-ils interprété le concept de « silence électoral » ? Pourquoi de nombreux médias ne l'ont-ils pas respecté ? • Que pensent-ils les médias de l'obligation à la neutralité et impartialité faite aux médias publics et privés ? Est-ce qu'ils la perçoivent comme une limitation à la liberté d'expression ? • Les médias jugent-ils avoir fait un travail satisfaisant dans la couverture de la campagne ? Que pouvait-il être mieux fait ? • Comment les médias ont-ils organisé le travail pour assurer la couverture de la campagne électorale ? • À la lumière de cette expérience, que feraient-ils les médias pour améliorer la couverture d'une campagne électorale ? • En général, quelles sont les leçons à tirer de cette première expérience ?