Le président de la République Moncef Marzouki a entrepris plusieurs rencontres en tête à tête avec les principaux responsables des principaux partis politiques. Une initiative qui n'est pas la première en son genre. Il faut relever en ce sens que ces rencontres même si elles sont nécessaires n'ont rien apporté de nouveau qui puisse faire avancer les choses, à l'exception des séances de dialogue à Dar Dhiafa. Ces réunions ont été clôturées par un dîner d'Iftar commun où il a été question de former un comité qui veillera à la poursuite de la période transitoire et des prochaines élections. Le Front populaire n'a pas participé à ces réunions. Avant ces rencontres le Front populaire avec d'autres forces politiques et des associations de la société civile avaient appelé à l'organisation d'un Congrès national de Salut pour sauver le pays de la crise dans laquelle il se débat. Encore une énième tentative ! Au niveau du Gouvernement on ne s'est pas croisé les bras. Il en est de même pour l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT). Au terme d'une rencontre à La Kasbah avec le chef du gouvernement provisoire Ali Laârayedh, Houssine Abbassi, secrétaire général de l'UGTT a annoncé la reprise du dialogue national la semaine prochaine, tout en précisant que « le nouveau round du dialogue national portera sur la situation sécuritaire dans le pays et la neutralité de l'administration ». Ces réunions examineront aussi les violences perpétrées par les Ligues de protection de la révolution (LPR), a indiqué M. Abassi évoquant l'apparition récemment de nouvelles LPR. La situation politique délicate que traverse actuellement la Tunisie, particulièrement suite aux événements qu'a connus l'Egypte, interpelle toute l'élite tunisienne, classe politique et associations de la société civile. Le paradoxe c'est que tout le monde est conscient qu'il faut éviter à la Tunisie le scénario égyptien. Mais rien de concret et de sérieux n'est entrepris pour éviter au pays les soubresauts qui secouent l'Egypte. L'accélération de la finalisation de la rédaction de la Constitution avant fin septembre prochain et la fixation de la date des prochaines élections présidentielles et législatives, sont devenues impératives. Houssine Abbassi pense qu'un « dialogue sérieux est la solution la plus indiquée pour assurer la transition, rapprocher les points de vues et parvenir à des consensus autour des problèmes et des litiges qui se posent ». Le dialogue doit reprendre en présence des premiers responsables des partis et ses décisions devront être contraignantes. La multiplication des initiatives n'est-elle pas de nature à perturber l'opinion publique ? Cette situation de clair-obscur, jusqu'à quand va-t-elle durer ? Mohamed Kilani, secrétaire général du Parti Socialiste (PS) rappelle dans une déclaration au Temps que « l'UGTT a été le premier à appeler au dialogue. Il y a eu un arrêt du processus. D'autres groupes politiques ont appelé à d'autres projets de lutte. L'UGTT et les autres associations parrainant le dialogue se sont senties marginalisées. L'UGTT a raison de relancer le dialogue. Ceux qui sont passés à la vitesse supérieure, n'ont consulté personne. Après une réunion de concertation, on est passé à l'appel à un congrès national de Salut. Il y a une véritable perturbation dans les milieux politiques. Une certaine distance a été prise avec la société civile. Marzouki a entrepris sa propre initiative. Je suis favorable à la proposition de dialogue de l'UGTT, car les premières questions du dialogue national n'ont pas été résolues. Les discussions ne se sont pas achevées concernant les choix à faire. Appeler d'une manière unilatérale à la dissolution de l'ANC, n'est pas constructif du tout. L'UGTT est la mieux placée pour réussir le dialogue national. Nous avons des revendications sur la Constitution, les rendez-vous électoraux, la transition à achever. On ne peut outrepasser ces revendications et appeler à la fin du régime et la dissolution de l'ANC ». Faouzi Charfi, dirigeant à Al-Massar affirme au Temps, « il nous parait important de reprendre l'initiative de l'UGTT. Elle a été à l'origine du dialogue national. Il y a aussi la commission du consensus au sein de l'Assemblée Nationale Constituante (ANC). C'est elle qui va régler ou va échouer à trouver une solution globales aux problèmes concernant la Constitution. L'initiative de l'UGTT permettra de résoudre les autres problèmes. S'il n'y a pas un environnement électoral favorable à des élections transparentes et démocratiques, il n'y aura pas d'élections. Trois conditions essentielles doivent être remplies pour la réussite de ce dialogue. Les Ligues de protection de la Révolution doivent être dissoutes. Le parti au pouvoir doit donner des signaux sérieux pour faire la lumière sur l'assassinat de Chokri Belaïd. Enfin, il faut revenir sur un certain nombre de nominations dans l'administration, les gouvernorats et les délégations. Doivent être revues les nominations faites dans les ministères qui sont en rapport avec les élections, les ministères de l'Intérieur, de la Justice et des Affaires étrangères. Si le dialogue national de l'UGTT serve de cadre pour prendre des décisions contraignantes au Gouvernement, tant mieux, sinon ça sera un dialogue pour le dialogue. Il faut des décisions précises, claires, nettes et contraignantes. Il faut l'accord du parti Ennahdha. Par ailleurs, bonne est l'idée avancée lors de la énième tentative de concertation avec le président de la République pour la création d'un haut conseil qui prendra des décisions qui s'imposent. Tout ce-ci reste au stade de vœux pieux. Ennahdha ne refuse rien, mais ne fait rien. Il faut qu'elle donne des signaux clairs, si on veut éviter le scénario égyptien. Beaucoup de tentatives de dialogue n'ont pas abouti. Un seul parti sur 17 a tout bloqué dans le passé. Si le dialogue reprend avec la même conception que les tentatives précédentes, il ne réussira pas. Nous demandons le consensus. Ennahdha doit prouver qu'elle y tient de façon sérieuse ».