Affaire Mourad Zeghidi et Borhene Bessaies : Nouveaux développements    Tunisie – Les bâtonniers en appellent au président de la République    El Fouladh : La joie de la libération est de courte durée, 7 mandats de dépôt tombent    La STB affiche de solides performances au 1er trimestre et avance dans l'exécution de son plan    L'Algérie prévoit de produire 3.7 millions de mètres cubes d'eau dessalée d'ici 2024    Tunisie – Séisme de magnitude 2.3 à Gafsa    Wataniya : La boulette de dimanche coûtera cher, la Direction tient les coupables    Ligue 1 pro – LNFP : l'Espérance sort du silence et l'USMO fera appel (vidéos)    Tunisie – METEO : Des températures nocturnes atteignant 32°    Revendications des boulangers tunisiens pour sauver leur secteur    Abir Moussi : ils essaient de m'enterrer vivante !    Nouvelle composition de la direction nationale d'Arbitrage    L'UBCI adhère officiellement au programme «ADAPT» et devient partenaire stratégique de l'Agence Italienne pour la Coopération au Développement (AICS)    Le roi Charles III dévoile son premier portrait officiel    EST - Al Ahly : Demain, mise en vente des billets    Les pâtisseries traditionnelles libérées du fardeau des taxes    Carthago Delenda Est : la locution imprimée sur le T-shirt de Zuckerberg qui a offensé les Tunisiens    France : ils servent du porc pour empêcher les SDF musulmans de manger, on en est là…    Siliana: Un mort et cinq blessés dans un accident de la route    Festival de Carthage: Les préparatifs avancent à grands pas    Coupe Arabe : Le Qatar accueillera les 3 prochaines éditions    Sécurité et souveraineté alimentaires en Tunisie | L'objectif : répondre aux besoins du citoyen par nos propres ressources    Barrages : Le taux de remplissage ne dépasse pas 34%    Report de l'audience de l'avocate tunisienne Sonia Dahmani à lundi prochain    Pourquoi | Ça n'arrive pas qu'aux autres…    Célébrez la fête des mères avec Ooredoo et gagnez 10 000 DT !    La société Ciments de Bizerte arrête la production de clinker    Mark Zuckerberg : Carthage doit être détruite !    Tunisie: Le t-shirt de Mark Zuckerberg enflamme les réseaux sociaux    À la Galerie Selma-Feriani : Image, récit et représentation    Vient de paraître – «Kef Al Ajayeb » de Bahri Rahali : Le mont des merveilles !    «Revival», nouvel album de Gultrah Sound System : Une authenticité renouvelée    Le gouvernement présente de nouvelles législations sur les congés parentaux    FARK : Ghazi MABROUK    Vient de paraître: Des sardines de Mahdia à la passion des mathématiques de Béchir Mahjoub    Aéroport Tunis-Carthage : Un passager arrêté avec un pistolet cachée dans sa valise    Tunisie : l'AMA retire les sanctions, le sport reprend son souffle    Abdelaziz Kacem: De «Genocide Joe» à Meyer Habib, dit «Le Phacochère»    AVIS D'APPEL D'OFFRES N° 06/2024    MEMOIRE : Fatma Kilani JRAD    USA : Un milliard de dollars d'armes destinées à Israël en cours d'approbation du Congrès    "Il faut imaginer Sisyphe heureux"    Le Drapeau Tunisie de retour à l'intérnational avec la fin de l'affaire Antidopage    L'Agence mondiale antidopage lève les sanctions infligées à la Tunisie    Des artistes Tunisiens au Québec en Tunisie dans une exposition conjointe à Montréal    Habib Touhami: La politique américaine au Moyen-Orient et le sionisme chrétien    Tunisie : enquête ouverte sur l'incident du drapeau national    Décès du premier patient ayant subi une greffe de rein de porc    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«La mouvance salafiste veut s'imposer comme un acteur politique à part entière»
Slaheddine Jourchi, politologue, spécialiste des mouvements islamistes
Publié dans Le Temps le 03 - 01 - 2012

«Ennahdha a pris langue avec les salafistes en vue de les contenir, mais des divergences profondes opposent les deux mouvements»
«Une partie de la mouvance salafiste réfléchit à la création d'un parti»
«La Tunisie compterait plusieurs milliers de salafistes, âgés pour la plupart de 17 à 30 ans, mais la mouvance n'est pas homogène»
