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«Malheureusement, il est des gens qui s'improvisent connaisseurs de la chose religieuse alors qu'ils ne le sont aucunement» L'interview: Noureddine Khademi, ministre des Affaires religieuses au “Temps”
Le Temps : Que pensez-vous du mariage « Orfi » ( coutumier), ‘'Wakti'' (temporaire) et ‘'Motaa''. On dit que ce dernier a été pratiqué du temps du Prophète (BSDL) ? Noureddine Khademi : Un mariage doit être contracté, en ce sens où l'on doit respecter la loi pour conserver les droits de tout un chacun. D'autant plus qu'un mariage doit être annoncé et non pas fait en cachette. Par ailleurs, un mariage ne peut pas être authentique s'il n'est pas prévu dans la durée. Pour ce qui est du mariage il n'est plus de mise. Le “Motaa'' a été permis pendant les premières années de l'Islam pour des raisons bien particulières et a été depuis interdit d'une manière définitive pour être remplacé par un mariage dont la dissolution n'est effectuée que par le divorce ou le décès d'un conjoint. Qu'en est-il de la polygamie, est-ce que vous la soutenez ? Cette question a deux aspects : l'un est afférent au droit positif et des interprétations des théologiens et l'autre est afférent à la société musulmane, de sa compréhension et de son application de la chose religieuse. Je crois que ce n'est pas une question fondamentale et ne requiert pas de ce fait autant de questionnements. Même dans les pays où la polygamie est pratiquée, les hommes qui se la permettent sont une minorité. Que pensez-vous des salafistes qui deviennent de plus en plus visibles dans notre société ? Tout dépend, en fait, de ce que l'on entend par salafisme. Car il y a plusieurs courants dans le salafisme. Je pense que le courant fondamentaliste n'est autre que le résultat d'un manque d'encadrement religieux pendant ces dernières décennies. Et c'est la Révolution qui a permis à des courants qui étaient peu visibles de sortir au devant de la scène et de s'exprimer. Cela est valable à tous les domaines. Malheureusement, il est des gens qui s'improvisent connaisseurs de la chose religieuse alors qu'ils ne le sont aucunement. On ne peut pas éradiquer une tendance sectaire en annonçant des mesures administratives. Je crois que ce problème requiert une approche globale où se mêlent plusieurs aspects: savant, moral, médiatique, juridique et l'aspect société civile. Car c'est notre unité nationale qui est en jeu et il faut bien entendu respecter les spécificités de notre pays. On a l'impression que la Tunisie devient une «terre de mission » pour plusieurs prédicateurs salafistes. Quelle est votre position vis-à-vis de ceux qui prétendent que la Tunisie a besoin d'être islamisée ? Pour commencer, je dois préciser et insister sur le fait que le ministère n'a invité aucun prédicateur ou cheikh excepté le Dr Omar Ben Salah un universitaire tunisien originaire de Djerba qui travaille aux Emirats arabes Unis, qu'on a convié à l'occasion de la célébration de la fête du Mouled. La Tunisie est un pays musulman depuis la première année de l'Hégire. L'islam est resté depuis la religion de son peuple. Et c'est son histoire qui en atteste. Nous sommes des sunnites qui se rapportent à Malek Ibn Anas, L'Imam de Médine. Nous sommes ouverts à tous les points de vues que nous écoutons dans le cadre d'un échange mutuel d'idées, même si nous avons nos propres références : nos émérites savants zeitouniens : Mohamed Tahar Ben Achour, les Cheikhs Zaghouani, Zoghlami, Ben Miled, Hattab, Ben Arfa, Mezri, Obbi,etc. Est-ce que vous soutenez l'idée qui dit qu'un retour à la loi islamique, Charia est indispensable ? La question ne revient pas à savoir si on va appliquer ou pas la Charia. Car il est des aspects de la Charia qui sont déjà de mise dans notre quotidien de Musulmans et qui sont plus ou moins appliqués par les uns et les autres, comme le fait d'observer un comportement respectueux d'autrui dans la rue, être sensible aux malheurs des autres, pratiquer plusieurs actes de foi, etc. Un autre aspect concerne les rites religieux. Il est des rites qui constituent des valeurs irréversibles en Islam. Il y en a d'autres qui sont exportés d'ailleurs et qui nous sont étrangers. Il n'est pas question de les adopter. Le fait de porter le Niqab, en fait partie ? Le mode vestimentaire est un détail qui présente une partie de la religion et non pas sa totalité. Le voile intégral ou le Niqab n'est pas une obligation selon la majorité des théologiens même si certains ont montré le contraire. Le Niqab peut aussi être usité par la coutume et de ce fait devenir une prescription coutumière dans certaines sociétés musulmanes. Mais la femme qui porte le voile intégral doit dévoiler son visage quand il s'agit de s'atteler à des mesures administratives. Le Hijab par ailleurs est une obligation. La femme qui ne le porte pas n'est pas une mécréante. Mais elle aurait manqué à une obligation prescrivant un châtiment à celles y contrevenant. La femme qui décide de porter le Hijab doit en être convaincue. Il ne faut en aucun cas la forcer à le mettre au risque duquel elle n'en sera pas récompensée dans l'au-delà. Quel sont les grands dossiers à traiter d'urgence au ministère des Affaires religieuses ? Le discours religieux est une priorité actuellement. Il s'agit de former les cadres religieux qui ne devraient pas parler au nom d'une secte, d'un courant ou d'un parti politique. Un prédicateur doit observer de la modération dans son discours qui doit être appréhendé par tous et non pas se contenter de toucher une minorité. Nous voulons un discours qui se renouvelle et qui va de pair avec les exigences actuelles de notre société. Voilà pourquoi nous allons programmer des formations ciblant les prédicateurs. La presse spécialisée dans la religion fait horriblement défaut sous nos cieux. On s'y penchera de près pour aider à ce qu'elle soit porteuse de contenus qui unifient toutes les franges de la société et ne provoquent pas ainsi leur diversion.