Après une courte trêve post-électorale, les salafistes tunisiens donnent , de nouveau, de la voix et occupent la rue, où ils tentent d'imposer leur marque à une société largement sécularisée. Fait nouveau : ces partisans d'un islam rigoriste ne sont plus dans la réaction comme ce fut le cas pour les manifestations contre la diffusion des films «Persépolis» et «Ni Allah, ni maître», jugés «blasphématoires» ou encore pour les attaques contre les universités qui refusaient l'inscription des étudiantes portant le niqab. Ils sont désormais plutôt dans l'action comme en atteste l'agression qu'ils ont perpétré contre la troupe musicale «Awled El Manajem» (Enfants des mines), qui donnait un concert à la maison de culture de Meknassi (Sidi Bouzid) le 17 décembre, date de commémoration du premier anniversaire de la révolution. Plus récemment, des groupes salafistes ont essayé d'empêcher manu militari des gens de célébrer les fêtes de fin d'année.
Cette intrusion dans l'espace public se traduit parfois par des confrontations sanglantes. Un jeune homme a été, en effet, blessé à l'arme blanche lors d'une rixe qui a éclaté, le 29 décembre, entre des habitants de Meknassi et des salafistes qui tentaient de dissuader des jeunes de célébrer le réveillon.
Les activistes fondamentalistes continuent également de pousser leurs pions dans les mosquées et les universités. Dans les premières, ils réussissent parfois à placer leurs imams. Dans les secondes, ils tentent d'imposer leurs normes en réclamant l'aménagement de salles de prière et le droit des jeunes femmes à porter le niqab.
Dans cet entretien, le politologue spécialiste des mouvements islamistes, Slaheddine Jourchi, (voir sa bio-express en encadré) décrypte les visées de cette mouvance minoritaire de l'islam tunisien.
Le Temps: Après une courte pause juste après les élections, les salafistes ont repris leurs attaques contre ce qu'ils considèrent comme étant des «dérives sociétales». Comment expliquez-vous ce regain d'activisme alors même que les islamistes d'Ennahdha gouvernent ?
Durant les élections, une partie de la mouvance salafiste a voté pour Ennahdha sur la base d'une fatwa appelant à voter pour le parti le plus proche des préceptes de l'Islam. Une autre faction de cette mouvance a boycotté le scrutin, jugeant que même Ennahdha n'ira pas jusqu'à réclamer l'application de la Charia islamique. Le regain d'activisme salafiste était, donc, attendu. Le salafisme est, en fait, un mouvement religieux pur et dur contrairement au mouvement Ennahdha qui a fait des concessions et qui est, par conséquent, devenu proche du modèle de la démocratie à l'occidentale.
De plus, les questions liées à la morale et aux pratiques religieuses sont très importantes pour les salafistes, dont une partie plaide pour le recours à la violence en matière de lutte contre les péchés et les vices de la société.
La mouvance salafiste n'est pas, donc, homogène ?
Effectivement. Cette mouvance, dont l'appellation provient du terme « salaf » (les ancêtres), prône le retour à la communauté des premiers musulmans et aux deux sources de l'Islam: le Coran et la Sunna. Elle n'est, toutefois, ni homogène, ni uniforme. Il s'agit, en réalité, de groupes qui ne se sont pas mis d'accord sur une stratégie d'action commune. Globalement, on peut classer ces groupes salafistes en deux grandes catégories: le salafisme conservateur et le salafisme djihadiste. Le salafisme conservateur, appelé également «salafisme scientifique », est le courant majoritaire. Dans sa forme «scientifique», le salafisme est un courant non violent qui prône la prédication (Eddaâwa) pour lutter contre les innovations (Bidâa) dans la religion n'ayant aucune preuve dans le Coran et la Sunna et restaurer la pureté de l'Islam. Le salafisme scientifique s'oppose à la désobéissance aux gouvernants (Al-khorouj ala –alhakem) et à la lutte armée pour changer les régimes n'appliquant pas une version rigoriste de l'Islam. Selon eux, mieux vaut accepter et conseiller l'émir injuste que risquer la «fitna » (discorde).
Les salafistes djihadistes sont, quant à eux, favorables au recours à la violence pour destituer les gouvernements qui s'écartent de la Charia et pour dissuader les auteurs des péchés. Cette branche rejette l'idée même de démocratie qu'elle juge contraire à la Charia. Tout ce qui est lié à la démocratie occidentale comme les élections et les instituions démocratiques relève de l'hérésie, aux yeux des salafistes djihadistes.
Existe-t-il à votre connaissance un dialogue entre Ennahdha et les salafistes?
Le mouvement Ennahdha a pris langue avec les salafistes pour tenter de les contenir, mais des divergences profondes opposent ces deux mouvements. Ces divergences se résument à l'acceptation par Ennahdha des règles du jeu démocratique.
Mais jusque-là Ennahdha semble éviter d'entrer dans une logique de confrontation avec le courant salafiste pour des considérations électorales. Ce parti tente, en effet, de séduire un électorat hétéroclite et disparate qui va des citoyens attachés à leur identité arabo-musulmane aux islamistes radicaux. Et c'est d'ailleurs pour cette raison qu'il est souvent accusé de tenir un discours pluridimensionnel.
Les salafistes ou, du moins, une partie d'entre eux pourraient-ils créer un parti comme c'est déjà le cas en Egypte.
La création de certaines associations comme celle des partisans de la Charia, qui compte plus de 16000 fans sur Facebook, atteste de la volonté des salafistes de s'organiser. Cette mouvance aspire, en effet, à devenir un acteur politique à part entière. Une partie de la mouvance salafiste réfléchit déjà à la création d'un parti et semble s'orienter vers l'acceptation du pluralisme politique, le rejet de la violence et la modération. Lors d'une réunion tenue il y a quelques jours, certains cheïkhs salafistes ont d'ailleurs critiqué le sit-in en faveur du port du niqab qui a paralysé la faculté des lettres de la Manouba. Ces signes encourageants nous ont emmenés à entamer un dialogue avec eux dans le cadre du forum de pensée Al-Jahedh.
Y a-t-il un profil type des salafistes ?
Selon les dernières estimations, la Tunisie compterait plusieurs milliers de salafistes, dont environ 1800 ont été libérés dans le cadre de l'amnistie générale décrétée après la révolution. La plupart des éléments salafistes sont généralement âgés de 17 à 30 ans et la majorité d'entre eux n'ont pas un bon niveau d'instruction. Mais ce n'est pas un milieu très organisé. Ils n'ont pour l'instant ni chef de file, ni une vision stratégique claire.
Propos recueillis par Walid KHEFIFI

Bio-express
Politologue et écrivain tunisien, Slaheddine Jourchi est un spécialiste des mouvements islamistes et des phénomènes politico-religieux dans le monde arabe. A l'âge de, à 16 ans, il se joint à Rached Ghannouchi, Abdelfattah Mourou, Hmida Ennaïfer et d'autres militants pour fonder la «Jamaâ Islamique», qui donna naissance au Mouvement Ennahdha. Dès 1977, il a pris ses distances avec Ennahdha pour fonder le courant de « la gauche islamique», connu également sous l'appellation des «islamistes progressistes». Ce courant estime que l'école des Frères Musulmans ne peut pas assimiler la spécificité tunisienne, ni apporter des solutions appropriées aux problèmes du pays. En 1990, Slaheddine Jourchi a créé le Forum Al-Jahedh. Il a , en parallèle, milité au sein de la Ligue Tunisienne pour la défense des droits de l'Homme. Récemment, il a été l'un des initiateurs de «l'Alliance centriste indépendante » qui a présenté des listes pour les élections de l'Assemblée Constituante, avec, entre autres, Abdelfattah Mourou, Skander Rekik et Radhouène Masmoudi.
daassi
riadh


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.